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La Une CED

La plus haute réussite de l’Occident sur les « Arabes »

Ecrit par Kamel Daoud , le Vendredi, 06 Décembre 2013. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Nuit éclairée et douce à Bellinzona. Capitale minuscule du Tessin, la Suisse italienne. L’été n’est pas encore clos par les feuilles mortes et les vestes. Des gens se promènent au sortir du théâtre où un groupe targui avait donné spectacle. Un jet d’eau sombre et argenté éclaire l’obscurité. Des gens qui déambulent sur des gazons. C’est l’Occident dans toute sa verdure, juché sur le dos de la terre, calme, riche et béni par les dieux de sa raison et de son culte de l’exactitude et de l’effort. Ce qui frappe ? Pas l’absence des sachets bleus, fruit de notre conception détestable de l’environnement. Pas les voitures qui s’arrêtent au passage du piéton qui, ici, a les droits du roi. Pas les rues belles et l’air propre qui ressemble à un dessert et rajeunit le poumon.

C’est autre chose, à chaque fois vécue, subie mais toujours étonnante pour nous peuple des autrefois : le rapport entre l’homme et la femme. Serein, calmé, égal. Les deux sexes se côtoient sans être obsédés par les jeux de domination, de violence, de préséance. L’enjeu n’est pas de se vaincre l’un par l’autre. Ce n’est pas un rapport de force. La femme n’est pas traquée, recluse, accusée d’avoir un corps et désirée parce qu’elle n’a qu’un corps. Elle n’est pas obsession et l’histoire n’est pas préhistoire. On l’oublie mais c’est ce qui fait la force de l’Occident : la moitié de sa population n’est pas une honte, un butin ou une humanité de seconde zone, faite pour la procuration et le rapt.

Le Ruisseau, l’éclair, Laurent Albarracin

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 05 Décembre 2013. , dans La Une CED, Les Dossiers, Etudes

Le poème, le poète


Je sors à l’instant de la lecture du recueil des 56 poèmes que publie Laurent Albarracin chez L’éditeur Rougerie, livre qui garde la sobriété et l’élégance que l’on connaît de la maison de Mortemart. Nonobstant, j’ai éprouvé très vite le charme de la locution courte de l’éclat soudain et resserré et aussi la tendance à la raréfaction. Voilà un livre entier construit sur le peu, le juste ce qu’il faut de mots pour faire exister le poème et qui, cependant, permet d’entendre le poète, lequel n’est pas incolore dans sa poésie. Je connais un peu Laurent, et j’ai vu dans ce ruisseau et cet éclair certains traits qui font miroir de son âme profonde, peut-être. Je pense à ce poème :

L’éclair m’a planté

un brin d’osier dans le cœur

Depuis je le tresse

pour cueillir l’écume des rivières

52.dimanche (XXXIX)

Ecrit par Didier Ayres , le Samedi, 30 Novembre 2013. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

le corps

quelle place, à quel degré, où et comment ?

un corps clos, fermé, sans continuation

ce corps-là, seul, est celui qui existe, en vérité

un corps non écrit, invalide, impropre à rester au milieu de la page ?

car écrire, de toute évidence, au contraire peut-être de la peinture, évacue, fait disparaître, anéantit, défait ce que le corps produit comme élocution, humeurs, au profit de quelque chose d’inorganique

forme de présence qui s’efface mais qui cependant ne disparaît pas, mais se constitue comme éclipse, comme un discours qui s’interpose

Souffles - Histoire à la première personne du singulier !

Ecrit par Amin Zaoui , le Mercredi, 27 Novembre 2013. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Après la lecture du livre À Contre-voie, Mémoires d’Edouard Saïd, le philosophe et penseur palestinien, je me suis dit : l’histoire des nations, avec sa complexité et sa luminosité, réside dans les historiettes et les détails relatés dans les écrits qui ont trait au « je », au « moi ». Certes, écrire sur le « je », le « moi », est un énorme risque. Ecrire « le moi » c’est comme marcher pieds nus sur une lame de rasoir. L’écriture du « moi » est souvent accusée d’égoïsme. Egocentrisme. Ou de falsification préméditée.

La lecture du livre À Contre-voie, Mémoires d’Edouard Saïd m’a fait penser aux quelques écrits biographiques, autobiographiques ou mémoires, publiés ces dernières années en Algérie. Je ne parle pas, ici, des écrits des hommes du premier rang du pouvoir. Ceux qui font appel aux nègres pour l’écriture. Ceux qui ont, aussi, de bons nettoyeurs de la mémoire ! Je ne parle pas de ceux qui élèvent des chiens renifleurs. Des chiens qui détectent les mots explosifs et désamorcent les événements dérangeurs ! Ici, je fais allusion à ceux qui, d’abord, savent comment écrire. Ceux qui sont capables de penser à travers l’écrit. Ceux qui n’ont pas peur de la magie ni de l’effet « Trace ». Ceux qui savent comment se libérer de l’oralité et de la rhétorique.

A propos de "Galaxies intérieures" d'Anise Koltz

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 25 Novembre 2013. , dans La Une CED, Les Dossiers, Documents

Galaxies intérieures, Anise Koltz, ed. Arfuyen, octobre 2013, 10 €

 

Dilatation


Je m’arrête un instant dans ma lecture de ce recueil de poèmes de la poétesse luxembourgeoise Anise Koltz, qui publie un nouveau livre chez le très bon éditeur Arfuyen, pour chercher un équilibre entre les différents sentiments et diverses notions que me donnent les poèmes. Ils sont écrits, on le ressent, au-devant d’une réflexion mature au sujet de notre issue terrestre à tous, plus ou moins brève pour chacun. Oui, je fais une pause pour rassembler mes idées et éclaircir mes pensées. Car c’est bien de la pensée dont il s’agit là, peut-être plus que de langage – même si l’écriture de ce texte est d’une clarté de cristal. Or, pour le cas des idées, il faut se frotter au monde de l’abstraction et ne pas simplement laisser « chanter » le langage. On doit, et je me dois à mon tour, de mener une activité spéculative, et c’est fort plaisant.