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Critiques

Bacchantes, Céline Minard (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 08 Janvier 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Rivages

Bacchantes, janvier 2019, 106 pages, 13,50 € . Ecrivain(s): Céline Minard Edition: Rivages

 

On peut, on doit, commencer en disant que ce court roman – plutôt une novella – est parfait. Parfait comme l’est le stupéfiant braquage qu’il raconte. Minard nous déploie une mécanique narrative dont l’économie et la maîtrise touchent à l’accomplissement absolu.

Un braquage donc, mais comme jamais vous n’en avez lu ni entendu. Trois femmes, tout droit sorties d’un film de Tarantino, ont réussi à pénétrer dans un bunker imprenable, une sorte de Fort Knox plein d’un or rouge et blanc : des centaines de milliers de bouteilles de vin, de flacons de légende, confiées pour longue garde à Coetzer qui a eu l’idée géniale de créer cette caverne hyper technologique à Hong Kong. Cette forteresse contient 350 millions de dollars de vin.

Et dans leur bunker, elles ont pris le pouvoir sur ceux de l’extérieur, policiers et propriétaires du lieu ! Elles tiennent en otages cent mille bouteilles mythiques et tous les « blaireaux » qui tremblent au-dehors. Elles « exécutent », en forme d’avertissement, quelques-unes de leurs « otages » millésimées, les explosent devant les caméras intérieures de surveillance pour mieux boucler encore leur emprise sur la situation.

Tous les hommes désirent naturellement savoir, Nina Bouraoui (par Marjorie Rafécas-Poeydomenge)

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Mardi, 08 Janvier 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Jean-Claude Lattès

Tous les hommes désirent naturellement savoir, août 2018, 264 pages, 19 € . Ecrivain(s): Nina Bouraoui Edition: Jean-Claude Lattès

 

Ce livre est une douceur poétique mêlée à la violence du désir. Dans les allers retours incessants d’une Algérie à la beauté sauvage et insaisissable et d’un Paris nocturne qui permet de consoler le désir frustré du jour, l’auteure nous raconte comment son enfance a façonné les pérégrinations de sa jeunesse. Le style de Nina Bouraoui est si sincère et vif qu’il en devient dérangeant. Elle dépeint avec précision ses angoisses et ses désirs, ses fantasmes tant refoulés qu’elle n’assume pas et qu’elle rejette honteusement dans la boîte de nuit de la rue du Vieux Colombier, le Kat. On vit son impasse, son attachement fusionnel à sa mère, sa sœur, son Algérie indomptable. Ses désirs hors norme sont vécus comme autant d’attentats à son corps.

C’est dans l’Algérie où elle a vécu jusqu’à son adolescence, en 1981, qu’elle pense pouvoir retrouver les morceaux de sa personnalité amoureuse. Sa vraie nature, comparable à la végétation algérienne, est dense et hors du temps. « Les amandiers en fleurs, les brassées de mimosas, les criques de Cherchell, les massifs de l’Atlas, les vagues de dunes sur la route de Timimoune, la beauté dense, insaisissable, éternelle de là-bas ».

L’écriVeine ou comment le virtuel s’allia à la poésie, Véronique Roppe (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Mardi, 08 Janvier 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman

L’écriVeine ou comment le virtuel s’allia à la poésie, éditions du Rapois, 2018 . Ecrivain(s): Véronique Roppe

 

Deux personnes s’échangent des mots, des phrases, des idées via les réseaux sociaux. La rencontre, forcément fortuite, se précise crescendo suivant les idées qu’ils se font l’un de l’autre, chacun accentuant ses positions en fonction du portrait qu’il/qu’elle s’en fait par claviers interposés :

« H : Toujours en forme ?

V : Oui, j’ai craint un instant d’avoir fait fuir le poète-papillon ».

La réserve de l’un n’a d’égale que la passion progressive et dévorante de l’autre :

« V : J’ai fait le premier pas, je crois, et même les cent suivants. Je ne vous ai pas fait signe tout bas, ce n’est pas dans ma nature, hélas. Je suis en attente de vous, de vos sages réponses à mes mails enflammés. Il est un aspect de ma personnalité que vous devez connaître : j’ai besoin d’aimer, d’être aimée, et ce, dans chaque aspect de l’Amour… ».

L’ombre de la terre, Christine Fizscher (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mardi, 08 Janvier 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie

L’ombre de la terre, Dumerchez, janvier 2019, 54 pages, 15 € . Ecrivain(s): Christine Fizscher

 

Le lent récit d’un oubli, le récit d’une ou de deux années, mois par mois, le récit d’un journal sous forme poétique, à la fois carnet de voyage et récit d’un amour fervent et passionné, puis manqué, non partagé, délité, le récit d’une rupture amoureuse, d’un oubli.

Voyage intérieur et voyage extérieur se mêlent tout au long des vers et des phrases au rythme parfois mélodieux, parfois haché.

D’une île de la mer Egée, puis de New-York jusqu’à Salamanque, en passant par Paris et Ville d’Avray, la poétesse-narratrice emmène son lecteur dans un voyage de réflexion sur l’ailleurs, l’amour, l’oubli et la rupture. Le voyage à la fois comme stimulant de l’amour et comme remède lorsqu’il s’est enfui.

Il s’agit d’un lent découpage du temps, mois par mois, parfois à rebours : l’été, août dans les îles grecques, à Hydra où :

Rouge de soi, Babouillec (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 07 Janvier 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Rivages

Rouge de soi, mars 2018, 142 pages, 15 € . Ecrivain(s): Babouillec Edition: Rivages

Expérience d’immersion totale, Babouillec nous offre avec son Rouge de soiun roman spirale qui nous entraîne dans son tourbillon jusqu’au centre, là où l’auteur ne fait plus qu’un avec son personnage. Éloïse Othello est un alter ego plus intégré, indépendant, autonome, à qui l’auteur peut confier ce qui se trouve à l’intérieur d’elle-même, au plus rouge de soi, au cœur de l’être : ses rêves, ses élans, ses désirs, sa liberté de voir, de penser, de bouger, ses profonds questionnements existentiels. Éloïse Othello danse, a des amis, des projets, des poids et des peurs aussi dont elle veut se libérer en suivant une thérapie. Elle est perçue comme différente mais c’est une nana qui rebondit. Cependant, plane sur elle une peur ultime et on ne peut s’empêcher de frissonner en lisant ceci parce qu’on comprend à quel point l’auteur est tout près derrière ces mots-là :

« Entrer dans la confusion de l’amour et de la folie est ordinaire dans ce monde qui bombarde nos vies de slogans ordinaires, un amour fou, fou d’amour. Alors pour une personne traquée par la folie depuis son enfance, l’amour est synonyme de piège. Sa vie a pris des allures d’animal traqué. Pour dominer ses peurs, pour chasser ses angoisses, elle se réfugie dans ses entrailles où elle devient son ombre, une zombie sociale hantée par une peur ultime, la folie, l’enfermement ».