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Poésie

Sillons, Laura Tirandaz, Judith Bordas

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 11 Avril 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts

Sillons, Aencrages & Co, coll. voix de chants, avril 2017 (pas de pagination), 18 € . Ecrivain(s): Laura Tirandaz, Judith Bordas

 

Les linogravures de Judith Bordas jouent de quelques couleurs (bleu délavé, lie de vin, orange, jaune…) pour matérialiser flou, personnages, empreintes sur une plage, avec un rendu proche des papiers peints.

Tissant texte et œuvre graphique, la maison d’édition, spécialisée en poésie, propose ici le travail en prose poétique de Laura Tirandaz, entre récit d’un œil ambulant, sensations naturalistes et descriptions d’un petit monde qui circule à l’heure des vacances, dans ce port non nommé, au bord de la Grande Bleue.

L’œil ethnographe enregistre tout : un homme réfugié sur le sable, des « pissotières », un marché qui se monte, la circulation de l’air, des gens, le ciel et ses « mouettes (qui) jouissent du spectacle », une mère et son enfant, le regard s’appuie, décèle, pointe, scrute, les étals, les mains, un retour au passé (par le biais d’une stèle commémorative « Morts en Algérie »). La prose, non ponctuée, sert excellemment le propos d’enregistrer au kilomètre, à la chaîne, les impressions, les rendus, quitte à réserver entre les lignes des motifs d’émotions.

J’ai vingt ans, Matthias Vincenot

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 10 Avril 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

J’ai vingt ans, éditions Fortuna, mars 2018, 68 pages, 10 € . Ecrivain(s): Matthias Vincenot

 

 

La poésie de Matthias Vincenot s’exécute comme une chanson nous insufflant l’air qui manque, une nostalgie douce comme le refrain d’une mélodie que l’on fredonne encore, avec du sang neuf dans les circuits / « dans les anfractuosités de la mémoire » parfois ombrageuses, dans le flux de nos artères, de nos escapades et par toutes les veines du poème.

« J’ai vingt ans », affirme le poète Matthias Vincenot, le temps après tout n’étant (presque) qu’accessoire, puisque seules comptent les minutes d’enchantement qui nous maintiennent en apesanteur ; puisque l’on garde l’âge intemporel de ses vingt ans tant que le cœur bienveillant offre la possibilité des rencontres accueillantes, des roses, des sourires et des durables choses. Ainsi ce sentiment d’« Être parmi nous » qui fédère les amitiés :

Par là, Estelle Fenzy

Ecrit par France Burghelle Rey , le Vendredi, 06 Avril 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Lanskine

Par là, février 2018, 72 pages, 12 € . Ecrivain(s): Estelle Fenzy Edition: Editions Lanskine

 

Le titre du nouveau recueil d’Estelle Fenzy, comme ceux des précédents, interpelle le lecteur par sa brièveté et l’amène à suivre le chemin qu’il indique. Dès l’incipit la poète plante les premiers germes d’un conte cruel puisque « les ailes oublient leurs anges » et qu’une enfant peut se transformer en « monstre avide ». La nature, elle aussi, prend part au drame dans un vers éponyme du titre de la première partie : « Le vent sème des grains noirs » quand les saules alors « supplient à genoux la rivière ».

Le texte monte ensuite, tel un cauchemar, en crescendo jusqu’à l’expression oxymorique « les traces féroces de la joie ». Mais, par bonheur, L’enfant-sorcière « libère » aussi de la beauté car elle est poète : elle « écrit dans une langue impossible à comprendre ». Allégorie de toutes les formes de création, elle est en fusion avec la nature. Des parties descriptives et un récit au présent donnent à vivre ce phénomène au lecteur qui lit, le souffle coupé, et découvre que les êtres animés et inanimés se transforment « Par là » sous l’effet de ce miracle :

Au fil des songes, Intissar Haddiya

Ecrit par Patrick Devaux , le Mercredi, 04 Avril 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Maghreb

Au fil des songes, éd. St Honoré, décembre 2017 (méditation philosophique), 64 pages, 8,90 € . Ecrivain(s): Intissar Haddiya

 

Intissar se veut souffle. Tout, dans ces textes courts à consonance philosophique, commence par le texte d’un autre qu’on peut deviner Souffle, Inspiration, le quotidien étant sacralisé d’une certaine façon : « On m’a parlé de ce livre Que je ne connais pas Ecrit par un autre que moi ».

Rendre la vie prévisible et partage de soi à travers les autres, voilà bien la démarche de cet auteur également romancière.

C’est que la sagesse apprise, les livres et la mémoire des ruines sont importants dans la forge d’un destin bâti sur des références solides.

Presque un texte de remerciements puisque « l’aube se lève sur des plaines basanées ».

Magie des couleurs ; poème sonore avec des vibrations de ciel.

La nuit ne se tait pas, Danièle Corre

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 03 Avril 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

La nuit ne se tait pas, Éditions Tensing, 2013, 87 pages, 9 € . Ecrivain(s): Danièle Corre

 

Paru aux Éditions Tensing en 2013,La nuit ne se tait pasde Danièle Corre accueille en ses lignes vives l’obscurité lumineuse sous-tendant la toile nocturne. Toile tendue dans l’écoute d’une écriture elle-même lumineuse (ainsi que Charles Dobzynski qualifia l’écriture de la poète dans Aujourd’hui poèmeen octobre 2006).

Les mots de Georges-Emmanuel Clancier cités en exergue, extraits de Vive fut l’aventure, en appellent à la Terre et sa lumière (« Terreta lumière// qu’elles’étendede cercleen cerclesans fin// et chante »). Vêtus d’impatience nous tentons, écrit Danièle Corre, d’« égratigner de lumièrenos pans de nuits », besogneux d’un espoir incessant, tous nos sens à l’affût, nous tenant inlassablement à chaque jour recommencé « sur une nouvelle parcelled’espace une autre plate-forme du temps ». Le souffle de nos veilles est semblable à cette lueur que l’appel d’air n’étouffe pas, qu’un excès d’oxygène ou d’attente suffirait à consumer ou éteindre. Au cœur de La nuit(qui) ne se tait pas, l’étincelle d’un souffle soutient nos regards, parcourant les palpitations d’une douceur d’être