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Cette semaine

Quand le fleuve gronde, Borden Deal (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mercredi, 10 Juillet 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, Belfond, En Vitrine

Quand le fleuve gronde, Borden Deal, éditions Belfond, juin 2024, trad. Charles B. Mertens, 720 pages, 17 € Edition: Belfond

 

Histoire du Tennessee

Quand le fleuve gronde, chef-d’œuvre de Borden Deal (né à Pontotoc dans le Mississippi, en 1922 et mort à Sarasota en Floride en 1985, auteur de vingt et un romans et de plus d’une centaine de nouvelles), narre un épisode de l’histoire du sud des États-Unis des années 1930-1940 – une description géographique, sociologique et poétique du Tennessee, inspirée de faits réels. Le Tennessee est réputé grâce à Memphis, la capitale du rock et Nashville, capitale de la musique country. Le Tennessee a aussi d’énormes ressources minières (charbon, fer, etc.) et possède un taux de croissance hors norme (environ 4% par an) pour un État situé dans le centre des États-Unis.

Le grand écrivain donne à découvrir « un coin de terre bien défini parmi toutes les autres terres, un coin qui porte le nom de David Dunbar, un Indien blanc qui n’était ni cherokee ni chickamauga mais chickasaw ». La famille Dunbar est composée du vieux père invalide, de Matthew fils, veuf, d’Arlis, Knox, Rice, Miss Hattie et Jesse John, marié à Connie.

Œuvres complètes, Charles Baudelaire en La Pléiade (par Laurent Fassin)

Ecrit par Laurent Fassin , le Mercredi, 26 Juin 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, En Vitrine, La Pléiade Gallimard

Œuvres complètes, Charles Baudelaire, Bibliothèque La Pléiade, Gallimard, mai 2024 (Coffret illustré 2 volumes + 1 album 209 illustrations), 1760 pages, 75 € chacun. . Ecrivain(s): Charles Baudelaire Edition: La Pléiade Gallimard

 

« Ce qui est créé par l’esprit est plus vivant que la matière » (1), soutenait Charles Baudelaire (1821-1867). La nouvelle édition de ses Œuvres complètes montre à quel point cette pensée l’obsédait. Autant le souligner dès à présent : les deux volumes préfacés par Antoine Compagnon et publiés sous la direction d’André Guyaux et Andrea Schellino, feront date. Ces derniers innovent en renonçant au partage dans l’œuvre entre poésie et critique. Le sommaire chronologique, qui fait toute la valeur de leur entreprise, conduit à suivre, étape après étape, le cheminement de l’écrivain. Grâce au parti qu’ils ont adopté, nous voyons peu à peu s’affirmer le critique, puis l’artiste ; assistons à l’avancée de son projet ; relevons, au terme d’une exploration captivante, la cohérence d’ensemble de sa démarche.

Ce travail monumental est l’occasion de rappeler que Baudelaire fut retenu, en 1931, pour inaugurer la prestigieuse Bibliothèque de la Pléiade – un choix qui à l’époque n’avait rien d’évident.

Les Raisins de la colère, John Steinbeck (Nelle traduction) (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 25 Juin 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, Folio (Gallimard), En Vitrine

Les Raisins de la colère, John Steinbeck, Folio, mars 2024, nouvelle trad. anglais (Etats-Unis) Charles Recoursé, 672 pages, 11 € . Ecrivain(s): John Steinbeck Edition: Folio (Gallimard)

 

« Le peuple fuit en laissant l’horreur derrière lui ; des choses étranges lui arrivent, certaines cruelles et amères, d’autres si belles qu’elles ravivent à jamais sa foi ». Parmi ces « belles » choses, une en particulier, « ce qu’il faut bombarder » proclame Steinbeck en s’adressant à ceux qui possèdent « les choses dont les autres manquent » : « le commencement : de “je” à “nous” ». Ce pourrait être, proposée à la fin du chapitre XIV des Raisins de la colère, la morale politique d’un roman qui dépiaute le rêve américain comme peu, le montrant tel un épouvantail cauchemardesque en cette fin des années trente où les tracteurs ont chassé les métayers du Midwest vers une Californie fantasmée et vendue en de mensongers prospectus. Un appel à l’altruisme, pas seulement syndicaliste, mais aussi chrétien – dans un roman où pourtant un pasteur, Casy, prétend ne plus être capable de prier ou prêcher, seulement d’écouter désormais.

Agonie d’Agapè (Agapè Agape), William Gaddis (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 20 Juin 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, En Vitrine

Agonie d’Agapè (Agapè Agape), William Gaddis, 2002, Editions Motifs, trad. américain, Claro, 95 pages

 

Il s’agit aussi bien d’agoniser que d’agonir. Agonie d’un homme qui se sent – et veut – quitter ce monde qu’il abhorre tel qu’il le voir devenir et qu’il agonit d’imprécations aussi douloureuses qu’amères. Un flux de conscience poussé à son extrême constitue ce texte – roman nous ne dirons pas, même si le personnage est romanesque à souhait – comme il constitue un chapitre chez Thomas Bernhard dans ses diatribes de Perturbation. Il serait difficile de ne pas évoquer ce dernier et cependant Gaddis a l’amertume plus intime, plus humaine, plus collée à la noblesse de l’âme.

Et puis, page après page, on se laisse porter par quelque chose qui n’est plus le signifié, une prosodie, une mélopée, une aventure stylistique plus proche de l’Ulysse – presque de Finnegan’s Wake – de Joyce. C’est de ce côté que Gaddis regarde, le primat absolu du verbe, le dire plus que le dit. L’allusion à Joyce est même clairement énoncée. Parfois. Par des phrases scandées par des absences, des vides, des suspens.

Le Journal d’une femme de chambre, Octave Mirbeau (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 18 Juin 2024. , dans Cette semaine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard), En Vitrine

Le Journal d’une femme de chambre, Octave Mirbeau, Folio, février 2024, édition de Noël Arnaud, révisée par Michel Delon, 592 pages, 8,30 € Edition: Folio (Gallimard)

 

« D’ailleurs, j’avertis charitablement les personnes qui me liront que mon intention, en écrivant ce journal, est de n’employer aucune réticence, pas plus vis-à-vis de moi-même que vis-à-vis des autres. J’entends y mettre au contraire toute la franchise qui est en moi et, quand il le faudra, toute la brutalité qui est dans la vie. Ce n’est pas de ma faute si les âmes, dont on arrache les voiles et qu’on montre à nu, exhalent une si forte odeur de pourriture ».

Célestine prévient d’emblée, dès la première entrée du Journal d’une femme de chambre, que ce qu’elle propose au lecteur sera peu reluisant, sera un portrait sans fards de la bourgeoisie au service de laquelle elle a été, et pourtant la critique fut scandalisée lors de la publication de ce roman d’Octave Mirbeau en 1900.