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Critiques

Encre sympathique, Patrick Modiano (par Marie-Pierre Fiorentino)

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Lundi, 18 Novembre 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Gallimard

Encre sympathique, octobre 2019, 138 pages, 16 € . Ecrivain(s): Patrick Modiano Edition: Gallimard

 

« Si vous avez parfois des trous de mémoire, tous les détails de votre vie sont écrits quelque part à l’encre sympathique ».

 

Modiano, qui a fondé son œuvre sur la mémoire, ses béances et ses obsessions, est-il bien sérieux lorsqu’il fait dire à son narrateur : « Il avait employé le passé. Et, brusquement, j’ai éprouvé une grande lassitude à évoquer le passé et ses mystères » ?

À moins qu’il n’adresse un clin d’œil à ses lecteurs fidèles pour souligner l’originalité de cette Encre sympathique. Car s’y déploie crescendo une légèreté qui ronronne d’abord dans les rues d’un Paris aux trottoirs presque usés par les pas de tous ses héros précédents, jusqu’à la surprise finale, à Rome. Car si Rome est la ville éternelle que Paris n’est pas, c’est qu’elle constitue un décor dans lequel passé et présent se confondent, comme dans l’esprit du narrateur : « Le présent et le passé se mêlent l’un à l’autre dans une sorte de transparence, et chaque instant que j’ai vécu dans ma jeunesse m’apparaît, détaché de tout, dans un présent éternel ».

Huysmans, Romans et nouvelles en la Pléiade (1) - Marthe, histoire d’une fille, Joris-Karl Huysmans (par Yann Suty)

Ecrit par Yann Suty , le Vendredi, 15 Novembre 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, La Pléiade Gallimard

Marthe, histoire d’une fille, septembre 2019, 1856 pages, 66 € jusqu’au 31 mars 2020 . Ecrivain(s): Joris-Karl Huysmans Edition: La Pléiade Gallimard

 

Toute œuvre littéraire commence par… un premier livre publié. Certains écrivains peuvent faire des débuts tonitruants alors que, pour d’autres, un premier livre n’est qu’un coup d’essai, mais qui peut aussi poser les fondations de l’œuvre à venir. Aujourd’hui, Joris-Karl Huysmans fait son entrée dans la prestigieuse Collection de la Pléiade. Cette édition permet d’apprécier la trajectoire de l’auteur. Son premier roman, Marthe, histoire d’une fille, date de 1876. Huysmans est alors âgé de 28 ans. En postface, il précise qu’il a terminé son ouvrage précisément à ce moment-là, soit juste avant un roman de Goncourt consacré également à la prostitution. Qu’on ne l’accuse donc pas d’avoir copié !

Marthe est un court roman, quasiment une novella, menée à un rythme assez soutenu, où l’auteur enchaîne les séquences. Comme son titre l’indique, c’est l’histoire d’une fille. L’histoire ou plutôt à son chemin de croix, car rien ne va bien se passer pour Marthe. Quand s’ouvre le roman, elle vit ce que l’on pourra considérer, rétrospectivement, comme un moment de plénitude. Elle travaille alors dans un cabaret, le théâtre de Bobino, en tant que chanteuse. Les spectateurs raffolent de son numéro, car sa beauté les subjugue.

Un père sans enfant, Denis Rossano (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Vendredi, 15 Novembre 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Allary Editions

Un père sans enfant, Denis Rossano, août 2019, 368 pages, 20,90 € Edition: Allary Editions

 

Un père sans enfant – Derrière cet oxymore se cache la biographie romancée de Douglas Sirk. Ce dernier, de son nom de naissance Hans Detlef Sierck, est né en 1897 à Hambourg. Après avoir passé son enfance au Danemark, d’où sa famille est originaire, Sierck va entreprendre des études artistiques en Allemagne puis y devenir metteur en scène de théâtre et de cinéma, avant de rejoindre les USA où il sera connu comme réalisateur de mélodrames et de thrillers sous le nom de Douglas Sirk. Il s’éteindra à Lugano, en Suisse, en janvier 1987.

Pour les besoins de son roman, Rossano invente le personnage de Denis étudiant en cinéma. Ce dernier dont la mère est allemande éprouve une grande fascination pour l’œuvre mélodramatique de D. Sirk. Sur les conseils de son professeur, il lit le livre de Jon Hallyday, Sirk on Sirk, et décide de faire son mémoire de maîtrise sur le cinéma germanique populaire sous le IIIe Reich. Il va se rendre à Lugano au cours des années 1981 à 1987 pour rencontrer Sirk et tâcher d’en apprendre plus sur cette image du cinéma mondial, et tenter de cerner le personnage, son entourage et ses ambiguïtés.

Œuvres, Georges Duby en La Pléiade (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 14 Novembre 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Histoire, La Pléiade Gallimard

Œuvres, Georges Duby, septembre 2019, 2080 pages, 65 € jusqu’au 31 mars 2020 Edition: La Pléiade Gallimard

 

« Aucun historien contemporain n’a été pareillement habité d’une réflexion sur la mémoire historique, sur sa position d’observateur, sur les sources et les archives. Aucun n’a su établir, entre le foyer de son travail, les XI° et XII° siècles, et le temps présent, une dialectique qui l’amena à déclarer, à l’instar de Michelet : “Je suis tout prêt à dire que ce que j’écris, c’est mon histoire” », Pierre Nora

« L’importance que Georges Duby a accordée à la valeur esthétique du discours historique a ouvert une voie stimulante, que nul après lui n’a osé emprunter aussi passionnément », Filipe Brandi

« Dans une poussière de canicule qui se lève, obscurcit tout et fait qu’on peine à se reconnaître, le crâne bourdonnant sous le heaume surchauffé, les yeux aveuglés par la sueur, ces joueurs de première catégorie entendent n’affronter que leurs pairs », Le Dimanche de Bouvines, La Victoire, Georges Duby

Ode au corps tant de fois caressé, Christophe Fourvel (par Sylvie Zobda)

Ecrit par Sylvie Zobda , le Jeudi, 14 Novembre 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman

Ode au corps tant de fois caressé, Médiapop Editions, octobre 2019, 30 pages, 7 € . Ecrivain(s): Christophe Fourvel

 

Le ton est donné dès le titre, le nouveau roman de Christophe Fourvel évoque poésie et expression des sentiments. Tout commence par un air de violon et de piano qui annonce la douceur de l’instant, la voix de Peter Hammill qui se pose sur les gouttelettes en suspension de la salle de bain. Une femme est nue sous l’eau délicieusement tiède. Tous les signes de sensualité et d’abandon sont présents. Un homme regarde sa femme qui se douche. Il se confesse, entame un monologue, une ode à celle qui partage sa vie. La chanson Automn se glisse entre les lignes du roman. Le temps passe et l’automne du narrateur arrive comme un novembre brumeux, installant une nouvelle saison, celle du déclin de la vie après un été brûlant. Que reste-t-il de sa fouge et de son désir ? Pourquoi garde-t-il les mains dans les poches, sans bouger ? Que reste-t-il de son amour ?

Loin d’un Ronsard qui presse sa Cassandre de cueillir la rose avant que la vieillesse ternisse sa beauté, le narrateur s’emploie à la déconstruction d’un mythe.