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Critiques

L’année de Richard suivi de Mais comme elle ne pourrissait pas… Blanche-Neige, Angelica Liddell

Ecrit par Marie du Crest , le Jeudi, 13 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Théâtre, Les solitaires intempestifs

L’année de Richard suivi de Mais comme elle ne pourrissait pas… Blanche-Neige, traduction de C. Vasserot , 94 p. 13 € . Ecrivain(s): Angélica Liddell Edition: Les solitaires intempestifs

 

L’autre trilogie : Actes de résistance contre la mort

De Schneewittchen à Blancanieves

 

Y como no se pudriò… Blancanieves est une courte pièce composée de 8 scènes, publiée en Espagne en 2007, faisant partie de la trilogie d’A. Liddell avec l’année Richard et Et les poissons partirent combattre les hommes. Dans l’édition française des Solitaires Intempestifs, elle fait suite à la pièce dont le personnage central est un avatar de Richard III. Comme dans d’autres textes, l’auteure revient à l’enfance, point de fracture entre innocence et plongée dans le Mal. E comme enfant selon son abécédaire :

« Je n’ai pas connu un seul enfant qui soit devenu un bon adulte ».

La Grande Fête sans fin, Jean Hans Arp

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 11 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Arfuyen

La Grande Fête sans fin, janvier 2014, 13,50 € . Ecrivain(s): Jean Hans Arp Edition: Arfuyen

 

Le poème-vie

C’est avec une vraie attente que j’espérais le livre de Jean Arp, recueil de poèmes venus de l’allemand, langue qui est une des langues maternelles du poète. Et ce que l’on sent tout de suite, même en français, c’est la vitalité du rythme et de la prosodie. On n’y sent pas un homme appesanti par l’âge ni sommeillant dans une routine poétique. C’est l’effet de vie, et presque de violence, qui entête le lecteur et je trouve que cette force esthétique un peu iconoclaste va bien aux cinq recueils qui constituent l’ouvrage.

Cela dit il faut expliquer la vie, le caractère vital qui sourd du recueil. Et tout d’abord par l’impression de mouvement, impression que rien n’est statique, que tout est tendu, instable, susceptible de grandir ou de se rompre, de se dilater. J’ai d’ailleurs commencé cette lecture à l’écoute de La Mer de Debussy, et je me dis maintenant qu’il n’y a pas tout à fait de hasard et que cette poésie se rattache peut-être d’avantage à la musique française, et notamment à Erik Satie, avec ses Gymnopédies par exemple.

Jour, Jean-Jacques Marimbert

Ecrit par Martine L. Petauton , le Lundi, 10 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Carnets du dessert de lune

Jour, juin 2013, 59 pages, 10 € . Ecrivain(s): Jean-Jacques Marimbert Edition: Carnets du dessert de lune

 

En poésie, il y a tant de manières d’aborder, de lire, d’aimer… et tant d’émotionnel dans cet exercice-là ! Ceux, par exemple, qui vous diront tout de l’architecture, des chemins qu’empruntent ces mots à part du reste des écritures, qui analysent, conceptualisent et vous « disent » – sans contestation aucune – le sens, le vrai, le définitif. Ceux qui sauront, presque immédiatement, les ponts si évidents, disent-ils, avec cet autre immense poète, et qui intimident au point de nous laisser à la porte de leur précieuse chapelle. Et puis, il y a ceux qui veulent voyager en poésie, à leur rythme, comme ça leur chante ; ceux qui vont au pays des vers, comme au concert, pour la musique, le voyage, le coup au cœur. Ceux qui la lisent, cette poésie, à mi-voix, et l’emportent partout en promenade, pour en savourer deux ou trois vers, ici ou là, comme deux tranches de mandarine d’hiver…

Jean-Jacques Marimbert – sa biographie le dit – est un homme à plusieurs vies, donc, un poète !

Les exploits d’un jeune Don Juan, suivi de Les Onze mille verges, Guillaume Apollinaire

Ecrit par Frédéric Aribit , le Samedi, 08 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Contes, Rivages poche

Les exploits d’un jeune Don Juan, suivi de Les Onze mille verges, 2013, préface de Christelle Taraud, 284 p. 7,65 € . Ecrivain(s): Guillaume Apollinaire Edition: Rivages poche

 

Rien n’est aussi contagieux que le sexe. Les moralistes de tout poil, qui n’ont souvent été à cheval que sur les principes, le savent bien qui, siècle après siècle et de quelque bénitier qu’ils se réclament, se sont acharnés à interdire ces « livres qu’on ne lit que d’une main » dont parlait Jean-Jacques Rousseau. Qu’il y ait là, dans ces pages, quelque chose qui plonge au plus profond de l’indicible, qui nous ramène au fond de ces désirs aveugles, informulables, inavouables, et où l’on retrouve le corps immédiat de l’autre, dans cette disponibilité réciproque où l’on pourrait mourir, bref qu’il s’agisse d’une liberté d’être à laquelle personne n’est jamais obligé, mais où l’humanité entière se donne toujours son rendez-vous nocturne, de quelque façon qu’elle l’accepte ou qu’elle le refuse, tout cela n’y aura jamais rien fait. Les interdictions continuent de tomber comme des couperets.

Cent vingt et un jours, Michèle Audin

Ecrit par Martine L. Petauton , le Samedi, 08 Février 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Gallimard

Cent vingt et un jours, décembre 2013, 184 pages, 17,90 € . Ecrivain(s): Michèle Audin Edition: Gallimard

 

Nombres ; chiffres ; raisonnements. Mathématiques. Michèle Audin est ainsi construite ; ses écritures aussi. Pour autant, poésie – ô combien ! sentiments, humanité surtout – donc, littérature, se sont invités au banquet de ce petit livre dense, poignant, dont le titre Cent vingt et un jours est, du reste, écrit, mais non posé en langage mathématique.

Cela aurait pu être un recueil de nouvelles, dont les chapitres auraient porté le nom de ceux, nombreux et bien campés, qu’on croise dans ce reflet du fleuve du siècle dernier. Enfer brumeux que visiterait Orphée, où divaguent ceux de la Grande Guerre et ceux de la terrible Seconde, brisés, bourreaux ou carrément perdus ; parfois, tout ensemble… Mais c’est un roman-récit, et non des nouvelles, qu’a préféré Michèle Audin, la mathématicienne, qui fréquente aussi – et, plutôt bien – la façon si particulière de penser et de travailler des historiens. Elle n’a pas voulu de ce mot « fin » au bas des chapitres, de ces mini histoires bouclées. Son récit a besoin du temps long, décliné et repris d’un bout à l’autre des pages, sans presque reprendre son souffle, comme un immense problème, dont on ne sait au final s’il peut se résoudre, et qui va son chemin, raisonné, rassemblant ses données, n’en oubliant aucune, cherchant les preuves, les vérifiant, les additionnant au fil de l’Histoire. Comptabilité unique ; scansion des malheurs.