Identification

Les Livres

Il ne se passe rien mais je ne m’ennuie pas, Heptanes Fraxion (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Jeudi, 22 Novembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Il ne se passe rien mais je ne m’ennuie pas, Heptanes Fraxion, Editions Cormor en nuptial, 2018, postface Grégoire Damon, 110 pages, 16 €

Il en a fallu du temps pour qu’enfin ce livre naisse, ce livre qui ne pouvait pas ne pas naître, quoique… Dans un monde à l’envers, quoi de plus normal, finalement, qu’un poète ne trouve pas d’éditeur – poète au sens le plus sincère et authentique du mot ? Un poète qui ne fait pas de concessions pour arrondir les arêtes, lisser les recoins, cacher les taches et la bouteille, mais qui colle depuis des années des post-it de poésie partout où il passe. Une bave poétique qui fait scintiller les murs, les vitrines menteuses, les poteaux, les portes closes, les poubelles, les panneaux tristes. Heptanes Fraxion, nous sommes pourtant nombreux à le connaître, lui qui balance sur le net ses textes à qui veut et dont quelques revues de poésie pas trop connes ont su se faire l’écho. Mais les éditeurs ?!

Ce livre devenait une nécessité et le voilà enfin ! Première publication d’une toute jeune édition belge lancée par Gaël Pietquin et il est beau ! Un bel objet à la hauteur de ce qu’il accueille : de purs morceaux de poésie pêchée à même le caniveau de la vie, de la poésie compulsive, boire, écrire, pisser, pleurer, jouir, échapper encore et toujours à ce qui nous broie, nous concasse en cube.

Deux mètres dix, Jean Hatzfeld (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Jeudi, 22 Novembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Deux mètres dix, Jean Hatzfeld, août 2018, 206 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Jean Hatzfeld Edition: Gallimard

 

Du saut en hauteur considéré comme l’un des Beaux-Arts.

Ancien journaliste-correspondant de guerre, Jean Hatzfeld a consacré plusieurs ouvrages à des zones de conflit, notamment le Rwanda. Il est l’auteur, entre autres, d’un essai, Une saison de machettes (Prix Femina 2003), et plus récemment Un papa de sang (2015). Il fut également journaliste sportif, et son dernier livre, Deux mètres dix, nous présente l’histoire de quatre athlètes, sous forme romanesque. Il s’agit des destins croisés, des années 80 à aujourd’hui, de deux sauteuses en hauteur, l’une Américaine et l’autre Kirghize d’origine koryo-saram, et de deux haltérophiles, également un Américain et un Kirghize, ce dernier concourait comme son homologue féminin sous le drapeau soviétique. Ces quatre sportifs de très haut niveau flirtent avec les records du monde et les médailles olympiques. Bien qu’imaginés, ces personnages ressemblent de près aux sportifs des années 80.

Un autre loin, Silvia Baron Supervielle (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 22 Novembre 2018. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Un autre loin, Silvia Baron Supervielle, Gallimard, mars 2108, 120 pages, 12 €

 

Divagation et mort de la divagation

Il y a quelques jours j’ai achevé la lecture du dernier livre de Silvia Baron Supervielle, et il m’apparaît maintenant clairement que cette lecture est vraiment d’un ordre poétique, cela dans la mesure où toute poésie est lue pour être réparatrice ; et il en va ainsi pour ce recueil. Du reste, cet ouvrage rejoint les grandes préoccupations d’aujourd’hui – et qui sait, de toute poésie universelle. Car, j’ai cru voir dans la succession des quatre chapitres du recueil, la constitution d’un imago dans le sens que lui attribue la psychanalyse. Donc, une sorte de premier cri, de première image de soi. Et cette fixation de l’identité de la poétesse, son véritable imago, revient pour elle, à signifier la fin, la disparition qui, on le sait de toute évidence, se décline en une vie bornée, limitée et cela depuis le premier souffle. Un autre loin n’est donc pas un autre ailleurs, mais le soi propre et l’image de soi-même vécus comme un autre, dits dans l’œil d’autrui, dans celui du liseur. Car si cette poésie est réparatrice, si elle est en même temps le témoignage de l’écrivaine au sein de sa propre humanité, et si elle cherche à toucher du doigt au mystère, alors on peut être certain de trouver là une énigme et un soin, confiés au liseur, à son authenticité intérieure revécue par la lecture.

L’Expérience à l’épreuve, Correspondance et inédits (1943-1960), Georges Bataille, Georges Ambrosino (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mercredi, 21 Novembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Correspondance

L’Expérience à l’épreuve, Correspondance et inédits (1943-1960), Georges Bataille, Georges Ambrosino, Editions Les Cahiers, coll. Hors Cahiers, novembre 2018, 424 pages, 35 €

 

 

Face à Face

La recherche de la vérité et la manière de résoudre les problèmes que cela pose restent le centre des querelles dont les lettres de Bataille Et Ambrosino se font écho. Les deux chercheurs pouvaient se rejoindre dans une forme de synthèse ou du moins vers celui qui pourrait la donner : le poète. Seul il « sait qu’il n’y a pas de solution mais seulement une intensité dans le paradoxe ». Mais pour Ambrosino, le scientifique s’en estime plus proche que le philosophe. Ce que Bataille d’une certaine manière conteste : au mépris du savant répond sa méfiance envers lui.

Maldonnes, Virginie Vanos (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Mercredi, 21 Novembre 2018. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Maldonnes, Virginie Vanos, Edilivre, janvier 2018, 146 pages, 13,50 €

 

L’ambiance et les rencontres dans une modeste épicerie de quartier ont tout de charmant si ce n’est que le quotidien, transcendé d’apparences diverses, n’en anime pas moins les esprits suscitant la passion comme l’inspire ce dialogue (c’est le frère de l’héroïne qui parle) : « Je te l’accorde bien volontiers, mais sans rire, on dirait que tu es folle de cette cliente. Si je ne te connaissais pas aussi bien, je dirais que tu as viré de bord et que tu es follement amoureuse ».

Entre égérie, monde à paillettes et l’épicerie du coin sans compter sur les différents caractères entre personnes, il y a un tel monde de différences que la gêne aux entournures, malgré la passion, reste palpable, allant crescendo.

Le monde des apparences, plus qu’insinué dans les dialogues, en prend un coup : « J’en ai ras le bol de ce maudit parfum, juste bon à pomponner les rombières à la bichon maltais. Vous savez le temps que ça a pris pour concevoir cette image ? Je ne parle pas de la préproduction, dont j’ignore tout ».