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Les Chroniques

Les Cavales, 2, Hervé Micolet (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 02 Juin 2025. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Les Cavales, 2, Hervé Micolet, éd. La rumeur libre, 236 p., 2025, 20 €

 

Je résumerais l’essentiel du dernier recueil d’Hervé Micolet, tentative profuse et audacieuse, par le terme de plain-chant. Car, ce n’est pas un rhapsode qui écrit, mais un musicien qui compte avec exactitude le rythme voulu du poème, d’un chant à une voix. Les poèmes sont donc résolument tournés vers des formes anciennes ou archaïques. On est davantage à la Renaissance ou l’Antiquité que dans une écriture post-moderne (à moins que cette tentative signifie justement une post-modernité). J’admire le travail dont ce livre fait l’objet, lequel conserve une cohérence et une continuité où l’on devine un labeur important, un travail où chaque strophe pourrait s’apparenter à un neume. Cette « partition » est tournée vers un ailleurs, un autre temps (et l’on sait que l’œuvre d’art met en danger le temps). En bref, c’est une langue voluptueuse et recherchée.

Un certain goût d’opiniâtreté (Journal 1991-1996) précédé de Journal reconstitué (1986-1991), Alain Marc (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 28 Mai 2025. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Un certain goût d’opiniâtreté (Journal 1991-1996) précédé de Journal reconstitué (1986-1991), Alain Marc, Éditions Douro

Une écriture cathartique, afin d'opiniâtrement résister aux vents et marées. Le Phare : la Littérature (le lirécrire), avec ses "phares allumés" (Baudelaire). Dans ce deuxième livre publié chez Douro, le poète-écrivain Alain Marc –auteur d'un essai remarquable et remarqué : Écrire le cri (préfacé par Pierre Bourgeade) puisqu'il remonte jusqu'à la source de l'Ecrire– exprime sa persévérance au sein de la matière brute et noire de la Littérature en tant qu'écrivain et lecteur, matière subtile coexistant avec celle baryonique, ordinaire. Par son influence gravitationnelle, alchimique et ascensionnelle, la Littérature émet des voix sidérales énergiquement influentes sur le monde observable. Son agonie actuelle serait comme un refroidissement jusqu'à l'invisibilité d'une naine blanche... Mais le poète, opiniâtrement debout, reste dressé jusqu'à se brûler sur cette extinction progressive, dressé sur les traces incandescentes d'une Littérature aujourd'hui en berne. C'est bien plutôt son cheminement ardu d'écrivain que nous suivons ici, avec ses aléas, semé d'embûches et de ses difficultés en Littérature à avancer, à pouvoir voir propulser son œuvre dans la lumière publique.

Ils disent qu’il y a un remède, Dorian Masson (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 26 Mai 2025. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Ils disent qu’il y a un remède, Dorian Masson, éd. de Corlevour, 127 p., 2025, 18 €

 

Présence

Dans ce recueil de poèmes de Dorian Masson, nous sommes en face d’une présence. Présence du poète, mais dédoublé bien souvent par la présence d’une aimée, d’un autrui, d’un Autre au sens fort du terme, c’est-à-dire capable de restituer entièrement la présence de l’Autre en soi, de l’imager jusqu’à l’ipséité. Donc, un autre, une autre constitutive de la personnalité de l’identité de soi.

Le recueil mêle l’omniprésence de la personne du poète (avec sans doute un degré de narcissisme qui rend vive cette poésie) au milieu d’une expérience unique de l’amour partagé, unique et qui autorise à juguler la compagnie de l’autre, compagnie à la fois physique et métaphysique, rencontre tout autant physique que sur le papier du poème. Car cette écriture tente de retarder l’heure de l’absence. Que cela soit autour d’un TU que d’un Vous, autrui est un horizon d’attente.

Parias, Hannah Arendt et la “tribu” en France (1933-1941), Marina Touilliez (par Marie-Pierre Fiorentino)

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Mercredi, 21 Mai 2025. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Parias, Hannah Arendt et la “tribu” en France (1933-1941), Marina Touilliez, Editions L’Echappée, octobre 2024, 500 pages, 24 €

 

« Ami entends-tu… »

Joseph Kessel et Maurice Druon,

Le chant des partisans.

Ce livre, très richement documenté et agrémenté de photographies dans une mise en page et une graphie élégantes, repose sur la tension bien équilibrée entre biographie et histoire. En effet, Marina Touilliez raconte comment des réfugiés, pour la plupart Allemands et Juifs, pris en otages entre le totalitarisme nazi, vite et fermement établi en Allemagne, le totalitarisme en gestation du régime de Vichy et même celui stalinien à travers des persécutions orchestrées à distance, comment, donc, plusieurs de ces hommes et de ces femmes forment en France, à partir de 1933, une « tribu ». De ces huit années pourtant, Arendt trouvera encore, à la fin de sa vie, la force de déclarer qu’« elles furent assez heureuses ».

Ainsi Parlait Goethe, Roland Krebs (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 20 Mai 2025. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Arfuyen

Ainsi Parlait Goethe, Arfuyen, trad. allemand, Roland Krebs, bilingue, 190 pages, 2025, 14 €

 

Esprit

Il est difficile de résumer en quelques lignes le massif conceptuel que représente la poésie de Goethe. Je dis cela sans considérer la portée historique du poète allemand ni son importance pour le passage de l’esthétique classique à celle du romantisme. Je ne veux ici que resserrer son importance par un simple mot : esprit. Car à mon sens, sans entrer dans des considérations analytiques ou linguistiques, c’est le mot esprit qui est le plus fort et qui rejaillit le plus fortement dans ses dits et maximes, une pensée ample, concentrée, fine. L’on ressent à cette lecture une impression souveraine de maîtrise de soi, d’une manière de style, un entendement qui se joue des coupures et des contradictions, jusqu’à se condenser dans l’idée, le côté solaire de l’idée platonicienne.