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Cette semaine

Stupeur, Zeruya Shalev (par Mona) 1ère partie

Ecrit par Mona , le Mercredi, 13 Mars 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard, En Vitrine, Israël

Stupeur, Zeruya Shalev, Gallimard, juin 2023, trad. hébreu, Laurence Sendrowicz, 364 pages, 23,50 € . Ecrivain(s): Zeruya Shalev Edition: Gallimard

 

Stupeur, le titre du dernier roman de l’écrivaine israélienne Zeruya Shalev, publié quelques mois avant les attaques du 7 octobre, résonne involontairement avec l’actualité tragique. Son sixième livre traduit en français, l’un de ses plus denses, fruit d’un travail de six années, met en scène deux femmes de deux générations différentes, à l’idéologie et au caractère opposés, victimes de non-dits familiaux. Dans un précédent roman, Douleur, inspiré d’un attentat-suicide dont elle avait été victime à Jérusalem, l’auteure traitait déjà d’un passé douloureux venant hanter les protagonistes.

Atara, jeune femme moderne et sans tabous, se trouve frappée de stupeur quand sur son lit de mort, son père, Menahem dit Mano, l’appelle d’un prénom inconnu, Rachel, et lui fait une déclaration d’amour inspirée du Cantique des Cantiques.

Professeur Unrat (L’Ange bleu), Heinrich Mann (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 12 Mars 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Roman, Grasset, En Vitrine

Professeur Unrat (L’Ange bleu), Heinrich Mann, Grasset, Coll. Les Cahiers Rouges, trad. allemand, Charles Wolff, trad. revue, corrigée, Olivier Mannoni, 283 pages, 9,60 € Edition: Grasset

 

Quarante ans après avoir pris place dans la Collection Les Cahiers Rouges de chez Grasset, le roman d’Heinrich Mann, paru initialement en 1905 (oui !) sous le titre Professor Unrat oder Das Ende eines Tyrannen, qu’on peut (qu’on doit) (re)découvrir en cette version sortie en novembre 2023 dans la même collection, n’a rien perdu de sa puissance expressionniste.

Les portraits du professeur Unrat, de ses trois étudiants, et de la chanteuse Lola Frölich sont toujours de ceux qui restent indécrochables dans la galerie mémorielle du lecteur parmi ceux des personnages littéraires qu’il a fréquentés.

« Comme son nom était Raat, tout l’établissement l’appelait Unrat, ‘le fumier’. Rien de plus simple ni de plus naturel ».

Treize histoires (These Thirteen), William Faulkner (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 06 Mars 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Nouvelles, Folio (Gallimard), En Vitrine

Treize histoires (These Thirteen), William Faulkner, Folio . Ecrivain(s): William Faulkner Edition: Folio (Gallimard)

 

Lire quelques pages de Faulkner amène chaque fois à se demander pourquoi on lit d’autres auteurs. Faulkner a épuisé les possibilités de la fiction en prose, non par la sophistication du style ou des champs lexicaux rares, mais par un phénomène presque purement optique. Panoptique peut-on dire, tant son monde est le fruit d’un regard absolu, totalisant, sur les personnages et les lieux qu’ils peuplent. L’auteur regarde ce qu’il crée, il est spectateur des gens, des situations, et il en rend compte. Rien de ce qu’il invente ne lui appartient, il le met juste à la disposition du lecteur, qu’il investit du pouvoir – redoutable – de comprendre. On est aux antipodes de la fiction romanesque française, voire européenne où l’auteur raconte, explique, conclut. C’est là toute la « difficulté » de lire Faulkner : il faut prendre le temps pour comprendre, ne pas tendre en permanence vers le moment de conclure. Laisser vivre les personnages, les suivre, les voir, les écouter parler, sans chercher sans cesse où ils vont, ce qu’ils font, pourquoi ils le font. Le sens viendra à qui sait attendre pour entendre.

A propos de Freud, une vie, Peter Gay (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 28 Février 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Fayard, En Vitrine

A propos de Freud, une vie, Peter Gay, Fayard, trad. anglais, Catherine David, 900 pages, 42 € Edition: Fayard

 

La grandeur incomparable de cette « biographie » de Freud tient essentiellement à la rupture des codes établis du genre. La vie de Freud, ses actes et moments, sa famille, son intimité, ne constituent pas, loin s’en faut, la matière de ce livre. Le choix de Peter Gay est de suivre, avec obstination et rigueur, la trace du développement de la pensée de Freud, celle qui mène à la naissance et au développement de la psychanalyse jusqu’à la mort de son créateur. Si des éléments de la vie personnelle de Freud sont évidemment souvent mentionnés, ce n’est qu’en interaction avec son travail et sa pensée théorique. Si « biographie » il y a, c’est celle de la psychanalyse, pas celle de Sigmund-Sigismund-Schlomo-Siggy. C’est assurément en cela que cet ouvrage est précieux, unique. Des biographies de Sigmund, on en connaît de nombreuses, à commencer par celle de Ernest Jones*, le monument historique érigé au maître par l’un de ses disciples. Citons aussi celle de Stefan Zweig*, son ami. Plus récemment, il faut mentionner l’excellent travail d’Elisabeth Roudinesco*.

Les Trois Mousquetaires, Alexandre Dumas (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 27 Février 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard), En Vitrine

Les Trois Mousquetaires, Alexandre Dumas, Folio, édition de Gilbert Sigaux, I. D’Artagnan, mars 2023, 560 pages, 7,50 € ; II. Milady, novembre 2023, 560 pages, 7,50 € . Ecrivain(s): Alexandre Dumas Edition: Folio (Gallimard)

L’adaptation cinématographique récente des Trois Mousquetaires par Martin Bourboulon est une catastrophe, tant au point de vue du casting (Eva Green, brune, en Milady, dont la blondeur est vantée à longueur de roman ; des mousquetaires cinquantenaires, un D’Artagnan trentenaire) que du jeu des acteurs (Lyna Khoudri en Constance Bonacieux est fade au possible, et Louis Garrel joue un Louis XIII plus névrosé que nature), et ne parlons pas des scènes de combat hyperboliques (on croit visionner des scènes inédites du Pacte des loups), ou des arrangements pris avec l’histoire narrée par Dumas, entre autres par l’ajout de détails parfois sidérants (D’Artagnan enterré vivant dès les premières scènes – il y a confusion avec l’œuvre de Poe ou Radcliffe). Le seul intérêt qu’elle présente est la réédition en deux tomes des Trois Mousquetaires et donc l’opportunité offerte par l’actualité éditoriale de se replonger dans les aventures de D’Artagnan, Athos, Porthos, et Aramis – mais notons quand même un bémol, d’importance : cette réédition en deux tomes coûte quinze euros contre huit euros pour le même roman en un seul tome chez le même éditeur ; un soupçon d’arnaque à destination d’un public craignant un seul volume fort de onze cents pages ? D’autant que la belle préface de Roger Nimier a désormais disparu.