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Roman

Le feu, Henri Barbusse

Ecrit par Martine L. Petauton , le Samedi, 23 Janvier 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Petite bibliothèque Payot

Le feu, 464 pages, 8,65 € . Ecrivain(s): Henri Barbusse Edition: Petite bibliothèque Payot

 

Un des grands livres, sinon « le » livre sur la grande Guerre, écrit, dans le même temps que les faits, à la manière d’un reportage heure par heure, « Journal d’une escouade » en étant le sobre sous-titre. Le titre lui-même – trois lettres tirées à bout portant, lumière d’un autre monde de cauchemars – vise dès l’ouverture du livre son lecteur au cœur.

Le feu, Goncourt 1916 – en un temps où les Goncourt pesaient vraiment en termes de talent et d’importance. Cent ans et pas une ride. Chef d’œuvre absolu. On lit le Barbusse, et après, on voit.

Mieux que toutes les images des archives – même recolorisées – plus fort que les banques de sons rameutant les bruits éraillés des obus et fusées des plaines du Nord, ces 400 pages incontournables donnent – pour ceux qui en douteraient – à la littérature, à la force des mots seuls, la place tout en haut du podium, face à l’Histoire. « Voyage au bout de l’enfer », a dit, en un autre temps, un film sur une autre guerre. On y est.

Wulf, Hamish Clayton

Ecrit par Victoire NGuyen , le Vendredi, 22 Janvier 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Océanie, Editions de la Différence

Wulf, mai 2015, trad. anglais (Nouvelle-Zélande) Marc Sigala, 270 pages, 22 € . Ecrivain(s): Hamish Clayton Edition: Editions de la Différence

 

A la frontière du mythe

« Au cours de mes nombreuses errances, jamais je n’ai vu de pays si frais, si rude, si majestueusement vert. Jamais je n’ai mis les pieds dans aucun pays dont le froid soit si mordant à ses beaux jours. Juillet et août, joyaux de givre. Ainsi les ressentaient nos peaux nordiques.

Cette terre repose en des eaux lointaines et agitées. L’histoire reste dans l’attente de cette terre lointaine et agitée ».

Ainsi débutent les premières pages de ce roman consacré à la découverte de la Nouvelle-Zélande et de ses héros par les Européens commerçants.

Les premières pages s’ouvrent sur l’année 1830. Le narrateur ainsi que l’équipage du navire Elisabeth quittent Londres pour un long périple qui les mène vers les terres lointaines en pleine hémisphère sud :

Les chemins de la fraternité, Jean-François Nahmias

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 21 Janvier 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Albin Michel

Les chemins de la fraternité, novembre 2015, 518 pages, 22 € . Ecrivain(s): Jean-François Nahmias Edition: Albin Michel

 

Le personnage central de ce roman est Frédéric Legendre, en rupture avec sa famille et sa condition d’origine : son père dirige avec beaucoup d’autoritarisme et de dureté vis-à-vis de ses salariés une entreprise de confection consacrée à la fabrication de boutons. Le différend familial prend sa source dans un accident de travail dont est victime une ouvrière de l’usine. Frédéric Legendre décide de partir pour Paris. Il s’agit du Paris du Second Empire, en l’année 1865.

Les premiers temps sont difficiles, marqués par une grande précarité matérielle, jusqu’à ce que notre jeune homme en recherche d’une nouvelle orientation à sa vie se mette au service d’un libraire nommé Amédée Silvestri, qui lui attribue comme tâche de ranger ses manuscrits par ordre alphabétique. Il rencontre également des personnages tels que Raoul Rigault, agent très officieux des milieux révolutionnaires de Paris, Augustin Grandier, autre militant, et aussi Eugène Varlin, alors chef du syndicat des relieurs qui jouera un rôle-clé dans la Commune de Paris.

L’équation du nénuphar, Pascale Petit

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 20 Janvier 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Louise Bottu

L’équation du nénuphar, octobre 2015, 126 pages, 14 € . Ecrivain(s): Pascale Petit Edition: Editions Louise Bottu

« comme si d’emblée on connaissait la fin et qu’on faisait semblant de se concentrer sur le comment le pourquoi

un scénario si impeccablement logique qu’ils n’en ont plus eux-mêmes le véritable usage

aucun mobile »

Les équations comme les romans recèlent des inconnues, des variables, et le lecteur se doit de tenter de résoudre, de se prêter à ce réjouissant jeu littéraire. Pascale Petit s’emploie tout d’abord à brouiller les règles de la ponctuation, de la composition littéraire, point de virgule, ni de point-virgule, perdus les points qu’ils soient uniques ou de suspension, point de point pour fragmenter le roman, pour le relancer, pour qu’il se pose, qu’il retrouve des forces. Seuls perdurent parfois quelques exclamations ! Cette équation introuvable et inachevée, enquête sur la narration, sur la naissance du roman, sur l’auteur et ses propres équations impossibles, sur ses hésitations, ses doutes, ses rêves et ses envies. Les phrases de cette équation du roman s’allongent comme les vagues d’un dialogue, échange d’associations et de mots que l’on aurait pu entendre dans un film romanesque de Jean-Luc Godard, ou sur la scène d’un théâtre. Un roman dialogué sur le fil du rasoir, sur le fil de la rencontre amoureuse, de l’image, de la perte et du saisissement.

Corps Conducteurs, Sean Michaels

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 19 Janvier 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Canada anglophone, Rivages

Corps Conducteurs, janvier 2016, trad. anglais (Canada) Catherine Leroux, 448 pages, 22 € . Ecrivain(s): Sean Michaels Edition: Rivages

 

Sean Michaels (1982) est un Canadien multi-talentueux : créateur du très influent blog Said The Gramophone, il a écrit sur la musique, ainsi que sur les voyages et la culture, dans nombre de médias importants, de Pitchfork au Guardian en passant par The Wire. Dans toutes ces publications, il a pu exercer sa plume et se montrer fin et sensible observateur (il fait partie des premiers journalistes à avoir repéré Arcade Fire entre autres). Il est donc peu surprenant que son premier roman ait pour thème un musicien, ou du moins un inventeur ayant donné son nom à un instrument de musique, Léon Thérémine (1896-1993, en russe : Lev Sergueïevitch Termen) et soit un bijou d’écriture sensible, finement ciselé.

Corps Conducteurs se présente comme une autobiographie, une réflexion sur la propre histoire de son narrateur, ainsi que l’indique la première phrase : « J’étais Léon Termen avant d’être le docteur Thérémine, et avant d’être Léon, j’étais Lev Sergueïevitch ». Mais l’auteur prévient en note : « Ce livre est un ouvrage de fiction rempli de distorsions, d’élisions, d’omissions et de mensonges. […] Quiconque souhaite connaître la véritable histoire de Termen devrait lire Theremin : Ether Music and Espionage, d’Albert Glinsky, un volume méticuleusement documenté auquel ce roman est grandement redevable ».