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Critiques

L’été des lucioles, Gilles Paris

Ecrit par Martine L. Petauton , le Vendredi, 21 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Héloïse D'Ormesson

L’été des lucioles, janvier 2014, 220 p. 17 € . Ecrivain(s): Gilles Paris Edition: Héloïse D'Ormesson

 

Voilà encore un livre où c’est l’enfant qui dit « je ». Ah ! Une petite « Guerre des boutons » bis ? un livre carrément gnian-gnian, sucré – faussement dégoulinant de choses sacrées de l’enfance ? Cela semble si facile d’écrire-enfant ; un jeu de môme… et au bout, souvent, n’intéresser personne, ni gamin, ni adulte…

Sauf quand on est Gilles Paris. Lui, il connaît parfaitement (ses livres, les prix qui vont avec, sont là pour le dire) ce code, cette musique-là ; pas une seule fausse note dans sa partition ! Au point qu’on a parfois des doutes : serait-il, ce Gilles Paris, un magicien, qui a les tours qu’il faut dans sa besace étrange ? Ou, mieux, serait-il lui-même encore un enfant ? malgré les apparences – sérieuses, de l’éditeur, de l’auteur. A-t-il gardé des secrets de savoirs, d’écriture, de langage, pour – quasi parfaitement – nous embarquer chez les 10/14, aussi sûrement qu’Alice (il doit bien, du reste, la connaître un peu) traverse le miroir.

La robe des léopards, Kristopher Jansma

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 20 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Editions Jacqueline Chambon

La robe des léopards (The unchangeable spots of leopards) Trad. (USA) Laure Manceau. Octobre 2013. 363 p. 23 € . Ecrivain(s): Kristopher Jansma Edition: Editions Jacqueline Chambon

 

Jansma signe là un roman captivant, drôle et d’une grande originalité. Sur le ton de la dérision – mais chaleureuse et réjouissante ce qui, par les temps qui courent, devient rare. On est averti dès avant le début du roman :

«  Si vous pensez être l’auteur de ce livre, vous êtes prié de contacter Haslett & Grouse Publishers (New York, New York) dans les meilleurs délais. »

C’est que la question n’est pas exclue a priori : il se peut que l’un d’entre nous soit l’auteur de ce livre. Après tout. Les deux héros du livre – deux jeunes et brillants universitaires, sportifs et écrivains – jouent sans cesse avec la paternité littéraire, jusqu’à en faire un thème obsessionnel. Et Kristopher Jansma lui-même met cette question au centre de son roman. L’un écrit un livre universellement célébré. L’autre – par dilettantisme ou angoisse ? – perd tout ce qu’il écrit dans une sorte de fascination du vide. Alors il fera « carrière » de son amitié avec celui qui a réussi en littérature.

La musique des pierres, Nicolas Idier

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 20 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Gallimard

La musique des pierres, janvier 2014, 336 pages, 21 € . Ecrivain(s): Nicolas Idier Edition: Gallimard

 

« Je marche tous les jours, par tous les temps, même les nuits pluvieuses. Les villes d’Asie ne dorment jamais à poings fermés. Moi non plus, depuis le jour-sans-nom ».

Les beaux livres ne dorment jamais, comme les vagues qui viennent de si loin que l’on se demande souvent si elles ne sont pas éternelles, nées du caprice d’un dieu. L’écrivain regarde les vagues de loin, s’avance, ses pieds se posent sur mille petites pierres roulées, le corps s’élance dans le mouvement permanent de l’eau, les bras, les jambes, la tête, ce n’est pas un nageur, c’est un ange. Les beaux livres offrent au lecteur attentif aux récifs, des nuits blanches et calmes, des nuits dessinées au pinceau avec grande attention, comme les pierres de Liu Dan qui s’élancent dans le mouvement du Temps chinois, le Temps éternel qui est à bien l’embrasser, la plus belle des révolutions. Les beaux livres ne dorment jamais les pages fermées, elles s’ouvrent comme des fleurs du désert, pierres de sables qui glissent entre les doigts, et ne retombent jamais en poussière.

L’assassinat d’Elsa, André Rollin

, le Mercredi, 19 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Le Cherche-Midi

L’assassinat d’Elsa, janvier 2014, 159 pages, 16 € . Ecrivain(s): André Rollin Edition: Le Cherche-Midi

 

Comme les poupées russes, L’assassinat d’Elsa est un roman dans le roman. Le libraire Patrice Quentin a été engagé, dans les années 70, par Louis Aragon pour signer un roman à sa place. Il devait y raconter l’assassinat de sa femme, Elsa, que le poète a étouffée avec un coussin. Rouge évidemment, quand on s’appelle Aragon.

L’inspecteur Michaloir, policier qui ambitionne d’écrire un polar, habite en face de la librairie de Quentin ; il enquête sur la mort d’Ernest Tation (de métro ?), éditeur qui a été étouffé par un manuscrit. Michaloir, pour concrétiser son rêve vient d’ailleurs chaque semaine acheter un roman policier à Quentin mais cela ne stimule guère son inspiration.

Dernier personnage, Salomé. Rien à voir avec l’excitée qui veut la tête de Jean-Baptiste. Fille de Michaloir, Salomé est une grande lectrice qui observe le fantasque libraire Quentin de la fenêtre de sa chambre à coucher et lui rend souvent visite pour lui acheter des romans qui n’existent pas. Salomé s’ennuie mais elle comprend la vie avant tout le monde. Privilège de la jeunesse, sans doute.

Paint it black, Graeme Thomson

Ecrit par Guy Donikian , le Mercredi, 19 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Payot Rivages

Paint it black, quand la mort rode dans le blues, le rock, le rap et la country, décembre 2013, 266 p. 20 € . Ecrivain(s): Graeme Thomson Edition: Payot Rivages

 

On a déjà beaucoup écrit sur les musiques populaires qui depuis plusieurs décennies ont contribué à créer l’environnement sonore que nous connaissons aujourd’hui. Les progrès techniques qui ont ponctué tout le vingtième siècle ne sont pas pour rien dans la diffusion à grande échelle d’une musique, ou plutôt de musiques qui ont déferlé sur les ondes. Que de chemin parcouru en effet depuis les rouleaux sur lesquels le début du vingtième siècle a gravé de rares témoignages musicaux jusqu’aux téléchargements actuels qui font malheureusement de la musique un bien de consommation comme un autre. C’est ce contexte qui sert de cadre à cet essai dont le titre donne justement le ton. Paint it black, le titre des Stones, trouve sa justification dans le sous-titre. Tout est donc dit ou presque. L’essai veut mettre l’accent sur les rapports qu’ont entretenus et qu’entretiennent encore ces musiques avec la mort, en remontant parfois jusqu’au début du vingtième siècle qui semble constitutif de la genèse de la présence de la mort dans les paroles du blues par exemple.