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Les Livres

Qui ne dit mot consent, Alma Brami

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Jeudi, 24 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Mercure de France

Qui ne dit mot consent, 24 août 2017, 176 pages, 15,80 € . Ecrivain(s): Alma Brami Edition: Mercure de France

 

Alma Brami ne finit pas de poser les questions de l’identité d’un couple, de son seuil de tolérance et par voie de conséquence celle de l’apparentement selon la voie du dehors et du dedans. Au vu des autres, le couple est parfait. Dans l’intimité il n’en va pas de même. Et la narration devient peu à peu exsangue d’illusion. Fait place la radicalité du réel alimenté par un fin renard.

Celle qui doit à l’attention de son mari la venue chez elle d’amies pour la réconforter va vite déchanter. L’époux modèle recrute ces femmes par petites annonces : mais du chevet de l’épouse esseulée au lit du mari il n’y a qu’un pas. Les femmes se succèdent et s’effeuillent au gré des envies et des lassitudes de celui qui néanmoins retourne toujours dans le giron de sa première des femmes même si elle finit par passer en dernier… Le tout en une série de mises à mal pour le profit d’un mâle qui fait de chaque venue une relique.

Dialogues manqués, Antonio Tabucchi

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 24 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard, Théâtre, Italie

Dialogues manqués, juin 2017, trad. italien Bernard Comment, 112 pages, 17 € . Ecrivain(s): Antonio Tabucchi Edition: Gallimard

 

Trois pièces – genre auquel le public de Tabucchi n’est pas habitué, puisqu’il est essentiellement auteur de romans, de récits et d’études littéraires – composent cet ouvrage posthume. L’auteur de Pereira prétend est mort dans la ville qu’il a tant aimée, en 2012.

L’un des meilleurs connaisseurs de Pessoa était sans doute bien placé pour imaginer la rencontre de son écrivain portugais fétiche avec une autre sommité du siècle, mais sicilienne, celle-là, Pirandello.

Monsieur Pirandello est demandé au téléphone imagine la rencontre des deux littérateurs, dans un hôpital psychiatrique en 1935, année même de la mort de Fernando Pessoa. Jouant des réalités et des furtives hypothèses d’une autre instance, Tabucchi tire parti des masques dont Pessoa a tissé ses rapports au lecteur : Monsieur Personne hissant ses « personae » au-dessus des fictions. Le grand théâtre des apparences est là même où se noue la littérature unique de deux monstres qui l’ont révolutionnée au même titre que Proust, Joyce et Svevo.

Un oiseau bleu et rare vole avec moi, Youssef Fadel

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 23 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Bassin méditerranéen, Roman, Maghreb, Sindbad, Actes Sud

Un oiseau bleu et rare vole avec moi, mars 2017, trad. arabe marocain Philippe Vigreux, 394 pages, 23,80 € . Ecrivain(s): Youssef Fadel Edition: Sindbad, Actes Sud

 

Bouleversant !

La lecture de ce roman hors du commun est une plongée en enfer.

Aziz, issu d’un milieu rural pauvre où il a vécu une enfance difficile, violente, douloureuse avant d’être recueilli par une communauté religieuse qui lui permet de faire des études, devient aviateur.

Zina, qui a eu elle aussi un parcours d’enfance et d’adolescence ponctué de violence paternelle, est prise en charge et protégée par sa sœur aînée Khatima, que le dénuement contraint, après qu’elle et Zina ont fui nuitamment les violences de leur père, et après maintes vicissitudes, à la prostitution à Azrou sous le joug brutal du proxénète Jojo.

Rien de très original, si on s’en tient à ce résumé de la première partie du récit.

Mais l’histoire a pour contexte très particulier le Maroc des années de plomb…

Dans l’épaisseur de la chair, Jean-Marie Blas de Roblès

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mercredi, 23 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, Zulma

Dans l’épaisseur de la chair, août 2017, 384 pages, 20 € . Ecrivain(s): Jean-Marie Blas de Roblès Edition: Zulma

 

Dans l’épaisseur de la chair est le magnifique hommage d’un fils à son père, un roman passionnant, brillant, parfois drôle, qui interroge l’Histoire autant que la fiction, dans un jeu de miroir et de mémoire.

C’est un texte qui fraye avec l’histoire familiale et l’Histoire de l’Algérie française, un texte qui soulève un pan du mystère de l’identité pied-noir, terme qui désigne les Français d’origine européeenne installés en Algérie française depuis 1930 jusqu’à l’indépendance de juillet 1962.

Ces allers et retours entre le temps du fils, Thomas, et le temps du père, Manuel Cortes, fils de Juan et petit-fils de Francisco, Espagnol émigré à Sidi-Bel-Abbès, devenu chirurgien puis médecin, prennent place alors que le père est âgé de 93 ans au moment de l’écriture et non loin du seuil de la mort.

Sortir, Benoît Conort

Ecrit par France Burghelle Rey , le Mercredi, 23 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Sortir, Champ Vallon, mai 2017, 112 pages, 13,50 € . Ecrivain(s): Benoît Conort

 

Le prologue mis en place par Benoit Conort dans son dernier opus poétique a pour incipit l’infinitif « consentir » associé à un espace et à un langage qu’il faut à la fois apprivoiser et mieux connaître. La parole personnifiée, puisqu’elle est « nue », résiste et précipite le paradoxe entre deux thèmes signifiés par les adverbes-titres « Dedans » et « Dehors » qui encadreront le titre de la partie III, « Jardins ».

La partie I comprend trois volets dont le premier confirme par son titre « l’ombre et sa nuit » l’emploi du ton initial. Ses textes hésitent entre une brièveté qui arrive à louer le corps, une parole prolongée qui s’articule jusqu’au manque d’air : « il n’y a plus de vent » et une confidence douloureuse plus longue à travers le récit au rythme haché d’une guerre ou pire d’un génocide : « de la poussière s’élève / de la poussière danse / dans la lumière des machettes ».