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Les Livres

Supplique pour la fin des nuits sans lune, Laurence Fritsch (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 12 Septembre 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Supplique pour la fin des nuits sans lune, Laurence Fritsch, Pierre Turcotte Éditeur, Coll. Magma Poésie, mai 2023, 78 pages, 9,99 €

Par « une sorte de loi de la gravité paradoxale » ainsi que la définit le poète argentin Roberto Juarroz qui en fait le parangon de son œuvre, l’existence des hommes incline inévitablement vers la chute et, symétriquement, ressent un élan qui la tire vers le haut. C’est ainsi que l’homme peut abîmer le précieux qui l’entoure, sans mesurer les conséquences de sa négligence ou ignorance ; et se ressaisir. La lune n’y échappe pas, ici victime d’effets néfastes, satellite de la Terre éloigné de nos attentions pour cause d’intempéries, de pollution lumineuse, par convoitise économique aussi ; là – en l’occurrence par la grâce de ce recueil – objet de nos soins.

Ce premier recueil de Laurence Fritsch, intitulé Supplique pour la fin des nuits sans lune, vise en effet à nous alerter par ses poèmes instantanés du danger encouru à laisser s’établir l’éloignement de la lune. Ces poèmes, certains chargés de mystère d’autres plus intimistes et porteurs souvent de plusieurs clés de lecture, tentent par leur trait fulgurant ou leur charge suggestive d’exaucer ce que l’auteur de Poésie Verticale, cité en exergue du recueil, évoque dans sa Treizième poésie verticale : « (…) interrompre tout ce qui s’écroule : / la lumière, l’eau, l’amour / la pensée, la nuit ».

Le Rire ou la vie, Anthologie de l’humour résistant 1940-1945, Alya Aglan (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 11 Septembre 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard), Anthologie

Le Rire ou la vie, Anthologie de l’humour résistant 1940-1945, Alya Aglan, Folio, avril 2023, 304 pages, 9,20 € Edition: Folio (Gallimard)

La création autour de la Résistance, contemporaine ou postérieure à celle-ci, est la plupart du temps placée sous le signe de la tragédie, celle d’une violence subie mais à refuser, ou, plus rarement, de l’espoir. Les auteurs, poètes, romanciers ou cinéastes, plus rarement musiciens, peintres ou sculpteurs, témoignent de l’horreur de l’Occupation ou disent leur désir que persiste le Beau dans le Laid, en témoigne en particulier la magnifique anthologie La Résistance et ses poètes (France 1940/1945) publiée par Pierre Seghers pour la première fois en 1974. Espoir : Liberté, de Paul Éluard, parachuté à des milliers d’exemplaires sur la France occupée ; tragédie et pourtant désir de vivre dignement, Je trahirai demain, de Marianne Cohn :

Je trahirai demain pas aujourd’hui.

Aujourd’hui, arrachez-moi les ongles,

Je ne trahirai pas.

Cristina, Paloma Hermine Hidalgo (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 11 Septembre 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Cristina, Paloma Hermine Hidalgo, Le Réalgar-Éditions, juin 2023, 80 pages, 12 €

 

Effloraison

Étrange livre de poésie qui souligne à la fois la présence de la nature, des fleurs, des plantes, des paysages et aussi d’une douleur venue de l’enfance, et peut-être d’une espèce de secret violent qui hante le sous-texte du recueil. C’est à un jardin d’Éden que nous sommes conviés, paradis d’avant et d’après la Faute. Car il y a du sang sur les bras du frère ou du père (?), des scènes qui suggèrent un état de sexualité infantile. Nous sommes décidément dans un monde proustien. La remémoration. Le souvenir habité comme état de l’être. Violence de la vie peut-être tout simplement. Je dis là l’explosion de la graine qui germe, cette « violence » amoureuse des périls.

Il baise mes oreilles, plonge la bouche pâteuse. Corps-à-corps avec l’anchois, le tabac fané. La carrière est béate de chaleur. La herse s’enfonce. Il m’enlise dans le foin, l’avoine, la nielle. La fauche me creuse, me prend. Aine, aisselles moites. La mort entre mes jambes est une brassée d’azur.

Le Docteur Jivago, Boris Pasternak (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 08 Septembre 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Russie, Roman, Gallimard

Le Docteur Jivago, Boris Pasternak, Gallimard, mai 2023, trad. russe, Hélène Henry, 704 pages, 26 € Edition: Gallimard

 

Quelle belle et opportune incitation à relire (ou à lire) une œuvre figurant, à juste titre, au patrimoine universel de la littérature que cette réédition par Gallimard au prétexte justifié d’une nouvelle traduction ! Il serait sans doute fort intéressant, pour un universitaire, pour un fieffé lettré, pour un critique érudit, tous fins connaisseurs de l’œuvre et capables de lire le texte original, de comparer cette version française à celles qui l’ont précédée, en particulier et en priorité à la plus courante, celle parue, déjà, chez Gallimard en août 1958, non signée mais dont les quatre traducteurs qui en avaient assumé la charge sont identifiés.

L’objectif du présent article est infiniment plus modeste : il ne s’agit que de recenser dans notre magazine cette nouvelle édition, présentée dans son beau volume, afin de susciter ou de ressusciter chez tout lecteur de la rubrique l’envie de se laisser emmener, emporter, transporter :

- Dans un étonnant, étourdissant, passionnant voyage de sept cents pages au long, en large et au travers des immensités russes, dans la profonde intimité de leurs paysages changeant au fil des descriptions, savoureusement poétiques, de variations saisonnières continues ;

Lits, Demain je vais alors m’absenter, Jean de Breyne (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 08 Septembre 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Lits, Demain je vais alors m’absenter, Jean de Breyne, Propos Deux éditions, avril 2023, 118 pages, 14 €

 

« c’est pour se lever oui,

il faut déplier le corps

couché horizontal rouler

sur soi jeter les jambes.

je porte ma main là

au point de la douleur,

je lève la tête, la lumière

le jour est levé, est autre,

c’est le jour des décisions,

c’est bien un jour du réel,