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La Une Livres

Chat sauvage en chute libre, Mudrooroo

Ecrit par Yann Suty , le Samedi, 09 Mars 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Océanie, Asphalte éditions

Chat sauvage en chute libre (Wild cat falling), traduit de l’anglais (Australie) par Christian Séruzier, 172 p. 16 € . Ecrivain(s): Mudrooroo Edition: Asphalte éditions

 

Un livre comme un mouvement circulaire. Le début sera la fin. La fin sera un nouveau début. Il n’y a aucun suspense. On sait déjà comment l’histoire va se terminer, comment elle ne peut que se terminer. La « chute libre » du titre français l’indique. Une fois qu’on est tombé, on ne peut plus se rattraper.

Et celui qui ne se rattrapera pas – ce chat sauvage – n’a pas de nom. Ou c’est l’auteur du livre, Mudrooroo. Il a dix-neuf ans, il sort de prison après y avoir passé dix-huit mois. Il sort de prison et il sait qu’il va y retourner. Il va y retourner parce qu’il ne peut qu’y retourner. Pourquoi ? Parce qu’il vit dans l’Australie des années 60 et qu’il est aborigène. Même s’il ne l’est qu’en partie, il est quarteron, le fruit d’une métisse et d’un blanc. Mais il est trop foncé, trop « sauvage », pour un pays qui n’a pas encore réussi à exorciser ses démons, à assumer ses origines sanguinaires, à faire la paix avec sa conscience tout autant qu’avec une population qui a été exterminée pour que des colons blancs puissent prendre leur place.

Les occupations, Côme Martin-Karl

Ecrit par Stéphane Bret , le Samedi, 09 Mars 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Jean-Claude Lattès

Les occupations, février 2013, 208 pages, 17 € . Ecrivain(s): Côme Martin-Karl Edition: Jean-Claude Lattès

 

 

Les conduites de nos ancêtres pèsent-elles sur nos vies et nos actes quotidiens ? Peut-on les corriger a posteriori ? C’est à cette question d’une actualité quasi permanente que se consacre Côme Martin-Karl dans son premier roman Les occupations. L’auteur joue d’entrée sur le caractère polysémique du mot occupation. Celui-ci désigne une activité, et aussi une période sombre de notre histoire nationale. Dans la langue anglaise, il signifie « profession ».

Deux personnages charpentent le roman : Marcel Miquelon, qui est un gratte-papier subalterne au service de la Propagandastaffel durant l’Occupation. Il est chargé de lire tout ce qui paraît, de le faire reformuler par les candidats à la publication, ou de prescrire purement et simplement l’interdiction des œuvres incriminées.

Hideyoshi seigneur singe, Shiba Ryôtarô

Ecrit par Victoire NGuyen , le Vendredi, 08 Mars 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Japon, Philippe Picquier

Hideyoshi seigneur singe, traduit du japonais par Yoko Kawada, Sim et Sylvain Chupin, Collection Picquier Poche, 814 p. 12,20 € . Ecrivain(s): Shiba Ryôtarô Edition: Philippe Picquier

 

C’était de la comédie

 

Il est indéniable que Shiba Ryôtarô livre ici une œuvre littéraire de très haute facture. L’épaisseur du roman ne doit pas dérouter le lecteur car l’auteur conjugue à merveille l’érudition et le roman d’aventures. En effet, Hideyoshi seigneur singe n’est pas seulement un roman biographique retraçant la vie et l’œuvre politique de l’un des trois plus grands daimyôs que le Japon ait connu. Il est aussi un roman d’aventures car le lecteur suit Nobunaga, le maître de Hideyoshi et Hideyoshi lui-même dans nombre de batailles. La description est un des genres dominants dans ce roman. Elle est tour à tour épique et tragique lorsqu’elle décrit par exemple la mort de Nobunaga. L’alternance de ces deux tonalités donne de la vigueur et de la force au récit l’apparentant soit aux chansons de geste occidentales soit aux dits chers à la littérature japonaise. En effet, certains passages ramènent le lecteur vers des chapitres du Dit du Genji.

Nouvelles calédoniennes, collectif, Vents d'ailleurs

Ecrit par Cathy Garcia , le Vendredi, 08 Mars 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Nouvelles, Vents d'ailleurs

Nouvelles calédoniennes, Vents d’ailleurs/Ici & Ailleurs, 2012, 128 pages, 14,20 € Edition: Vents d'ailleurs

 

Sept auteurs, sept nouvelles, comme les sept notes de musique pour la richesse d’une mélodie, sept couleurs pour peindre l’arc-en-ciel d’une terre, celle de Nouvelle-Calédonie, terre de contraste, de métissage comme de conflits, terre d’ancêtres pour les uns, d’enracinement ou de passage pour d’autres. Sept nouvelles aussi différentes que les origines de leurs auteurs, et pourtant une terre, une seule, qui devient le lien, le creuset où se mélangent culture, rêves et parcours de chacun.

Sept nouvelles où souvenirs et fiction s’entremêlent pour tisser comme un manou, ce morceau d’étoffe à la fois utile et symbolique dans la coutume Kanak. Les Kanaks qui, ne l’oublions pas, sont le premier peuple de cette terre et on retrouvera leur souffle dans la majeure partie des nouvelles du livre, même si les auteurs sont d’origines diverses : kanak pour Waej Génin-Juni et Denis Pourawa, métisse pour Noëlla Poemate, néo-calédoniens de naissance comme Frédéric Ohlen et descendant de familles migrantes installées là depuis le XIXe siècle comme Nicolas Kurtovitch, mais aussi Française de Belfort comme Claudine Jacques, ayant pris racine là-bas à l’adolescence ou encore Bretonne partie vivre là-bas en 1989, comme Anne Bihan.

Ce qui est arrivé à M. Davison, Jon McGregor

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 07 Mars 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Iles britanniques, Nouvelles, Christian Bourgois

Ce qui est arrivé à M. Davison. Trad. Anglais Christine Laferrière février 2013. 295 p. 17 € . Ecrivain(s): Jon McGregor Edition: Christian Bourgois

 

Jon McGregor est définitivement de la lignée des écrivains qui se coltinent avec la langue même, la matière de l’expression. Les nouvelles qu’il nous offre dans ce recueil constituent une sorte de laboratoire d’écriture nouvelliste. Aucun des textes ne ressemble à un autre par la forme : phrases brisées, répétitions, inventaires, documents administratifs ou techniques, et même listes de noms propres, tout y passe comme dans une sorte d’exploration des canons de l’écriture. Dans la deuxième nouvelle, on a même un brouillon de poème, celui qu’est en train d’écrire l’héroïne de l’histoire : page de gauche la nouvelle et son déroulé, page de droite le poème de la femme en « work in progress »

 

« Quand vient l’aurore

Quand la première lueur pénètre depuis l’est

Le ciel est de la couleur des billes.

D’un gris médiocre et vitreux » (En hiver le ciel)