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Spinoza, Œuvres complètes. La Pléiade Gallimard (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 13 Décembre 2022. , dans En Vitrine, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, La Pléiade Gallimard, Cette semaine

Spinoza, Œuvres complètes. Dirigé par Bernard Pautrat. 1952 pages. La Pléiade. 76 € jusqu’au 31/12/2022 puis 82 €. Edition: La Pléiade Gallimard

 

L’œuvre de Spinoza était déjà disponible en Pléiade depuis 1955. Mais la traduction d’alors sentait bien trop l’académisme rigide des universitaires du temps, les canons d’une lecture rigoriste de l’original et surtout l’usage d’une langue très marquée par le jargon philosophique.  Avec cette édition, nous pouvons dire que Spinoza entre, si ce n’est dans La Pléiade, du moins dans le XXIème siècle, et de plain-pied ! La fluidité, la précision, souvent même la poésie de l’écrit spinozien sont ici servis avec un talent réjouissant. Oubliés les erreurs de traduction, les maladresses et contre-sens et surtout oublié l’appareil critique de 1955 qui accumulait les commentaires approximatifs et les erreurs d’interprétation. Spinoza, entier, vibrant de toute la puissance de sa pensée, de toute la séduction de son style. Bernard Pautrat et son équipe ont fait de la belle et bonne ouvrage, les spinoziens et les néophytes peuvent se réjouir. Ils trouveront ici un texte traduit avec grande rigueur et sobriété et dans une langue française clairement abordable pour tout lecteur ayant un peu de culture philosophique, loin de toute érudition inutile et pesante. Bernard Pautrat, le maître d’œuvre de cette traduction, dit :

Monnaie de singe (Soldiers’ Pay), William Faulkner (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 06 Décembre 2022. , dans En Vitrine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, Cette semaine, Garnier-Flammarion

Monnaie de singe (Soldiers’ Pay, 1926), trad. américain, Maxime Gaucher, 368 pages, 8,50 € . Ecrivain(s): William Faulkner Edition: Garnier-Flammarion

 

Le premier roman de Faulkner laisse voir quelques défauts de ceux que l’on peut trouver dans tout premier roman, mais il montre surtout, en gestation flagrante, la puissance de l’œuvre à venir. Tous les thèmes récurrents du maître du Mississippi apparaissent en éclats aveuglants (sans jeu de mots, la cécité est un des thèmes du livre) tout au long de ce roman.

Comme L’Adieu aux armes d’Hemingway, publié dans la même année 1926, il met en scène la « génération perdue », celle des Américains qui ont combattu pendant la Première Guerre mondiale. Mais à la différence d’Hemingway, Faulkner situe son roman dans l’après-guerre, le « retour à la maison » des soldats. L’art du portrait chez Faulkner fait le reste : ses personnages montrent une complexité, des déchirures intimes bien plus élaborées que les « super-héros » d’Hemingway, toujours assez caricaturaux dans l’héroïsme mâle. Certains personnages de ce roman se rapprochent de cet archétype – l’infâme Januarius Jones et le caricatural George Farr, par exemple – mais certains d’entre eux sont clairement plus complexes et intéressants.

Au-dessous du volcan, Malcolm Lowry (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 30 Novembre 2022. , dans En Vitrine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, Folio (Gallimard), Cette semaine

Au-dessous du volcan, Malcolm Lowry, 594 pages, 10,60 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Il serait pour le moins présomptueux, et probablement ridicule, de prétendre apprendre quoi que ce soit aux « initiés » à l’occasion de la réédition en Poche chez Gallimard de cette œuvre monumentale, magistralement traduite de l’anglais par Stephen Spriel avec la collaboration de Clarisse Francillon et de l’auteur lui-même. Cette présentation ne s’adresse donc qu’aux lecteurs de notre magazine qui n’auraient pas eu encore l’inappréciable loisir de vivre l’expérience inoubliable que constitue cette journée à passer « au-dessous du volcan ».

L’exercice est d’ailleurs rendu particulièrement ingrat par le fait que le texte de la présente édition est encadré par une préface lumineuse de Maurice Nadeau et, en postface, par une analyse précise et érudite de Max-Pol Fouchet. Si on y ajoute cette autre préface rédigée en 1948 par Malcolm Lowry lui-même, il ne reste guère d’espace critique à un modeste rédacteur de chroniques littéraires, qui se trouvera contraint, au milieu de quelques modestes commentaires personnels, de reprendre entre guillemets convenus et convenables quelques particules élémentaires des décryptages brillamment opérés par Nadeau et Fouchet, et une phrase ou deux de la présentation de l’ouvrage par l’auteur.

Le Palais de glace, Tarjei Vesaas (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 29 Novembre 2022. , dans En Vitrine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays nordiques, Roman, Babel (Actes Sud), Cette semaine

Le Palais de glace, Tarjei Vesaas, Actes Sud Babel, 2016, trad. norvégien, Jean-Baptiste Coursaud, 219 pages, 7,70 € . Ecrivain(s): Tarjei Vesaas

 

Roman poétique, poésie romanesque, Tarjei Vesaas nous offre un modèle du genre tant l’histoire racontée est attachante et forte et la langue d’une beauté à la fois éthérée et puissante. La bulle de glace qui se forme à la tête de la cascade, créant une authentique demeure naturelle de cristal, une protubérance creuse à l’intérieur, dans laquelle pénètre à flots une lumière diffractée, étincelante, le « palais de glace », est un phénomène qui ne se produit que certaines années particulièrement froides et, cette année-là, le froid dépasse de loin les normes. Le Froid, dieu génial et terrifiant qui tient dans ses mains les habitants de ce village perdu au nord de la Norvège, et qui, en cet automne glacé, remodèle leur monde, le rend sublime et mortellement dangereux. La glace, en se formant et s’épaississant sur le lac voisin, gémit et résonne, accompagnant en particulier les nuits de détonations sourdes et inquiétantes. Les nuits, très précoces en cette période, noires et angoissantes, pleines de menaces diffuses et oppressantes.

La Cloche de détresse (The Bell Jar, 1963), Sylvia Plath (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 22 Novembre 2022. , dans En Vitrine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, Gallimard, Cette semaine

La Cloche de détresse (The Bell Jar, 1963), Sylvia Plath, Gallimard, L’Imaginaire, 1988, trad. américain, Michel Persitz, 267 pages, 10,80 € . Ecrivain(s): Sylvia PLATH Edition: Gallimard

 

Cet ouvrage de la grande Sylvia Plath est ce qu’il est convenu d’appeler un roman-culte, au même titre que l’est L’Attrape-cœurs de J. D. Salinger, écrit une dizaine d’années auparavant. De nombreux éléments relient ces deux livres : ce sont les uniques romans de leur auteur, ce sont des autobiographies à peine déguisées, ce sont des séjours de leurs héros à New York et, nous y reviendrons, les correspondances dans les postures énonciatives sont fortes.

On peut y ajouter que, comme pour l’ouvrage de Salinger, on peut être déçu, du moins par le début du récit : les mésaventures d’une jeune fille fragile de province dans les milieux mondains de Manhattan, ses amourettes, ses crises de larmes, ses brefs enthousiasmes pour des broutilles, occupent une première moitié du livre et sont plutôt ennuyeux.