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Italie

L’amour harcelant, Elena Ferrante (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mercredi, 25 Mars 2020. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

L’amour harcelant, Elena Ferrante, février 2020, trad. italien, Jean-Noël Schifano, 224 pages, 5,30 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Nous découvrons le premier roman d’Elena Ferrante, paru dans les années 1990, bien avant la tétralogie L’Amie prodigieuse qui a fait le succès de l’auteure. Ce roman de la jeunesse et de la filiation explore très classiquement les relations qu’une fille a entretenues avec sa mère récemment décédée. Delia met au jour le passé quelque peu trouble de sa mère Amalia, découverte noyée dans la baie de Naples, en sous-vêtements, avec une valise et un sac à mains contenant du linge féminin. A l’enterrement et dans les jours qui suivent, Delia reprend contact avec quelques-uns des personnages qui ont peuplé la vie d’Amalia. Les souvenirs napolitains se ravivent : les rues, les boutiques, le funiculaire, la plage, les restaurants et hôtels, la langue dialectale. Qui est ce Caserta, qui semble avoir exercé une influence plutôt néfaste sur Amalia, allant jusqu’à la violence ? L’oncle Filippo, frère d’Amalia, est-il si bienveillant qu’il en a l’air ? Que cache Polledro Antonio, gérant du magasin de vêtements Vossi ? La veuve De Riso révèlera-t-elle à Delia un pan des relations conflictuelles entre son père, artiste-peintre, et sa mère ? Delia mène l’enquête, cherchant à se fondre dans le passé de sa mère, fascinée par ses recherches, traquant la jeunesse enfouie sous les visages et les comportements parfois lubriques des vieillards, rencontrant les enfants des « amis » de sa mère, devenus adultes et mûrs.

Todo Modo, Leonardo Sciascia (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 04 Mars 2020. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Todo Modo, traduit de l'italien par François-René Daillie, 196 p. 7,50 € . Ecrivain(s): Leonardo Sciascia Edition: Gallimard

 

Quand le grand Leonardo Sciascia écrit un roman noir – un polar – c’est à un véritable phénomène de déplacement et de métamorphose que l’on assiste. Le genre est très vite subverti, oublié, et pourtant, point de doute, ce roman est bien policier. Un meurtre, deux meurtres (trois ?) dans une résidence réservée pour un temps à la méditation et la disputation théologique qui accueille hommes d’église, grands bourgeois, décideurs, et Sciascia nous offre un roman remarquable de réflexion sur le Bien et le Mal. Mais il le fait avec un œil pétillant de malice, une bonne dose d’anticléricalisme, une joie féroce et vengeresse à l’endroit des puissants de ce monde. Quand on entend Don Gaetano, l’hôte des lieux, c’est évidemment Leonardo Sciascia qui parle, lui qui a fait de ses romans une critique permanente de la classe politique, un regard acide et virulent sur les mœurs délabrées des puissants et des possédants dans son pays – qu’il s’agît de la mafia ou des politiques – on se rappelle le magnifique « Cadavres Exquis ».

Adieu fantômes, Nadia Terranova (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 02 Décembre 2019. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La Table Ronde

Adieu fantômes, octobre 2019, trad. italien Romane Lafore, 240 pages, 22,40 € . Ecrivain(s): Nadia Terranova Edition: La Table Ronde

 

Voilà pour la jeune romancière italienne un deuxième roman, sélectionné par le Prix Strega 2019. Ce très beau livre est non seulement un hommage à Messine, à la maison familiale mais surtout à ces êtres disparus, perdus, qui restent flottants comme des fantômes obsédants.

Ida part de Rome, quitte pour un temps Pietro, son mari, pour venir aider sa mère à déblayer l’appartement de Messine, qui a besoin de travaux. Le retour dans la ville natale est un vivier de souvenirs : l’amitié pour Sara, la disparition, alors qu’elle avait treize ans, de son père Sebastiano, parti un matin, jamais revenu. La perte du père n’a jamais été cicatrisée, et pour la mère, et pour elle-même. Le fantôme du père peuple les nuits d’Ida et le roman reprend ses veilles, ses rêves, ses cauchemars, en alternance avec le récit de ce retour aux sources. La mère a entrepris de restaurer la terrasse du petit appartement humide, et a fait appel à Nikos et à son père. Ida sent la fragilité de ce garçon de vingt ans, au visage arborant une cicatrice. Le séjour ravive les querelles entre mère et fille, tandis qu’Ida aime de plus en plus quitter la sphère familiale pour arpenter la ville. Elle reçoit des appels de Pietro, revoit Sara et sort un soir avec Nikos, avide de lui raconter son passé.

Journal secret (1941-1944), Curzio Malaparte (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 20 Novembre 2019. , dans Italie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Biographie, Quai Voltaire (La Table Ronde)

Journal secret (1941-1944), février 2019, trad. italien Stéphanie Laporte, 322 pages, 23,70 € . Ecrivain(s): Curzio Malaparte Edition: Quai Voltaire (La Table Ronde)

 

Œuvre inédite

Quel voyage !

Quel périple spatio-temporel, historico-géographique dans l’Europe en guerre ! Quelle bouleversante intrusion/incursion aussi, dans l’univers intime des faits et gestes quotidiens et dans la vision intérieure et secrète d’un écrivain journaliste correspondant de guerre, controversé, blâmé, interpellé, menacé d’emprisonnement, brièvement incarcéré pour sa proximité apparente avec les milieux fascistes italo-germaniques dont il ne partage toutefois nullement l’idéologie fangeuse !

Les notes, écrites au jour le jour, pourraient faire penser tantôt aux Choses vues de Victor Hugo par le style, la précision et l’expression sans fausse pudeur d’une vision personnelle, tantôt au journal de bord, sec, utilitaire, pressé et réglementaire d’un navigateur solitaire, et couvrent en deux parties deux périodes distinctes dans des lieux différents, la première s’étalant de la Bulgarie à la Laponie d’avril 1941 à juillet 1943, la deuxième se situant en Italie, principalement à Capri et à Naples de septembre 1943 à juin 1944.

La Féroce, Nicola Lagioia (par Catherine Blanche)

Ecrit par Catherine Blanche , le Mardi, 15 Octobre 2019. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

La Féroce, Nicola Lagioia, septembre 2019, trad. italien Simonetta Greggio, Renaud Temperini, 512 pages, 9 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Voici un roman qui ressemble à s’y méprendre à une course d’obstacles : beaucoup d’embuches, des chausse-trappes, quelques vagues éclaircies le temps de se remettre à peu près en selle et de nouveau patatras, la tête sous l’eau avec des sales moments de redondance et d’ennui profond où tout se confond. On en bave vraiment, ça patine et puis, aux trois quarts du parcours, étrangement, cela s’arrange, et même de mieux en mieux puisqu’on se surprend à être ému. Oui, vous avez bien lu. Ému, vraiment, au point de s’accrocher à ces deux êtres : la belle Clara (qui multiplie les aventures sans lendemain et les prises de cocaïne) et son demi-frère Michele.

Enfin, dans la dernière ligne droite, on se sent comme récompensé : la fin est réussie.

Au tout début du récit, Clara est retrouvée morte au pied d’un immeuble et tout porte à croire qu’elle se soit suicidée.