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La Une CED

Souffles - Celui qui n'écrit pas son coeur !

Ecrit par Amin Zaoui , le Vendredi, 08 Novembre 2013. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Lors d’une exposition de Picasso, une femme s’est approchée du grand peintre en lui demandant, sur un ton de dégoût :

– Pourquoi cette nudité dans vos toiles, monsieur Picasso ?

– Chère madame, la nudité est dans votre tête, lui a répondu Picasso.

Les écrivains algériens boudent « l’amour ». Ils sont asséchés, moralistes. Donneurs de leçons.

En relisant les doyens comme les nouveaux, je me demande : pourquoi l’écrivain algérien ne regarde-t-il pas la femme ? Ne médite-t-il pas sur la poésie du féminin ? Pourquoi l’écrivain algérien n’a-t-il pas le courage d’aller revisiter les grands rituels célébrant « la beauté » de la femme, contenus dans notre culture populaire ? Les poètes populaires (Chouaraa al malhoun) ont magnifiquement fêté dans les « kasida » le corps féminin, sans tabous, sans peur et sans hypocrisie intellectuelle.

Ode à Clovis Trouille

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mercredi, 06 Novembre 2013. , dans La Une CED, Les Dossiers, Etudes

 

« J’ai choisi des sujets qui m’impressionnaient, la guillotine, des masques tragiques d’assassins ayant un caractère mystérieux avec ectoplasmes, une femme aux mains érotiques et branlantes comme des dents, venant de poignarder l’hostie sur la planche devant le trou de la guillotine », Clovis Trouille, Quiberon, 13 août 59.

 

I.

Un carnaval érotique

 

L’œuvre de Clovis Trouille (1889-1975) est largement présente dans le grand et beau livre consacré à son sujet, paru chez Actes Sud en 2003 (réédité), préfacé par Jean-Hubert Martin, avec un texte de Bernard Marcadé, et le tout dirigé par Clovis Prévost qui réunit des correspondances, des textes d’écrivains et de penseurs de renom comme Pierre Reverdy, René Crevel ou Ghérasim Luca.

52.dimanche (XXXV)

Ecrit par Didier Ayres , le Samedi, 26 Octobre 2013. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

la substance

ce beau mot de « substance » me vient d’une lecture d’un traité de peinture du 17ème siècle

on y apprend Cora, la première peintre de l’antiquité, et d’autres figures, et ici ou là, il y a vraiment des merveilles

permettez-moi ainsi de prendre le train de sa dissertation sur la question de la couleur, qui semble, en son livre, être une limite, la limite où aboutit la substance

d’ailleurs, les couleurs me préoccupent beaucoup personnellement

par exemple le sang, cette humeur humide, prend la couleur rouge à l’instant où il quitte la peau et vient éclairer la pâleur de l’épiderme ou sa noirceur, par son éclat purpurin et violent

Réflexions sur la mort d’un voisin

Ecrit par Kamel Daoud , le Mardi, 22 Octobre 2013. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Hier un vieux voisin est mort. J’ai discuté avec lui un jour avant. On a parlé du monde et de notre vieille rue. On les partageait. Puis, deux jours après, il est mort parce que son cœur s’est arrêté. Ce fut invraisemblable : il y a entre la mort et la vie un manque de mesure juste, de proportions. L’une a la taille du cosmique, la seconde a le volume d’une petite et dernière expiration. Il y a quelque chose qui ne colle pas. Après, j’ai longtemps réfléchi. Je me suis dit que cet homme ne savait pas que hier était son dernier jour. Le monde était « plein », durait depuis si longtemps que l’on s’y oublie, le vieux voisin avait des milliers de vies devant lui et il cédait comme moi à l’insignifiance et à l’insouciance et au soliloque fondamental qui est l’illusion de toute vie sur elle-même. Je ne sais pas comment le dire mais, cette certitude du vieux voisin « qui ne savait pas » est aussi la mienne. Mon monde est atteint par la même éternité et la même brièveté et le même aveuglement. Je veux dire qu’à chaque instant je suis aussi idiot que ce mort et je peux être aussi surpris que lui. La même possibilité d’interruption est derrière chaque souffle. Je vois le monde et je fais le constat de sa monstruosité : il va continuer sans moi. Ce que disait Arthur Rimbaud je crois à l’agonie : vous êtes au soleil et je serais sous terre.

52.dimanche (XXXIV)

Ecrit par Didier Ayres , le Samedi, 19 Octobre 2013. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

la pensée

que dire de ce sujet, la pensée ?

sinon, à redire qu’elle agit par flux continu et par intervalles comme l’eau dans les cornues des sciences physiques

ce qui me va et me fait rêver – au sens figuré –, c’est la possibilité de discontinuité, de bris, de cassure

j’écrivais un jour le mot « cessure » qui n’existe pas évidemment, mais qui est intéressant parce qu’il résume assez cette question, puisqu’il est à la fois cesser et couper ; telle est ma pensée

d’ailleurs, tout rationnel n’est pas éloigné pour saisir cette discontinuité, les phénomènes de rupture, rupture mais flux