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La Une CED

Camus contre Kamis, contre Larbi

Ecrit par Kamel Daoud , le Mercredi, 05 Mars 2014. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Mille vies pour l’écrivain qui est né dans une terre, mort dans une autre, qui n’a pas fait la guerre mais à qui on fait encore la guerre, qui a créé le meurtre absurde, mort absurdement dans un accident, qu’on accuse de ne pas avoir pris les armes mais la route, d’aimer sa mère, d’être un génie, un pied-noir, une main seule (qui n’applaudit pas) et un visage obscur.

Albert contre Larbi : le premier sans-papiers de l’histoire qui a mal fini et qui attend encore le regroupement familial entre ses deux familles. Il est Algérien par le droit du sol et français par l’histoire de la fin. On l’accuse de ne pas être FLN mais on veut le ramener vers le FN. On se l’arrache mais on se le déchire, on l’enterre mais il flotte sur les consciences. On le soupçonne d’avoir choisi de ne pas choisir et cela est mal vu de part et d’autre. Cinquante ans après, ou plus, on continue. Le Camus algéro-français continue à faire le gras de l’actualité à chaque fois que l’actualité s’emballe en France ou en Algérie. Camus dans ce cas est le premier produit de consommation interne de la France-Algérie. Citoyen dernier d’un pays qui n’existe plus alors que lui existe encore, seul, debout dans une gare maritime abandonnée. On le célèbre et il est convenu de dire qu’on le comprend mal, que c’est un malentendu, un procès, un étranger, un pestiféré, un exil, un envers du décor.

52. dimanche (XLIX)

Ecrit par Didier Ayres , le Samedi, 22 Février 2014. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

le ravissement

parce que l’instant d’écrire est une espèce d’apogée, de point haut qui surplombe la réalité, la chose dite

c’est dans cet esprit que je parle d’un ravissement, d’une dépossession de soi par une activité sans corps, dématérialisée, inerte en un sens

déprendre, se défaire, se décaler soudain dans la masse forte et vivante du réel, pour saisir, étreindre, ôter, couper aussi en quelque sorte, revivre

produire du langage

c’est une sorte d’opération d’alchimie, une sidération, comme est étrange dans le meilleur des cas de faire sortir une langue de cristal du milieu du tourbillonnement instable du réel

c’est donc une forme violente qui accompagne l’écrire

A propos de Du côté de chez Drouant, Pierre Assouline

Ecrit par Michel Host , le Samedi, 15 Février 2014. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Une lecture est une aventure personnelle, sinon « à quoi bon ? »

Michel Host

 

Au sujet d’un almanach mondain


Qu’on me pardonne de me mettre en avant à propos d’une publication, mais je suis dans le texte : laisser sans réplique la sottise, le mensonge et la calomnie n’étant pas mon genre, une fois encore je dois parler du Prix Goncourt après avoir publiquement juré de ne plus jamais le faire (Sud-Ouest dimanche, le 27/X/2000).

Monsieur Assouline m’en fournit le prétexte qui, dans son récent non-livre Du côté de chez Drouant, se fait ses dents gâtées sur ma personne (et sur quelques autres) – cinquante l’avaient déjà fait avant lui – dans les termes suivants :

52.dimanche (XLVIII)

Ecrit par Didier Ayres , le Samedi, 15 Février 2014. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

approcher

comment dire, écrire en quoi échoue en un sens écrire ?

est-ce la motilité native de la réalité qui ne laisse aucune chose stable, mais prise dans le temps ?

est-ce le langage qui est trop pauvre pour suivre les infinies nuances des mouvements intérieurs de la réalité ?

car, si l’on parle d’une chose simple comme le ciel, que peut-on retenir d’absolu ?

un peu de lumière azurée et des stries blanches ; la lune et sa vie diurne ; le soleil pâle de novembre qui tend à se défaire, à se détacher dans le néant

il y a donc une représentation qui ne peut être exécutée

Souffles - Umma du « Livre » ou société des « livres » ?

Ecrit par Amin Zaoui , le Vendredi, 14 Février 2014. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

« Vous êtes nés avec des ailes. Vous n’êtes pas faits pour ramper, alors ne le faites pas. Vous avez des ailes. Apprenez à les utiliser et envolez-vous », Djalâl-Ud-Dîn Rûmî.

Quand les muftis, les fekihs s’impliquent dans le monde du livre littéraire et philosophique, cela signifie le chaos au sein de l’espace culturel et littéraire. Le désordre dans la société des lettres et des imaginaires. Les musulmans, toutes nations confondues, depuis l’après Al-kholafa’a rachidin (l’époque des quatre premiers califes) et jusqu’au 10è siècle (4è de l’hégire), ont vécu, sur le plan intellectuel, une période riche en débats philosophiques, littéraires et religieux.

Dans ce climat propice, la société musulmane a vu naître des tendances (Firaq, pluriel de firqa) philosophico-religieuses dont la pensée a été marquée par le respect de la différence, par le courage d’idées et par el ijtihad (effort d’interprétation).

Malgré les interdits, les censures et les lapidations qui ont frappé les penseurs, les littérateurs et les religieux désobéissants, dans leurs vies comme dans leurs écrits, l’histoire des musulmans a retenu une résistance intellectuelle exemplaire face aux diverses épreuves pénibles et amères.