Identification

Poésie

PoéVie Blues, Richard Taillefer

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 10 Mars 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

PoéVie Blues, éd. PREM’édit, août 2015, 106 pages, 13 € . Ecrivain(s): Richard Taillefer

 

Dans les PoéVie Blues de Richard Taillefer, tombent des miettes de désillusion au Café de la mélancolie.

Sur le rebord de la fenêtre

Quelques piafs en repérage

De mes dernières miettes de désillusion

On va ici prendre un verre, comme un certain Richard, et l’on se dit qu’il se fait tard, et que les gens, il ne conviendrait de les connaître que disponibles, à certaines heures pâles de la nuit… (Richard, Léo Ferré). Pas de jugement, pas de nostalgie négative dans le blues de cette PoéVie prise sur le vif dans la trame  du quotidien, au pied levé de chaque aube qui se lève et qui éclaire le chemin d’une nouvelle route, dans Ce va et vient insoluble. Cette mâchoire qui claque, comme le jeu endiablé d’un mâle andalou, dans son tant tin tian de castagnettes.

Dévore l’attente, Laurent Bouisset

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 08 Mars 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Dévore l’attente, Éd. Le Citron Gare, novembre 2015 (avec des images d’Anabel Serna Montoya), 85 pages, 10 € . Ecrivain(s): Laurent Bouisset

 

Avec Dévore l’attente, le ton est donné, l’auteur a les crocs, il a faim, il en veut. Il exulte, ressent et aspire le monde par tous les pores, autant qu’il en recrache venin et sueur. Il en veut le poète et il en veut aussi à ceux qui commettent l’indifférence.

 

Comment ils font pour faire ?

Comment ils actionnent, eux ?

Et ils actionnent quoi ? Du chiffre

Encore ? Et du numéralisable ?

 

S’il existe un pays, Bruno Doucey

Ecrit par France Burghelle Rey , le Mardi, 16 Février 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

S’il existe un pays, éd. Bruno Doucey, 2013, 144 pages, 15 € . Ecrivain(s): Bruno Doucey

 

Dès le début de S’il existe un pays, se retrouve la sobriété du recueil précédent, La Neuvaine d’amour, réduite au dépouillement de l’haïku et l’amour d’une Nature vivante avec laquelle le poète dialogue – c’est un procédé récurrent dans tout le recueil – « à mots couverts ».

Cette fusion avec la Nature, alliée à une richesse du vocabulaire, nous surprend par sa profusion urgente issue des voyages et de la frustration due au manque de temps, comme Bruno Doucey l’a reconnu lui-même publiquement. Dans Neige, première « nouvelle » d’une série qu’il a élevée à la hauteur d’un conte, on peut en effet lire de véritables trouvailles comme : « la houppelande d’étoiles » et « la capeline dans le vent ».

Puis c’est l’eau, cette fois, qui, sous sa forme liquide, donne lieu aux psalmodies de l’Indian-castor dans une aventure qui a commencé très tôt : « Mais je reste l’indien des mots de mon enfance ».

Le dialogue reprend dans Poème à la vie volée avec un éloge funèbre à l’ami mort et c’est par le vers éponyme « s’il existe un pays » que le poète offre ici une patrie commune à ses frères en écriture.

Jan Bardeau & compagnie, Jan Bardeau, Sébastien Russo

Ecrit par Cathy Garcia , le Vendredi, 12 Février 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Jan Bardeau & compagnie, mgv2>publishing, août 2015, illustration Seb Russo, 40 pages, 5 € . Ecrivain(s): Jan Bardeau, Sébastien Russo

 

Jan Bardeau s’empare des mots, les triture, les malaxe, les lance contre les murs, d’où ils rebondissent, l’écho parfois est effrayant, car ce jeu faussement léger, non exempt de plus ici d’autocontraintes, c’est pour révoquer le vide, la solitude crasse, « la hideur abrupte », le dur « qui courbe & brise & broie, bousille le beau » et gripper les mécanismes froids et déshumanisants d’un système entonnoir qui se gave de lui-même.

Jan Bardeau & compagnie, c’est un duo : Jan Bardeau et Seb Russo. Jan avec ses mots, Seb avec ses dessins, ses corps d’encre qui se tordent, se vident, se déforment, dégoulinent, étirés, vrillés, enchaînés. Et le poète est comme ce clodo au nez de clown. Clodo ou ouvrier ? C’est un peu du pareil au même non ? Un pas de trop et hop, à la casse.

« petites mains jusqu’à ce qu’ils les prennent sur leur tronche, les petites mains »

Nous sommes tellement nombreux à être des clowns plus ou moins fatigués. Nous amusons parfois la galerie des portraits poudrés, cette basse haute-cour où « les uns parlent d’importance, les autres s’imprègnent de l’art de picorer » et « s’évertuant à favoriser la guerre de chacun contre tous ».

Ce qui reste après l’oubli, Alain Duault

Ecrit par France Burghelle Rey , le Mardi, 09 Février 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Ce qui reste après l’oubli, 143 pages, 17,75 € . Ecrivain(s): Alain Duault Edition: Gallimard

 

Le troisième volet du triptyque d’Alain Duault mériterait bien que son titre soit éponyme de cet ensemble de près de 400 textes car il énonce un paradoxe que développe l’œuvre toute entière et qui s’exprime, en effet, dès le premier recueil, Une hache pour la mer gelée. Déjà, en effet, la répétition des thèmes, les récurrences de mots, les assertions métaphoriques, les questionnements de l’incipit à la chute des quinzains permettent de comparer le travail du poète au ressac de la mer devant laquelle il aime travailler. C’est sans doute devant elle qu’il a évoqué les horreurs de la guerre qui l’ont marqué au point qu’il en est arrivé à écrire : « la guerre, c’est moi ». Mais, dès les premiers textes, il s’était, à l’inverse, rappelé les bons souvenirs comme, dans cette description au présent, où, à propos de la femme aimée, il parle de « la ligne de ses cheveux ou cette manière de monter son cheval bai ». Dans les nombreux passages consacrés à celle qui n’est plus et qu’il fait revivre ici, le poète hésite, sans aucun doute volontairement, entre l’emploi du temps présent et celui des temps du passé en les faisant alterner d’un chapitre à l’autre et même d’un texte à l’autre.