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La Une CED

Carnet du désert, suivi de Fragments de solitude, René Pons, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Jeudi, 08 Février 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

Carnet du désert, suivi de Fragments de solitude, René Pons, éditions Rhubarbe, août 2017, 200 pages, 13 €

 

« Ce livre, au jour le jour salivé, est formé de mes manques, de cette incapacité à enchaîner, à fixer mon attention qui, de loin en loin, me torture plus ou moins longtemps »

René Pons, p.151

 

« Je ne marche pas / dans le désert / mais le désert en moi / s’étend à l’infini »

René Pons, p.5

 

Du doute au sur-doute

Mère, pute ou hadja ?, par Amin Zaoui

Ecrit par Amin Zaoui , le Mercredi, 07 Février 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Elle naît comme toutes les autres filles aux quatre coins du monde. Belle. Ange. Pleine de rêves. Fascinée par les jouets. Comment l’ange-fille se métamorphose-t-elle en diable, dans le monde arabo-musulman ?

La fille musulmane naît encerclée par des centaines de vigiles. Toutes sortes de vigiles. Ils sont dans la langue. Dans la morale. Dans la rue. Dans le regard. Dans le hadith. Dans des fatwas perverses.

Elle est née condamnée. Elle est la faute-suprême. Elle est l’erreur-tentation. Elle est la trahison-possible. Elle est la fornication-attendue. Elle est le serpent dans la poche. Elle est la malédiction-retardée.

Dès que la fillette met le pied dans la rue, le regard entre les pieds, elle devient une bombe sexuelle qui menace la galaxie tribale. Dès qu’elle commence à se regarder dans la glace, elle devient la sœur du Satan, « chitane », qui dérange les ablutions des prieurs. Dès qu’elle s’assoit sur le banc d’école, elle est soupçonnée de semeuse de chaos ! Dès qu’elle fait son premier pas sur un talon, elle menace l’équilibre de la terre dans son parcours sur l’orbite habituelle, et donc, elle est exclue de l’espace des anges.

Les enfants de Rodrigues, par Sandrine Ferron-Veillard

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Mercredi, 07 Février 2018. , dans La Une CED, Ecriture, Nouvelles

 

Cette sensation a commencé un 13 novembre, le lendemain de mon arrivée à Rodrigues. L’île Rodrigues. Par un petit-déjeuner d’abord sur une nappe bleue cousue de rubans rouges. Du riz, des lentilles, du potiron cuisiné avec soin, les soins de mon hôte dont le prénom aurait dû déjà m’éclairer. Héloïse. Son sourire d’abord, au téléphone, depuis l’aéroport de Port-Louis, à l’île Maurice. Un premier retard, un problème technique, un problème d’appareil, un problème de pilote malade, des passagers absents, des bagages à débarquer, cinq heures de retard. Par chance pas de vents violents, ce jour-là, je me souviens avoir regardé le ciel, je crois que le ciel était clair. Ses bras ouverts à mon arrivée, elle sur le seuil de son gîte, la terrasse entre nous, moi sur mes gardes. Où déjà ?

Rodrigues.

L’homme abstrait, par Jean-Paul Gavard-Perret

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 06 Février 2018. , dans La Une CED, Ecriture, Nouvelles

 

Quoique manifestement indifférent à tout ce qui pouvait s’apparenter à une relation amoureuse et vraisemblablement aussi à toute relation humaine, une sorte de grand-mère – que je connaissais à peine sinon par ses prénoms (Le Fouèse et La Blonde des Maisons) – m’a légué tout ce qu’elle possédait. Elle y joignit une lettre où elle me traitait de tous les noms. Au lieu de vous les énoncer je vous listerai – en mon propre héritage – ce que fut son legs. Ayant reçu ses clés, je suis allé dans sa remise. Il y avait un bric-à-brac de boîtes. Je les ai ouvertes une à une… Il y avait la boîte à rire, la boîte à sourire, la boîte à pleurer et celle à pleurer de rire. La boîte à ouvre-boîte (j’aurais dû commencer par elle, encore aurait-il fallu qu’elle soit bien rangée). La boîte aux lettres d’amour et celle aux lettres de rupture. La boîte à chaussettes et celle aux godemichés sur laquelle était écrit « boîte à promesse ». Bref la boîte à trancher les problèmes ou à parer au plus pressé. Il y avait aussi la boîte aux taciturnes burnes, la boîte à blancs de poulet. La boîte à plumes et celle à défauts que je trouvais au poil. La boîte à lune nommée sur le côté « boîte de nuit ».

Plateau virtuel club # 3, par Marie du Crest

Ecrit par Marie du Crest , le Lundi, 05 Février 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

L’émission de janvier donc. Une heure polyphonique : entendre tant de voix humaines, celles des textes de Patrick Kermann et celles des voix radiophoniques. L’auteur n’est pas , comme il est de rigueur, dans la série d’émissions du Plateau virtuel club sur radio Clapas. Son absence comme une singulière présence. Il fait au contraire, par le miracle de la lecture, entendre les paroles qui nous traversent tous. De l’amour et de la Mort. Patrick Kermann est mort en 2000, et sa pièce Vertiges inédite jusqu’alors a été publiée par les éditions Espaces 34 en 2017. Sabine Chevallier présente d’ailleurs son entreprise éditoriale de l’œuvre de l’auteur dont certains textes restaient introuvables.

Marie Reverdy retrace l’itinéraire fulgurant de Patrick Kermann dont l’œuvre « post Shoah » interroge la mort du théâtre (psychologique) après cette Catastrophe et donne la parole aux Morts. Cette parole qui ne peut plus être que ressassement, fragments, glissant vers le poétique, le musical pour résonner encore.