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Pic, Jack Kerouac

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 27 Octobre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La Table Ronde - La Petite Vermillon

Pic, mai 2017, trad. anglais (USA) Christophe Mercier, 144 pages, 5,90 € . Ecrivain(s): Jack Kerouac Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

Ce dernier et bref roman de l’auteur célébré de la Beat Generation, publié la première fois en anglais en 1971, trouve ici, grâce à la traduction de Christophe Mercier, une nouvelle chance de se faire connaître. Le titre, certes, est loin de l’importance de Sur la route, Le rouleau original, ou de Big Sur. On retrouve néanmoins sous la plume de Kerouac quelques obsessions musicales ou thématiques (la route, la ferveur pour les déclassés, l’ambiance de villes nocturnes…).

L’histoire de ces deux frères, Slim, le grand, amateur de jazz et musicien lui-même, et Pic(torial Review Jackson), entre Caroline du nord qu’ils quittent après la mort de Grand P’pa et un passage éclair chez Tante Gastonia et New-York, prend très vite l’allure et le rythme d’un road movie, que la langue d’un enfant d’une dizaine d’années relate avec ses déformations, ses raccourcis. Pic s’émerveille de ce grand frère prêt à lui faire découvrir la très grande ville, New-York, sa petite amie Sheila.

L’Enfant de la fièvre, Shelby Foote

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 19 Octobre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles, Gallimard

L’Enfant de la fièvre (Jordan County), traduit de l’américain par Maurice Coindreau et Claude Richard, 361 p. 10 € . Ecrivain(s): Shelby Foote Edition: Gallimard

 

Dans ces nouvelles de Shelby Foote – autant de pépites – on trouve deux textes qui constituent de véritables courts romans : Crescendo final et L’enfant de la Fièvre (qui donne son titre à ce recueil). Autant le dire dès l’abord, on a en mains d’authentiques joyaux littéraires, qui viennent se placer au plus haut dans la littérature sudiste.

Avec Crescendo final, on retrouve le Sud pauvre et douloureux de « tourbillon »*. Comme il le fait souvent, Foote commence par ce qui est fréquemment la fin chez d’autres auteurs. Il décale ainsi toutes les interrogations du lecteur sur ce qui, chez les personnages, surdétermine les actes et les destinées. Le pauvre héros attend dans le couloir de la mort son exécution. Le récit sera donc la trajectoire qui l’a mené là, le destin inexorable dans lequel rien n’aura pu le sauver. Ni son talent, ni son succès, ni l’amour inquiet de sa mère.

L’Incendie de la Maison de George Orwell, Andrew Ervin

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 17 Octobre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Joelle Losfeld

L’Incendie de la Maison de George Orwell, trad. anglais (USA) Marc Weitzmann, janvier 2016, 248 pages, 22 € . Ecrivain(s): Andrew Ervin Edition: Joelle Losfeld

 

Andrew Ervin (1971) a eu une activité de critique avant de publier quelques nouvelles dans diverses publications et L’Incendie de la Maison de George Orwell, son premier roman, en 2015, roman dont Gallimard a aussitôt acquis les droits de traduction, générant ainsi une relative attente : que contient donc de si crucial ce roman américain pour qu’il génère de la sorte l’envie d’un éditeur francophone ? Il contient en germe deux grands romans, dont malheureusement aucun des deux n’est vraiment abouti, malgré des passages excellents d’une très grande justesse.

L’Incendie de la Maison de George Orwell, c’est l’histoire de Ray Welter, publicitaire génial parti de Chicago pour s’installer sur l’île de Jura, dans les Hébrides. Plus précisément, il désire occuper Barnhill, la maison où Eric Blair, mieux connu sous son nom de plume, George Orwell, écrivit son ultime roman et son grand chef-d’œuvre, 1984. Ce roman obsède Welter au point qu’au détour d’une crise existentielle et professionnelle à la fois (il a réussi à faire vendre des véhicules 4X4 en créant de toutes pièces un faux mouvement protestataire, et cela l’incite à se poser des questions, d’autant que son père meurt dans l’explosion d’une usine ; accessoirement, il divorce), il décide donc de vivre là où Orwell l’a écrit.

Parmi les loups et les bandits, Atticus Lish (2ème critique)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mardi, 10 Octobre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Buchet-Chastel

Parmi les loups et les bandits, trad. anglais (USA) Céline Leroy, 558 pages, 24 € . Ecrivain(s): Atticus Lish Edition: Buchet-Chastel

 

Cinq cents pages d’histoire portée par une écriture ; toute la littérature est là.

Très peu de livres, si peu, vous happent et vous font vivre – longtemps après, définitivement souvent, dans cet entre-deux de surprises, d’émotion abyssale, de suffocation, au point que s’endormir avec le bouquin tient à la fois de l’addiction et de l’épreuve. Ce sont des œuvres qu’on peut classer « uniques », destinées à vous poursuivre. On pourrait chacun en citer un, de ces livres particuliers ; prenez Les bienveillantes de Jonathan Littell. Dans ce cas, comme dans  ce livre-ci, l’auteur est peu ou carrément inconnu, débarqué avec son histoire dont on suppose, avant même de lire, qu’elle pèsera son poids dans l’importance qu’on accordera à l’œuvre. Ainsi d’Atticus Lish, ancien ouvrier, saisonnier, déménageur, connaisseur de bas-fonds, ça va de soi, et ancien Marine, qui plus est. Un auteur qui en soi est un roman ; un roman qui en soi est une vie. Premier roman, que Parmi les loups et les bandits qui reçut le prestigieux prix Pen/Faulkner Award. Une écriture – essentiel atout – qui sans doute peut fabriquer autant de contempteurs que d’adorateurs. Façon Lish qui prend aux tripes ; respiration saccadée, amplifiée par les bruits d’une ville de roman d’anticipation, comme des images de David Lynch :

Le donjon, Jennifer Egan

Ecrit par Anne Morin , le Mardi, 03 Octobre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Points

Le donjon, trad. anglais (USA) Sylvie Schneiter, 299 pages, 7,50 € . Ecrivain(s): Jennifer Egan Edition: Points

 

Monde réel et monde virtuel, jeux de pouvoir et de rôles, rivalités et complicités, liberté et enfermement s’affrontent, s’opposent et se conjuguent dans cet étonnant roman. Et, insidieusement, on s’y laisse prendre, on se laisse envoûter par les changements de rythme, d’époque, de situation des personnages :

« Ils étaient parvenus à un mur constitué de cyprès. Grand et solide, sans doute lisse autrefois, il ressemblait désormais à un énorme coussin d’où s’échappait le rembourrage. Danny se faufila derrière Howard dans une brèche visiblement creusée depuis peu et, une fois de l’autre côté, le soleil lui chauffa le visage. Il se tenait dans une clairière dallée d’un marbre maculé de taches (…) Danny ne sentit pas aussitôt la puanteur, puis elle l’assaillit : l’odeur de quelque chose enfoui sous terre, émergeant à l’air libre, chargée de métal, de protéines et de sang » (p.58).