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Bassin méditerranéen

Un détail mineur, Adania Shibli (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 22 Janvier 2021. , dans Bassin méditerranéen, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Un détail mineur, Adania Shibli, novembre 2020, trad. arabe, Stéphanie Dujols, 128 pages, 16 € Edition: Actes Sud

 

De désert et de sang

Adania Shibli, née en 1974, diplômée en 2009 d’un PHD en Sciences de la communication de l’East London University, a publié, chez Actes Sud, Reflets sur un mur blanc (2004) et Nous sommes tous à égale distance de l’amour (2014). L’auteure palestinienne a reçu en 2002 et 2004 le prix du Roman de la Fondation Qattan.

Tout d’abord, dressons un bref historique : la Palestine, dont l’existence est attestée depuis le Vème siècle avant J.-C. par Hérodote, puis partagée le 29 novembre 1947 avec le nouvel état hébreu, comprend aujourd’hui l’État d’Israël, les territoires occupés, la bande de Gaza et parfois également une partie du royaume de Jordanie, le Liban du Sud et le plateau du Golan. Elle correspond au Canaan de l’Âge du bronze. Elle est consacrée terre « sainte » du Christianisme, du Judaïsme et de l’Islam.

Un détail mineur, Adania Shibli (par Marie du Crest)

Ecrit par Marie du Crest , le Vendredi, 15 Janvier 2021. , dans Bassin méditerranéen, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Sindbad, Actes Sud

Un détail mineur, Adania Shibli, novembre 2020, trad. arabe, Stéphanie Dujols, Khaled Osman,128 pages, 16 € Edition: Sindbad, Actes Sud


Les filles que l’on abat


En 2020, paraissent, selon le hasard éditorial, le grand livre de l’irlandais Colum McCann, Apeirogon (cf. article Cause Littéraire), écrit en anglais aux allures de somme, et le court roman, Un détail mineur, de la palestinienne Adania Shibli. La première œuvre, à travers les figures centrales de deux pères en deuil de leur fille à dix ans d’intervalle, met en lumière la même douleur de l’inacceptable mort d’une adolescente israélienne de 14 ans, tuée lors d’un attentat-suicide à Jérusalem-Ouest et d’une fillette palestinienne de 10 ans, victime d’un tir de soldat israélien, à Anata, en Cisjordanie. La seconde raconte le destin tragique d’une jeune fille bédouine dans le Néguev : capturée, séquestrée, violée et abattue par un escadron de soldats israéliens, en août 1949.

Anthologie de la littérature grecque, de Troie à Byzance (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 01 Décembre 2020. , dans Bassin méditerranéen, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Folio (Gallimard)

Anthologie de la littérature grecque, Gallimard Coll. Folio classique, octobre 2020, édition Laurence Plazenet, trad. grec ancien, Emmanuèle Blanc, 944 pages, 12,30 €

C’est précisé ci-dessous (si ! si ! allez-y voir !) : le rédacteur de ces lignes porte tatoués sur l’avant-bras droit les deux premiers mots de l’Iliade en grec. Est-il pour autant un distingué helléniste ? Que nenni ! D’abord, il serait douteux que Jacqueline de Romilly ou Jean-Pierre Vernant aient porté semblable ornementation ; ensuite, il s’agit d’un simple proclamation de foi, tant dans la puissance de ces mots spécifiques que dans l’appartenance à un héritage culturel – qui ne signifie en rien l’exclusion d’autres héritages culturels, merci de ne pas tout confondre et voir des opinions fâcheuses là où il n’y en a pas.

Pourquoi la Grèce ?, demandait Jacqueline de Romilly, et elle répondit à cette question dans un bel essai éponyme – dont il serait malséant de plagier les plus belles pages. La bienséance recommande juste l’honnêteté : parce que c’est de là que tout vient pour un vaste pan de la culture occidentale (réponse intellectuelle), parce que c’est de là que proviennent les plus belles histoires pour dire l’Homme (réponse sensitive). Ou du moins c’est là qu’elles ont été mises en forme, en mots, de la plus belle façon qui soit.

Requiem pour une ville perdue, Asli Erdoğan (par Jean-François Mézil)

Ecrit par Jean-François Mézil , le Mercredi, 24 Juin 2020. , dans Bassin méditerranéen, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Actes Sud

Requiem pour une ville perdue, mai 2020, trad. turc, Julien Lapeyre de Cabanes, 135 pages, 17 € . Ecrivain(s): Aslı Erdoğan Edition: Actes Sud

 

Amateur de déroulés classiques et de textes bien balisés, s’abstenir.

Dans ce livre, la phrase va où bon lui semble, de préférence en territoire poétique. Elle trotte, elle galope, c’est un cheval sans selle épris de liberté (un cheval turc ?).

Plusieurs mouvements composent ce requiem dédié à une ville perdue. Requiem, certes. Mais la ville ? Istanbul s’impose. « Cette ville affublée de presque autant de noms qu’on en a donnés à Dieu ». « Ce ghetto qui parlait mille langues ». Mais ne comptez pas trop y flâner. Le temps de remonter quelques « raidillons étroits » de Galata, de descendre des « ruelles à pic », d’approcher, sans nous y arrêter, la rue où Asli a « vécu autrefois », d’aborder de loin « les froides entrailles de la ville » pour y croiser « voleurs, ivrognes [et] entraîneuses », nous rebouclons déjà notre valise. Après cette escapade de quelques paragraphes dans Beyoğlu, pendant laquelle le rêve a replié ses ailes, nous voici ramenés vers des contrées sans noms. On est donc aussi bien à Paris, à Londres ou à Vienne. La ville est surtout prétexte à exil et sert d’écrin aux phrases.

Labyrinthe, Burhan Sönmez (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 22 Juin 2020. , dans Bassin méditerranéen, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Labyrinthe, mars 2020, trad. turc, Julien Lapeyre de Cabanes, 218 pages, 20 € . Ecrivain(s): Burhan Sönmez Edition: Gallimard

 

Né en 1965, Burhan Sönmez est une des plumes les plus importantes et les plus singulières de la littérature turque contemporaine. Ses deux premiers romans sont pour le moment (honte à nous) inédits en français. Le troisième avait été traduit en 2018, son titre Maudit soit l’espoir constituant une « belle infidèle » (en turc, le roman s’intitulait simplement Istanbul Istanbul).

Le titre de ce quatrième roman, Labirent, a été traduit fidèlement. Le labyrinthe en question est, d’une part, celui des rues d’Istanbul, mégapole à cheval sur deux continents, où l’on peut déambuler à l’infini, de jour comme de nuit. Ce n’est pas la vision sinistre de l’Istanbul souterrain et carcéral, décrit dans Maudit soit l’espoir, mais une ville chaleureuse, où l’on s’amuse, consomme de l’alcool et où de belles jeunes femmes laissent librement flotter leurs cheveux aux terrasses des cafés. Comme dans le roman précédent, Istanbul, avec ses foules, ses vendeurs ambulants, ses vapur, ses mouettes, est quasiment un personnage à part entière. D’autre part, le labyrinthe est une métaphore de la mémoire et de l’oubli.