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Ecrits suivis

Clore (1), par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 09 Novembre 2015. , dans Ecrits suivis, Ecriture, La Une CED

 

« Ce qui inquiète et passionne l’humanité, c’est la naissance et le passage des dieux, des saints et des héros »

Louis Jouvet

2014

 

Un hôtel plongé dans le noir. C’est sans doute une panne. Il y a cependant diverses parties du bâtiment que l’on aperçoit. Une sorte de jardin d’hiver que l’on dirait à l’abandon. La première volée d’un petit escalier étroit. En tout cas, on pourrait imaginer le décor de cette pièce comme celui que j’ai vu dans les années 80 sur la scène du Théâtre de la Ville et qui représentait une piscine sans eau tout à fait envahie par la moisissure et la végétation. Nous sommes peut-être aussi dans un manoir vétuste. Les personnages sont habillés de gris ; chapeaux gris, chaussures grises, pardessus gris. Il y a aussi beaucoup de bagages, des cartons vides. Peut-être est-ce la réunion d’un automobile-club de province ?

Jean et Jean-Pierre Giraudoux : le poème du Père et du Fils (1)

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Jeudi, 05 Novembre 2015. , dans Ecrits suivis, Ecriture, Création poétique, La Une CED

 

 

 

 

 

Jean et Jean-Pierre Giraudoux

Nous parlent

 

À chaque instant

Ils nous disent

 

Nous parlant

Ils parlent de nous

D1 - Troisième et dernière partie

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Jeudi, 02 Juillet 2015. , dans Ecrits suivis, Ecriture, La Une CED

 

 

Juin est passé. J’ai quitté l’île de Vancouver, Pacifique Nord, et traversé le continent d’ouest en est. En survolant l’Atlantique, je n’ai pas besoin de me pencher vers le hublot pour deviner sous la carlingue l’étendue bombée de l’océan épouser la couleur du ciel et, en son sein, d’autres troupes d’orques. De retour des fjords norvégiens, elles croiseront peut-être la troupe D de Colombie-Britannique au hasard de leur route.

J’ai scruté, durant mon séjour, avec une résignation croissante l’horizon. La troupe D est arrivée comme prévu. Pas Dalva. J’ai voulu imaginer que ses compagnons me chantaient de ne pas être triste, que c’est la vie. La vérité tient toute dans cette banalité, c’est la vie. Tant pis pour ceux qui l’idéalisent. Depuis quand et comment est-elle morte ? On meurt un jour parce qu’il le faut, voilà tout.

D1 Deuxième partie sur trois

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Jeudi, 25 Juin 2015. , dans Ecrits suivis, Ecriture, La Une CED

 

En attendant d’embarquer un de ces jours, je scrute les tourbillons. Le varech y dessine des chevelures gluantes comme en porteraient des sirènes qui se négligent. Peut-être Dalva va-t-elle surgir brusquement, cette perruque sur la tête, projetant en l’air une proie qui aurait eu la folie de s’y croire à l’abri. Mais les orques ne surgissent brusquement que pour qui ne les a pas guettées et je guette, ratissant du regard les flots jusqu’à l’autre berge et ses forêts de thuyas. Souvent, ma vue se heurte contre des bateaux promenant leur cargaison de touristes avides de photographies.

Si j’étais aventureuse, je soudoierais le cétologue pour qu’il m’emmène avec lui à Crozet. Dans le jabotement des manchots et le rugissement des lions de mers, il y observe une progéniture apeurée mourir, dès sa première sortie, dans la gueule des épaulards – cet autre nom de l’orque. Mais quand, longeant la rive, je suis doublée joyeusement par l’aileron de Dalva ou d’autres, je cultive le secret de ma passion pour elles.

D1 - Première partie sur trois

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Jeudi, 18 Juin 2015. , dans Ecrits suivis, Ecriture, La Une CED

 

Sur ce sentier d’où je domine les eaux du détroit de Johnson, les fleurs de cornouiller signent, à flanc de coteaux, l’avènement de juin. Quand je suis arrivée hier dans la nuit, j’ai pu brièvement observer de la fenêtre de mon chalet les flots rutilants avant que les rayons de lune cessent de les éclairer mais déjà leur rumeur me reposait du décalage horaire et calmait mon impatience des retrouvailles.

Dans le jour levé depuis quelques heures, la rumeur enfle au fur et à mesure que je descends vers la berge où je me posterai aujourd’hui. Un festin et son spectacle se préparent. Les saumons ont commencé à remonter le bras de mer pour retrouver le lieu de leur naissance où ils vont frayer. Les grizzlis les attendent et les orques les suivent. Des poissons éventrés par les crocs ou les griffes des uns, les dents des autres, brilleront un instant encore dans une gerbe d’éclaboussures où leur sang se diluera, faisant diversion pour que d’autres aient la vie sauve et perpétuent l’espèce.

Mais elle, quand va-t-elle arriver ? Quand verrai-je son aileron entamé autrefois par un filin de pêcheur battre le pavillon de sa survie et trancher l’eau comme une lame pour y disparaître un moment avant de ressurgir, plus loin ? Elle mènera la troupe D. Elle est donc D1 selon la classification établie par le cétologue du coin. En mon for intérieur, je l’appelle Dalva.