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Italie

Roland furieux, L’Arioste (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 20 Octobre 2021. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Points

Roland furieux, L’Arioste, avril 2021, trad. italien, Michel Orcel, 720 pages (9,50 €), 816 pages (9,90 €) Edition: Points

 

« Ayant lu l’Arioste deux ou trois fois par an depuis l’âge de quinze ans, il s’est placé tout dans ma mémoire sans que je me donne la moindre peine, et pour ainsi dire malgré moi, ses généalogies exceptées, et ses tirades historiques, qui fatiguent l’esprit sans intéresser le cœur ». Ainsi Casanova parle-t-il du Roland furieux (1532, édition définitive par l’auteur) de L’Arioste (1474-1533) à Voltaire, chez qui il est en visite en 1760. Il ajoute, concernant le poète : « je ne peux pas dire que je l’aime plus que les autres ; car je n’aime que lui ». Et de se livrer à une récitation des « trente-six stances dernières du vingt-troisième chant, qui font la description mécanique dont Roland devint fou ». Casanova récite devant une assemblée qui, Voltaire mis à part, ne comprend pas l’italien, et parvient pourtant à émouvoir, par le choix de les réciter « comme si ç’avait été de la prose, les animant du ton, des yeux, et d’une variation de voix nécessaire à l’expression du sentiment ».

La première des stances en question, la voici dans la traduction de Francisque Reynard, datant de 1880, la plus abordable, publiée chez Folio en 2003 :

Barques renversées, Federigo Tozzi (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 16 Septembre 2021. , dans Italie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Barques renversées, Éditions La Barque, janvier 2021, trad. italien, et postface, Philippe Di Meo, 96 pages, 18 € . Ecrivain(s): Federigo Tozzi

 

Entre philosophie, psychologie de l’intime et aphorismes, le livre du romancier italien, disparu si jeune, propose une véritable sagesse, selon un regard décapant, toujours vrai.

L’âme – mot qui sans cesse revient le long de ces pages – connaît tourments, doutes, découragements, hésitations, et les pensées de l’auteur prennent la forme d’une étude très analytique, très clinique des soubresauts de ce cœur qui penche, qui pense, qui aime, qui doute.

Écrits entre 1908 et 1911, et partiellement parus du vivant de l’auteur, ces textes des Barques renversées avoisinent les cheminements spirituels des géants Pessoa et Proust, quasi à la même époque de gestation de leurs œuvres. Certes, aucun des trois ne connaissait les autres ; toutefois une parenté d’étude saute aux yeux. Aux intermittences proustiennes et aux cogitations multiples du Portugais répondent les pensées de Tozzi.

On est frappé par le caractère à la fois incisif et compulsif de ces notes qui dépiautent l’âme, mettent à nu les plus intimes pensées, révèlent une intelligence et une acuité de haute lice.

The Game, Alessandro Baricco (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Jeudi, 08 Juillet 2021. , dans Italie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Folio (Gallimard)

The Game, février 2021, trad. italien, Vincent Raynaud, 415 pages, 6,20 € . Ecrivain(s): Alessandro Baricco Edition: Folio (Gallimard)

 

Si l’on en croit les détracteurs d’Internet et du tout numérique, nous sommes en train de construire une civilisation virtuelle, artificielle, superficielle, décliniste, qui génère des peurs en comparaison desquelles la maîtrise du subjonctif est très rassurante. En effet, nous « roulons tous feux éteints », nous préparons une mutation anthropologique sans précédent, une véritable révolution mentale. Qu’en est-il vraiment ? Dans cet ouvrage, documenté et idéologiquement orienté, Baricco prend parti pour le numérique, séduisant et ludique, ce qu’il appelle le « Game ».

« Digital », tout comme « numérique », signifie que les informations sont traduites en chiffres par la machine. A l’emploi du terme « Internet », désignant le réseau informatique mondial, Baricco préfère celui de « Web », abréviation de « World Wide Web », ou toile mondiale, système hypertexte créé par l’informaticien Timothy John Berners-Lee en 1990 : la formule est plus dynamique, plus branchée.

Dante, Alessandro Barbero (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Vendredi, 02 Juillet 2021. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, Flammarion

Dante, Alessandro Barbero, février 2021, trad. italien, Sophie Royère, 480 pages, 28 € Edition: Flammarion

 

L’année 2021 est le 700e anniversaire de la mort de Dante, le « Poète florentin », homme d’affaires, homme de lettres, homme politique, homme passionné, qui écrivit, après Vita Nuova – roman inspiré de sa vie, qu’il rédigea entre 25 et 30 ans et dans lequel il reconstruit au printemps 1274 sa rencontre avec Béatrice, âgée de 8 ans et portant « une petite robe rouge sang » –, qui écrivit, après des traités comme le De vulgari eloquentia et Le Banquet, tous deux composés en 1304, année de la naissance de Pétrarque, et en même temps que le traité La Monarchie en 1310, l’une des œuvres patrimoniales les plus mondialement célèbres : La Comédie, plus connue sous le titre de La Divine Comédie.

Né en mai 1265, Dante (ou Durante) est issu d’une de ces riches familles d’usuriers de Florence, les Alighieri : il est Dante Alighierii, ou Dante di Alighiero degli Alighieri, l’un des Grands, des magnats, proche de la noblesse florentine. Il est le fils aîné d’un homme d’affaires décédé alors qu’il était encore un très jeune enfant. Dante et son frère Francesco sont assez riches pour vivre des rentes de leurs propriétés terriennes.

Senso, Camillo Boito (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 08 Juin 2021. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Editions Sillage

Senso, Camillo Boito, trad. italien, Monique Baccelli, 68 pages, 7,50 € Edition: Editions Sillage

Ce très court roman (novella) accomplit en quelques dizaines de pages le miracle parfait de la littérature. L’art de la narration y est porté à un sommet indépassable tant la condensation et la richesse s’épousent en un ouvrage puissant et sublime. L’histoire que raconte ce roman aurait pu, sans aucun ajout d’éléments narratifs, faire l’objet d’un ouvrage de plusieurs centaines de pages mais Boito en fait un extrait pur, chaque goutte étant chargée de sens, d’évocation, de puissance imaginative. En un volume minuscule, Boito fait vivre une grande histoire d’amour, de trahison, de vengeance implacable. En un volume minuscule, Boito dessine le portrait inoubliable d’une femme, belle, hautaine et forte. En un volume minuscule, il nous brosse la caricature d’un homme, bellâtre et veule, lâche, vulgaire, indigne.

L’histoire se présente comme un extrait du journal intime de la comtesse Livia Serpieri. La Comtesse Livia – la diariste/narratrice – est une fleur vénitienne. Elle règne sur la ville, ses canaux, ses soirées mondaines, ses salons, par sa beauté épanouie, la richesse de son mari et un esprit pétillant. Venise et ses fastes, ses artifices, font terreau à cette beauté que la vie enchante et qui enchante la vie autour d’elle dans les salons. Elle a le monde à ses pieds et un pouvoir rayonnant sur ses amis et relations, hommes et femmes.