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Recensions

Le tour du cadran, Leo Perutz

Ecrit par Zoe Tisset , le Lundi, 23 Avril 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Langue allemande, Roman, Titres (Christian Bourgois)

Le tour du cadran, traduit de l’allemand par Jean-Jacques Pollet, 19 avril 2012, 248 p. 7 € . Ecrivain(s): Leo Perutz Edition: Titres (Christian Bourgois)

 

Ce livre n’est pas un policier au sens classique du terme. On est dans le corps et surtout dans cette respiration haletante de Stanislas Demba qui déambule dans Vienne les mains menottées. Etudiant, il a subtilisé des livres à la bibliothèque et s’est fait pendre en voulant les revendre. Il a échappé à la police mais garde les mains liées. Le livre ne cesse d’explorer la symbolique résultant de cette situation : des mains menottées qui doivent rester cachées mais dont on ne peut se séparer. Perutz s’amuse sur le propre et le figuré des expressions. « Vous savez, cher baron, lui ai-je répondu, je suis tenu par le secret professionnel ! J’ai les mains liées, mais… Stanislas Demba s’arrêta, fronça les sourcils et dévisagea son compagnon :

– Que dites-vous là ? Les mains liées ?

– Oui. Parce que évidemment…

– Vous avez donc les mains liées. Cela doit être gênant ?

– Qu’entendez-vous par là ?

Journal des canyons, Arnaud Devillard

Ecrit par Lionel Bedin , le Jeudi, 19 Avril 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Le Mot et le Reste

Journal des canyons, 29/03/2012, 245 p. 18 € . Ecrivain(s): Arnaud Devillard Edition: Le Mot et le Reste

 

 

C’est en 2008 qu’Arnaud Devillard – et Cécile – partent en touristes dans les fantastiques paysages désertiques des États-Unis, dans les pas d’Edward Abbey (1927-1989), personnage emblématique et contestataire, le plus célèbre des écrivains écologistes de l’Ouest américain, auteur notamment en 1968 de Désert solitaire. Le Journal des canyons est le récit de ce voyage : Arnaud Devillard nous raconte simplement, au jour le jour, comment ça s’est passé. Un récit assez marrant, mais qui finit par donner un sentiment un peu tragique, par (me) mettre mal à l’aise : qu’est-ce que c’est que ce cauchemar ? Comment pouvons-nous nous faire piéger ainsi ? Comment faire ? Comment ne pas avoir envie d’aller voir ce qui est présenté – et qui est sans doute réellement – comme des merveilles de la nature ? Le problème c’est que tout le monde détient la même information, part avec le même besoin plus ou moins créé, le même guide, le même créneau dans le temps. Et qu’à l’autre bout les vautours attendent de pied ferme la masse – la manne – des touristes. Et que ça devient un enfer.

Pertes humaines, Marc Molk

, le Lundi, 16 Avril 2012. , dans Recensions, La Une Livres, Roman

Pertes humaines, Editions Arléa, septembre 2006, 124 p, 13 € . Ecrivain(s): Marc Molk

 

Ceci est un inventaire. Page après page, fiche après fiche ainsi que l’auteur désigne ces courts chapitres, sont brossés les portraits d’êtres plus ou moins chers, plus ou moins proches, qui pour une raison ou une autre sont sortis de la vie de Marc Molk. Davantage que l’individu, c’est la relation de l’auteur avec lui qui est présentée, analysée de façon volontairement non objective. Chaque fiche est assortie de données quantitatives – le coefficient de perte, la part de responsabilité de l’auteur et ses chances de renouer – comme pour mieux hiérarchiser des conditions de rupture ou de désagrégation qui échappent à toute logique (ou pas).


« Elle décida de me démissionner, dernière touche apportée à son œuvre de promotion sociale. J’accueillis la décision de la direction avec le soulagement d’un employé dont la tâche représentait déjà, depuis bien longtemps, une corvée déprimante » (page 79).

Je, tu, il, Valère Novarina

Ecrit par Didier Ayres , le Dimanche, 15 Avril 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Théâtre, Arfuyen

Je, tu, il, editions Arfuyen 2012. 10 € . Ecrivain(s): Valère Novarina Edition: Arfuyen

La lecture de Je, tu, il a été tout de suite envahie par deux choses extérieures - tel que Michaux l'écrit si bien : Je cherche un être à envahir. Deux choses donc, le Relief à l'assiette de Jean Pougny (Ivan Puni, 1884/1956), et  le chapitre 1 de Matthieu. Pour la première occurrence, c'est sans doute à cause de la proximité de ce tableau et de la Danseuse de Jean Arp (1886/1966), dans un catalogue d'art moderne. Car il va d'évidence que l'univers plastique du livre avec des répliques comme : "Nous mangeons le carré, le triangle, le cercle et sa courbe, et nous mangeons le point" a un rapport avec Arp. Mais cet univers semble entretenir aussi une relation significative avec le tableau de Pougny, qui représente une assiette, sorte d'auréole blanche cerclée de vert amande en relief, accrochée sur un bois de tilleul sienne rouge, sorte de repas dernier ou encore de croix, de Cène ou de Golgotha.

En second lieu, la deuxième chose forte qui vient à l'esprit, et à diverses reprises au cours de la lecture, c'est la ressemblance assez vive avec l'énumération du chapitre 1 de Matthieu, où l'évangéliste décline l'identité du Christ depuis la genèse. C'est en fait un nom qui engendre un autre nom. Cela permet de voir aussi dans ce texte de Valère Novarina le corps, l'animal, la forme géométrique, des angles, l'intérieur de l'humain, des bouches, Isaac et Abraham, et diverses épithètes, dont il faudrait sans doute dresser la liste - on sait d'ailleurs que l'écriture a été inventée pour énumérer (et qu'elle a accompagné le développement d'une nouvelle zone du cortex cérébral).

Espiritu Pampa - Sur les chemins des Andes, Sébastien Jallade

Ecrit par Lionel Bedin , le Samedi, 14 Avril 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Récits

Espíritu pampa - Sur les chemins des Andes, Éditions Transboréal, mars 2012, 180 p. 20,90 € . Ecrivain(s): Sébastien Jallade


C’est quoi les Andes ? « Un territoire inaccessible ? » « Un enchevêtrement de couleurs sans orgueil » ? « Tout se ressemble : une vallée, puis une autre, un écheveau de montagnes si monotone qu’il m’empêche de trouver mon chemin ». C’est pour essayer de répondre à ces questions, de comprendre, que Sébastien Jallade nous propose un incroyable périple dans Espíritu pampa - Sur les chemins des Andes. « Marcher sur la grande route inca en ignorant le temps présent n’aurait aucun sens ». Marcher sur le Qhapaq Ňan – nom quechua signifiant « chemin royal » souvent traduit par le Chemin de l’Inca – en ignorant qu’il fut un « axe majeur d’autres enjeux, ceux de la conquête espagnole et des premières tentatives d’évangélisation » n’aurait évidemment pas plus de sens. Le Chemin de l’Inca fut un axe essentiel de l’économie et de la politique de l’Empire Inca. Qu’est-ce qui existait avant cette conquête – dans le quotidien, mais aussi dans l’imaginaire ; quelles sont les croyances qui ont façonné ce Nouveau Monde ? Qu’est-ce qu’il en reste aujourd’hui ? Est-il possible de parvenir à un « syncrétisme » en parcourant ces chemins ? Est-ce souhaitable ?