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Recensions

Washington noir (Georges Pelecanos présente)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 07 Mai 2013. , dans Recensions, Les Livres, Polars, La Une Livres, USA, Nouvelles, Asphalte éditions

Washington noir, trad. USA par Sébastien Doubinsky février 2013, 280 p. 21 € . Ecrivain(s): George Pelecanos Edition: Asphalte éditions

 

Asphalte continue son tour du monde des grandes cités, versant noir. Aux USA, on savait pour Chicago bien sûr, pour NY, pour San Francisco et Los Angeles. La littérature policière, avec pour guides Chandler, Himes, Ellroy et combien d’autres, nous a conduits régulièrement dans ces antres du crime et de la violence urbaine. Pour Washington ça se sait moins : on imagine, de loin, une ville administrative, froide, à vastes espaces, bourgeoise.

Dès la préface, George Pelecanos nous révèle le Washington réel, celui que vivent ses habitants.

« Washington D.C. est la ville américaine où les différences de classe, de race et de culture sont les plus évidentes. Et les conflits ne se cachent pas sous la surface – l’expérience américaine est disséquée, discutée, vécue chaque jour, comme un poing dans la gueule. »

Nous voilà prévenus. Mais pas au point qu’on imagine ! Les nouvelles de ce recueil sont autant de coups de poing qui vont nous laisser sonnés. Il faut dire que le genre – la nouvelle noire – s’y prête particulièrement avec sa capacité de concentration des tensions, des conflits, des complexités les plus torves de l’âme humaine. Et le choix de Pelecanos est singulièrement sombre et détonnant.

Une année sabbatique, Alain Gerber

Ecrit par Frédéric Aribit , le Mardi, 07 Mai 2013. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Editions de Fallois

Une année sabbatique, 2013, 299 pages, 20 € . Ecrivain(s): Alain Gerber Edition: Editions de Fallois

 

 

En matière de mythologie moderne, les comptes sont vite faits : il y a le cinéma de Quentin Tarantino, il y a les yeux toujours recommencés des filles, et il y a le jazz. On y joue plus vite que son ombre, on s’y perd comme on vendrait son âme, on s’y shoote plus souvent qu’à son tour, et jusqu’à toucher parfois les hauteurs inaperçues qui ressemblent à des gouffres.

C’est là la sale affaire de Sunny Matthews, immense saxophoniste incapable pour autant de se hisser au niveau de son maître, le Bleu. Etre le Bleu ou rien ? Alors ce sera rien, sagesse de l’abstinence. Ou tout, plutôt que de végéter dans cette insupportable seconde zone de gloriole facile et de poudre aux yeux, que la lucidité rend médiocre et que la drogue ni le sexe ne rachète. Sunny flirte avec les lois, abandonne son sax sous le lit, s’essaie sans y croire à une cure de désintoxication où il s’entiche bêtement de celle qu’il ne faut pas. Puis se jette dans la boxe, littéralement à corps perdu, en un violent combat de nègre face aux chiens à culs blancs qui est l’immense métaphore de cette musique elle-même colonisée…

Légèrement seul, Daniel de Roulet

Ecrit par Lionel Bedin , le Lundi, 06 Mai 2013. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Récits, Phébus

Légèrement seul, Sur les traces de Gall, avril 2013, 12 € . Ecrivain(s): Daniel de Roulet Edition: Phébus

 

Ce qui fascine Daniel de Roulet c’est l’écoulement du temps. « J’aime me mettre dans la position d’un ancien (…) essayer de retrouver ce qu’il voyait pour le mettre en rapport avec ce que je vois ». Que pouvaient bien voir, dire, penser, des moines partis d’Irlande quatorze siècles plus tôt ? Et qu’est-ce qui a bien pu les décider à traverser l’Europe et fonder des monastères ? Pour le savoir, rendez-vous à Saint-Coulomb, à 9h15… « La plage où Gall et une dizaine de moines sont censés avoir débarqué ».

Daniel de Roulet est un marcheur solitaire, on le savait déjà. « Je marche sur des routes qui relient un point à un autre, c’est obstiné, je sais. Ni promeneur ni randonneur. Ça me vient de la course à pied ». Il le confirme ici, avec de longues journées de marche et de solitude. Et des soirées, aussi. Comme ici dans « le seul restaurant ouvert ce soir : un turc où j’arrose mon kebab de calvados ». Mais ces moments de solitude, en marchant ou à l’étape, sont propices à l’émergence, à l’affleurement de souvenirs et réflexions. Sur le voyage, par exemple. Gall ne voyageait pas avec une carte de crédit, le « nécessaire » du voyageur d’aujourd’hui par rapport au pèlerin de VIe siècle, qui emportait « l’essentiel » – en fait souvent tout ce qu’il possédait – : quelques livres et des vêtements. « Pèlerins du XXIe siècle, nous sommes des imposteurs, ce que nous appelons l’essentiel n’est que le nécessaire ».

Aimer et laisser mourir, Jacques Olivier Bosco

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Vendredi, 03 Mai 2013. , dans Recensions, Les Livres, Polars, La Une Livres, Roman, Jigal

Aimer et laisser mourir, septembre 2012, 272 pages, 18,50 € Edition: Jigal

La mondialisation du crime organisé devient une affaire de géopolitique. De Nice à Bogotá, de Paris aux confins de Zagreb, on trafique de la drogue, des armes, de l’humain, on vend du sexe, on aime, on tue et parfois aussi, on laisse mourir.

Amanda et Lucas Beauvaux, surnommé « Le Maudit », les deux principaux héros du roman, vivent à des milliers de kilomètres de distance et rien, a priori, ne devrait les amener à lier leurs destinées… et pourtant…

Amanda est une pute de luxe, véritable bombe sexuelle de vingt-cinq ans, « associée » à Pompom le Corse, propriétaire de restaurants, de bars et de parts dans des casinos, solidement implanté, lui et sa bande, à Paris. En « mission » à Nice, elle se fourvoie dans un règlement de comptes de proxénètes Croates et ne sauve sa peau, in extremis, qu’en tuant l’un des malfrats. Manque de chance, il s’agit du jeune frère de Tchek Mordeck, l’un des principaux pontes du TEH (Trafic d’Etres Humains) dans les Balkans. Le Croate a la vengeance tenace et la vie d’Amanda ne tient plus qu’à un fil. La sienne ou à défaut, puisqu’elle arrive à leur échapper, celle de sa jeune sœur Mira, tombée en représailles entre les mains de ces esclavagistes du sexe. Amanda n’a plus qu’une idée en tête : sauver sa sœur, et ce, par tous les moyens possibles.

Le gardien invisible, Dolores Redondo

Ecrit par Cathy Garcia , le Vendredi, 03 Mai 2013. , dans Recensions, Les Livres, Polars, La Une Livres, Roman, Espagne, Stock

Le gardien invisible, traduit de l’espagnol par Marianne Million, Stock La Cosmopolite Noire, mars 2013, 453 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): Dolores Redondo Edition: Stock

 

Voici le premier roman d’une trilogie policière qui se déroule au Pays Basque espagnol. Des adolescentes sont retrouvées dans la vallée de Baztán, étranglées, les vêtements déchirés de part et d’autre de leur corps, maquillage effacé et un txatxingorri déposé sur leur pubis rasé. Les txatxingorris sont des gâteaux typiques de la région. De plus, des poils d’origine animale sont retrouvés sur chacune d’elles. L’enquête est confiée à l’inspectrice Amaia Salazar, originaire d’Elizondo, le chef-lieu de la vallée, qui n’y était jamais revenue depuis qu’elle l’avait quitté. Amaia Salazar est une femme fine et intelligente, dotée d’une ferme volonté, formée au FBI, elle est spécialisée dans la traque de tueurs en série. C’est donc confiante dans ses capacités qu’elle va se lancer, plus ou moins bien secondée de ses co-équipiers, dans une course contre la montre pour identifier et arrêter le tueur, mais ce retour sur les lieux de son enfance, où elle a encore de la famille, est loin d’être anodin. Surtout qu’une de ses deux sœurs, Flora, prend visiblement plaisir à réactiver ce passé.

« Oublier est un acte involontaire. Plus on essaie de laisser quelque chose derrière soi, plus cette chose vous poursuit ».