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La Une CED

Le Jardin de derrière (18) - Où les voisins ne sont guère vigilants

Ecrit par Ivanne Rialland , le Jeudi, 02 Avril 2015. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

La lumière de la lampe électrique traversa la toile de la tente. Une voix appela doucement dans la nuit, sous les étoiles.

Tristan abaissa d’un coup sec la fermeture éclair et sortit la tête : « Éteins cette lampe ! » Isabelle obtempéra, un rien froissée. Tristan rampa hors de la tente, rabattit la capuche de son sweat sur ses cheveux. Pierre et Noé sortirent à leur tour, eux aussi vêtus d’un sweat à capuche et d’un pantalon sombre. Pierre s’exclama d’une voix étouffée : « Qu’est-ce qu’elle fait là, elle ? » Louise se raidit : « Je veux en être ». Isabelle se tourna vers Tristan : « Je ne pouvais quand même pas la laisser toute seule… » Louise lui coupa la parole, défiant tour à tour Pierre et Tristan du regard : « Et Camille vient aussi. Elle nous attend sur la place ». « Ton idiote de copine… » commença Pierre, mais Tristan lui posa la main sur le bras et l’apaisa, avec un sourire ambigu : « Plus on est de fous… » « Si par leur faute, on se fait choper… » grommela quand même Pierre. Noé fit la grimace et jeta un coup d’œil de regret vers la tente, que surprirent Louise et Tristan. Le sourire de Tristan s’accentua : « T’inquiète… » Il regardait tour à tour les quatre adolescents, soudain mal à leur aise. Il y eut une pause. « On y va », déclara abruptement Pierre, qui s’engagea sur la route. Les autres suivirent, Tristan en queue de cortège, les mains nonchalamment glissées dans ses poches.

Une mystique sans Dieu, Jean-Claude Bologne

Ecrit par Michel Host , le Mardi, 31 Mars 2015. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Une mystique sans Dieu, Jean-Claude Bologne, Albin Michel, février 2015, 330 pages, 20,90 € (Essai)

 

Une lecture est une aventure personnelle, sinon « à quoi bon ? »

Michel Host

 

« … je n’entends pas récupérer sous l’étiquette d’une mystique sans Dieu les auteurs dont j’invoque le témoignage et dont je ne partage pas nécessairement les croyances : ils sont chrétiens, bouddhistes, théosophes, agnostiques, athées, mais ce qui m’intéresse en eux, c’est l’instant où ils n’étaient que traversée du néant… »

Jean-Claude Bologne, Avertissement

Dans la salle d’attente, l’Algérien est totalement nu (Kamel Daoud)

Ecrit par Kamel Daoud , le Jeudi, 26 Mars 2015. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

Salle d’attente algérienne. Espace clos sur la nation, cosmos assis sur une chaise. C’est là où l’Algérien est nu et inquiet. Pas d’histoire nationale pour l’habiller, pas de mosquées pour le cacher à lui-même, pas de rue à regarder, d’occupation, de faux-fuyants, de tasses de café pour lire le passé et rien qui annule le temps comme le font la cigarette, la télévision, le journal ou le commérage. Rien.

Sauf l’homme, nu ; et le temps, nu avec le poitrail du ciel. Deux déserts qui se rencontrent et qui se mettent à l’infini. Premier constat : c’est terrible ; on regarde ses chaussures comme s’il s’agissait d’une rivière. Puis on parle à son voisin qui sort le sac de nos clichés et supplications aux cieux. Puis on écoute un mur ne rien dire. Puis on il feuillette des journaux morts.

Le pire des salles d’attentes en Algérie sont trois. La première est celle des médecins : peu entretenue, parfois sale. Parfois spartiate comme une caserne enclavée. On ne comprend pas pourquoi des médecins ne se permettent pas des salles d’attentes confortables pour leurs patients ; du banc dur, des revues vieilles et offertes par des délégués médicaux, des chaises mortes et des assistantes laides qui ressemblent à la médecine gratuite.

Souffles - Pourquoi les salafistes algériens ont marché sur Alger ?

Ecrit par Amin Zaoui , le Mercredi, 25 Mars 2015. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières, Côté actualité

 

Parce que l’islam d’aujourd’hui a été vidé de toutes cultures universelles, le musulman, le bon croyant, à son tour, s’est trouvé conditionné, automate. C’est triste mais c’est la réalité amère. Pourquoi est-ce que les salafistes algériens sont-ils sortis coléreux et en force, cette semaine, dans les rues d’Alger ?

Serait-ce pour dénoncer les injustices sociales ? Non.

Pour réclamer l’augmentation des salaires ? Mais non !

Pour dire non à l’exploitation du gaz de schiste ? Pas du tout.

Pour dénoncer la mauvaise et louche distribution des logements sociaux ? Ceci n’est pas important à leurs yeux.

Pour dénoncer la corruption qui gangrène l’économie algérienne ? Ceci, à leurs yeux, relève d’el-mektoub, du Ciel.

Le Jardin de derrière (17) - Où Oncle Tobie fait des siennes

Ecrit par Ivanne Rialland , le Mercredi, 25 Mars 2015. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

 

Deux vigilants voisins se grattaient la tête avec perplexité. La porte de la maison de Louis était grande ouverte. Ils étaient venus faire leur ronde autour de la ferme pour surveiller les jeunes qui avaient l’habitude de traîner sur son terrain, mais là, devant ce qu’ils apercevaient à l’intérieur, ils ne savaient pas trop quoi faire. L’un d’eux se décidait à appeler la gendarmerie lorsque Louis survint, s’exclamant du plus loin qu’il les vit : « Qu’est-ce que vous foutez là ? » Louis était devenu, par la force des choses, très tatillon avec la notion de propriété privée. Le premier voisin vigilant rempocha son portable tandis que l’autre levait les mains en signe d’apaisement : « C’est pas nous, Louis. On s’est juste approché pour voir. Parce que c’est pas tes habitudes, de laisser la porte ouverte. Et on a vu. On allait appeler les gendarmes ». Louis fonça vers sa maison, pila net sur le seuil de la porte : « Bon Dieu, qu’est-ce que… » Il hésita. Puis il prit son téléphone, et appela lui-même les gendarmes.