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Le Diable dans le Beffroi (Nouvelles histoires extraordinaires, 1839), Edgar Poe (par Mona)

Ecrit par Mona , le Vendredi, 12 Mai 2023. , dans USA, Les Chroniques, La Une CED

 

Edgar Poe, précurseur du nonsense

Le Diable dans le beffroi, une nouvelle de huit pages, traduite par Baudelaire, a inspiré des artistes aussi divers que Debussy et Adriano Lualdi qui en ont fait un opéra et James Ensor, un tableau. L’intrigue insensée conte l’histoire d’un petit bourg hollandais où les villageois semblent ne s’occuper que d’horloges et de choux jusqu’à l’arrivée brutale d’un trouble-fête diabolique qui perturbe l’heure de la choucroute. L’intrus dont le portrait emprunte quelques traits à la caricature antisémite du Juif (« Il avait la face d’un noir de tabac, un long nez crochu, des yeux comme des pois, une grande bouche et une magnifique rangée de dents qu’il semblait jaloux de montrer en ricanant d’une oreille à l’autre »), pénètre dans le beffroi du village, affole les pendules en frappant de son violon « cinq fois plus grand que lui » le gardien de l’horloge et sème la zizanie pour son bon plaisir.

Woman hating, De la misogynie, Andrea Dworkin (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 12 Mai 2023. , dans USA, Les Livres, Recensions, Essais, La Une Livres, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Woman hating, De la misogynie, Andrea Dworkin, éditions Des femmes Antoinette Fouque, mars 2023, trad. anglais (USA), Camille Chaplain, Harmony Devillard, 256 pages, 18 € Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Perturber le genre

Andrea Dworkin, issue d’une famille de rescapés de la Shoah, née le 26 septembre 1946 à Camden, morte le 9 avril 2005 à Washington, est une essayiste et théoricienne américaine du féminisme radical. Dans cet essai très argumenté, elle dénonce la doxa qui repose sur un ensemble disparate d’opinions confuses, de préjugés, de présuppositions sur les femmes.

L’essayiste remonte aux origines de ces constructions négatives à travers mythes, fables et contes, et déconstruit, défait leur structure et leur imprégnation dans la culture, l’éducation et l’histoire, ainsi que leur influence (nocive) : « On veut situer l’instant précis où la fiction pénètre la psyché comme réalité, et où l’histoire commence à en devenir le reflet ; ou vice versa. Nonobstant, les contes véhiculent une représentation binaire et dichotomique des femmes et des hommes : la bonne jeune fille pure, incapable de se défendre (Cendrillon) ou mariée à un monstre (La Barbe-Bleue), prisonnière, et la marâtre cruelle, jalouse et criminelle.

Le Corsaire Rouge, James Fenimore Cooper (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 07 Avril 2023. , dans USA, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

Le Corsaire Rouge, James Fenimore Cooper, Gallimard, Folio Classique, juin 2021, trad. anglais, Auguste-Jean-Baptiste Defauconpret, 690 pages, 11,50 € Edition: Folio (Gallimard)

Présentée, préfacée et commentée par Philippe Jaworski, cette édition, magnifiquement servie par la traduction, dans un français d’une magistrale pureté classique, de Defauconpret de Thulus, permet à tout lecteur, au prix modeste du format Poche, d’embarquer pour une odyssée marine prodigieuse et conséquemment inoubliable.

L’action commence en 1759, précisément le jour où les habitants du lieu, fidèles sujets de la monarchie anglaise, célèbrent la victoire de l’Angleterre sur la France, laquelle perdait là ses colonies américaines et canadiennes, à Newport, alors petit port de Rhode Island, où mouillent deux navires, le Dauphin et la Royale Caroline, dont la présence, la nature, l’équipage, les qualités opératives, l’élégance, la provenance, la destination, l’activité hypothétique constituent, ponctués d’allusions répétées sur les faits et gestes d’un pirate quasi légendaire qui sillonne et écume l’océan en accumulant prises, massacres et autres forfaits, le sujet principal des conversations qui se nouent sur terre, à l’occasion récurrente de rencontres aux circonstances provoquées ou semblant relever du hasard, entre des personnages qui vont et viennent, en un chassé-croisé dont l’intrigante durée narrative suscite une attente croissante d’il ne sait quoi chez le lecteur littéralement (littérairement) captivé.

Profession fripouille, Mémoires, George Sanders (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 06 Avril 2023. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, Séguier

Profession fripouille, Mémoires, George Sanders, Séguier Editions, janvier 2023, trad. anglais, Romain Slocombe, 288 pages, 20 € Edition: Séguier

 

« L’un des plus grands héros de mon enfance, mon oncle Jack, se livrait avec une joie obstinée à l’un de ses passe-temps favoris. Depuis son immense lit sculpté, un pistolet de calibre 22 dans sa main tremblante de lendemain de cuite, il tirait sur les mouches rassemblées qui se régalaient de la confiture dont il avait barbouillé le plafond ».

Ces mémoires piquantes de l’un des grands acteurs américains restaient introuvables dans l’édition française, ou alors à des prix que la courtoisie littéraire nous empêche de relever. On devait la première édition à Roland Jaccard pour sa Collection Perspectives Critiques aux PUF, c’était en 2004. Cette nonchalance, ce style, cette attitude d’élégant dédain (1) du comédien aux cent dix films, dont quelques pépites et de nombreux navets ne laissèrent pas indifférent Roland Jaccard, grand admirateur de Louise Brooks et ami de Cioran. Depuis Roland Jaccard, comme quelques années plutôt George Sanders, a mis fin à ses jours, à ses livres et à ses chroniques, même si quelques amis inconnus continuent à le lire et à relire, souvenirs de temps anciens, que certains diraient perdus !

Les Gardiens de la maison, Shirley Ann Grau (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Vendredi, 31 Mars 2023. , dans USA, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Les Gardiens de la maison, Shirley Ann Grau, Belfond, Coll. Vintage, mars 2023, trad. anglais, Colette-Marie Huet, 429 pages, 14 €


La Collection Vintage de Belfond publie des pépites oubliées, ainsi de ce prix Pulitzer 1965, qui rejoint haut dans la liste les chefs d’œuvre du « Deep South ». Qui croit encore que la littérature sudiste se limite à quelques pages éternelles d’Autant en emporte le vent, avec en fond d’écran, les personnages de Flannery O’Connor ? D’excellents livres peignent les États du sud, de la guerre de Sécession, à la période de lutte pour les Droits civiques, en passant par la Grande Dépression. Toujours les mêmes thèmes, le racisme, la terre, la chaleur, le coton. Souvent, de forts personnages, parfois, des enfants (Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, de Harper Lee). Le livre de Shirley Grau s’inscrit dans cette lignée de haute qualité – l’écriture est superbe, et c’est un pur bonheur de retrouver çà et là les échos de nos autres lectures.