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Les Chroniques

Le 11 septembre permanent et ses effets calculés, par Kamel Daoud

Ecrit par Kamel Daoud , le Mardi, 17 Novembre 2015. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

La nuit tombe très tôt à New-York. Et c'est sur le pont de Manhattan, dans un taxi, que le chroniqueur a essayé de trouver des mots après avoir appris que Paris brûle. Difficiles à trouver dans le débris de la stupéfaction. Les immeubles de Manhattan, reflétés par les eaux, étaient brillants mais l'esprit était obscur derrière la vitre de la voiture qui déroulait le monde nocturne. Une première pensée, fulgurante, pour les morts, les siens, ceux que l'on connaît. Ce sont des quartiers fréquentés par des amis. Et soudain, la peur devient sécheresse. Comme on l'a longtemps éprouvé en Algérie durant les années noires : on est en deuil, au début, puis la mort revient si souvent qu'elle provoque le dessèchement. Puis arrive l'autre peur, égoïste mais humaine : quelle est la nationalité des tueurs ? Non pas qu'ils en aient une, mais parce que le couteau tue la victime mais aussi le pays où il a été fabriqué : des tueurs parmi les refugiés accueillis en Europe ces derniers temps, signifiait des dizaines de morts en France mais des portes fermées en Europe. Cela voulait dire la fin de l'accueil, le repliement du monde et donc la fin du monde pour ceux qui fuient la guerre. C'est la catastrophe de la solidarité et le triomphe des extrêmes. Un Occident noir, clos, en colère et qui refusera de partager ou d'éclairer. L'Occident est coupable d'humanité et de crime contre l'humanité : il est sujet et objet. Désir et refus. On veut le tuer et nous mourrons en même temps. On veut y vivre mais ne pas l'accepter.

François Ier, Roi de France, Roi-Chevalier, Prince de la Renaissance française, Max Gallo

Ecrit par Vincent Robin , le Mardi, 17 Novembre 2015. , dans Les Chroniques, La Une CED

« Mon Dieu que t’ai-je fait ? En quoi t’ai-je déplu de m’avoir fait celui par lequel la chrétienté pouvait demeurer en repos » (p.349). Quand l’histoire surgit aux trois-quarts des présomptions, des états de conscience et du dialogue intérieur de ceux qui y prirent part, sa reconstitution ne saurait dépendre uniquement du recensement des marques physiques laissées par eux dans le marbre. Chambord ou Chenonceau ne sauraient de cette manière témoigner d’un savoir de bâtisseur glorifiant à jamais la pierre et sa sculpture éblouissante en-dehors de tout projet humain. Par extension, reconstituer l’agencement des temps anciens ne peut se réduire aux réassemblages de pièces mécaniques exhumées par l’archéologie pour remettre en action virtuelle la machine des déroulements antérieurs. Il nous est indispensable de connaître l’âme de ceux qui en furent les concepteurs et les agenceurs.  Habile sous cet angle et pour donner un sens aux extractions, dans le rôle d’un dénicheur de latences et décrypteur de filigranes, dans l’emploi délicat du littérateur-rassembleur doublé de l’historien à la connaissance solide, Max Gallo s’inscrit sûrement parmi nos précieux analystes et rapporteurs actuels de la trame du temps. Il est pourtant celui à qui certains puristes de « science froide » reprochent parfois sa propension lyrique et narrative, sous ce pli, le détournement d’un genre ou encore ses distances prises avec les institutions sacrales du « vrai de la discipline ». N’est toutefois pas qui veut, ni académicien ni maître de plume, a fortiori passeur de mémoire !

Deux livres de Ernest Pignon-Ernest et André Velter

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 13 Novembre 2015. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

 

Pour l’amour de l’amour, Figures de l’extase, Ernest Pignon-Ernest, André Velter, Gallimard, octobre 2015, 176 pages, 35 €

Dans la lumière déchirante de la mer, Pasolini assassiné, Ernest Pignon-Ernest, André Velter, Karin Espinosa, Actes Sud, novembre 2015, 80 pages, 25 €

 

« Elles étincellent à force d’être livides. / Elles sont au monde pour se libérer du monde. Elles souffrent d’une famine qui creuse plus que la faim. / Elles s’inventent un ciel infernal qui a un goût d’azur calciné ».

Carnets d’un fou – XXXII - Septembre 2015, Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Vendredi, 06 Novembre 2015. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

« Le pré est vénéneux mais joli en automne

Les vaches y paissant

Lentement s’empoisonnent

Le colchique couleur de cerne et de lilas

Y fleurit tes yeux comme cette fleur-là… »

Guillaume Apollinaire

 

# Préalable : ce Carnet de septembre 2015 – faits d’actualité obligent – tient grand compte des événements récents liés au Moyen-Orient, au monde de l’islam et aux bouleversements qui en découlent. Je sais qu’ici s’agitent et se fatiguent les esprits.

De l’art de ne rien faire face à Daech et ses prêcheurs, par Kamel Daoud

Ecrit par Kamel Daoud , le Mardi, 03 Novembre 2015. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Sur une plage, sous le soleil dur, entre le sel et la solitude, un homme prend une arme et tire sur des touristes. Vieille fable de la littérature. Sauf que le tireur n’est pas un étranger. Les victimes le sont. A Tunis, le carnage va coûter, au-delà des vies irrécupérables, l’économie d’un pays fragile : misère, pain noir et chômage arrivent. C’est en gros l’idée de Daech international : provoquer la pauvreté, ruiner les pays puis annoncer la fin du monde et recruter les hallucinés de la peine et de la faim. La Tunisie, ce bel exemple contre nos fatalismes, a été touchée au cœur, cette fois, et la facture sera lourde. Sauf que ce Daech s’étend, conquiert, recrute. En Algérie, on y appelle déjà à l’ouverture d’une ambassade, un journaliste propose d’effacer l’étoile de sur notre drapeau pour la remplacer par « Allah ouakbar », sur certaines enseignes de pharmacies, le signe du serpent du Caducée a disparu, ne subsiste que le croissant, des éditos sont publiés pour expliquer que Daech est un barrage contre les sionistes et l’Occident, la daéchisation est en marche. D’où la question, l’unique question : que faire ? A cela on y répond différemment.