Identification

Recensions

Assommons les pauvres ! Shumona Sinha

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 18 Juillet 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Asie, Roman, Récits, L'Olivier (Seuil)

Assommons les pauvres !, 2011, 155 pages, 14,20 € . Ecrivain(s): Shumona Sinha Edition: L'Olivier (Seuil)

Ce petit livre rapporte :

 

– qu’au Nord prospèrent des états opulents, arrogants, accapareurs, vivant en paix et vendant des armes, démocratiques et imposant leur système économique au reste du monde

– qu’au Sud, il y a des populations pauvres, humbles, spoliées, prises en étau dans des guerres intestines, subissant une dictature affirmée ou déguisée, conséquemment miséreuses

– qu’entre ces deux mondes, les routes se ferment, les frontières se renforcent, des murs s’érigent

– que du Sud vers le Nord s’écoule, malgré les barrières, un flot incessant d’hommes et de femmes, ici échappés du sous-continent indien,  qui, en échange du peu qu’ils possèdent, mettent leur vie entre les mains de passeurs dénués de tout scrupule dans l’espoir d’arriver dans l’aire où tout paraît aller mieux.

– que ceux d’entre eux qui survivent aux périls de la migration doivent se procurer, à destination, la clé qui leur permettra de sortir de la clandestinité : le statut de demandeur d’asile politique.

Tout cela, nous le savons, plus ou moins.

Contes d'ailleurs et d'autre part, Pierre Gripari

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 17 Juillet 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Grasset, Jeunesse

Contes d’ailleurs et d’autre part, Illustrations de Guillaume Long, 2012. 190 p. 9 € . Ecrivain(s): Pierre Gripari Edition: Grasset

 

Publiés une première fois en 1990, voici la réédition de huit contes d’ailleurs et d’autre part, à la sauce Gripari, huit bijoux de drôlerie fantastique, inspirés des folklores russes, français, italien et d’Afrique du Nord. Un véritable régal, avec ce verbe franc, truculent et tellement poétique de Pierre Gripari, s’adressant à ses lectrices et lecteurs d’une façon si familière, qu’elles et ils pourraient croire qu’il est assis tout près d’elles et eux. Le conteur de la Rue Broca est véritablement talentueux, c’est évident, mais outre son imagination pétulante, il est doté également d’une grande liberté de pensée. Ils nous emmènent donc ici dans un monde peuplé comme il se doit de magie, d’amour et de courage. Dans Mademoiselle Scarabée, on comprend que l’apparence importe peu, mais qu’il importe de trouver bonne boulette à son pied quand on veut se marier. « Quand un cheval trottine et crottine, quand une vache lâche sa bouse en marchant, je fais une petite boule de la chose en question, puis je la pousse à reculons jusqu’à ma maison ! » Dans Madame-la-Terre-Est-Basse, les objets ont une âme, ils parlent, ils bougent, ils peuvent être tristes mais savent aussi se venger.

Les bisons du Coeur-Brisé, Dan O'Brien

Ecrit par Lionel Bedin , le Samedi, 14 Juillet 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, USA, Récits, Au Diable Vauvert

Les Bisons du Cœur-brisé, traduit de l’américain par Laura Derajinski, 2007 . Ecrivain(s): Dan O'Brien Edition: Au Diable Vauvert

 

Avez-vous déjà vu le pare-chocs de votre auto se refléter dans les yeux d’un bison ? Ce fut une révélation lorsque l’auteur se trouva un jour « suffisamment près pour voir le pare-chocs du pick-up se refléter dans ses sombres yeux ronds surmontés d’une touffe de poils noirs et frisés. Sa tête était aussi grosse qu’une machine à laver ». Même s’il fut alors « incapable de trouver un lien entre ce vieux bison poussiéreux » et lui, Dan O’Brien comprit que cette vision était un signe. Peu de temps après il loua un ranch. Au début il y vécu dans des conditions spartiates et difficiles. Plusieurs obstacles durent être surmontés : les éléments naturels, certes, mais aussi les problèmes de voisinages et d’autres liés à l’écosystème, complètement stérilisé par des « erreurs » antérieures. Ce sont ces questions qui donnent à ce livre plusieurs pistes de lectures et donc son intérêt et son épaisseur.

Ce récit est celui de l’Histoire, et aussi de l’histoire économique de la région. Nous sommes au pied des Black Hills, « de l’herbe qui oscille à l’infini dans le vent et un ciel qui engloutit la moitié du monde », les terres indiennes de Sitting Bull, dans les Grandes Plaines du Dakota. Ces plaines qui ont vu la « disparition » des peuples autochtones, les Indiens, en même temps qu’un autre massacre, celui des bisons.

Une étrange histoire d'amour, Luigi Guarnieri

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 12 Juillet 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Actes Sud, Italie

Une étrange histoire d’amour. trad. italien Marguerite Pozzoli. mai 2012. 220 p. 21,80 € . Ecrivain(s): Luigi Guarnieri Edition: Actes Sud

Si vous aimez les vents et marées du grand romantisme, voici un roman, de haute tenue, qui va vous embarquer loin des bonaces !

Le thème pourrait tromper cependant. Les trois héros de cette histoire forment un très classique trio amoureux. Un couple marié, un jeune amant éperdu d’amour pour l’épouse. Mais quand vous saurez les noms des protagonistes vous commencerez à vous douter de la vague tumultueuse qui va s’écraser. Le jeune homme s’appelle Johannes Brahms. Le couple c’est Robert et Clara Schumann.

Le jeune « Hannes », éperdu – tout d’abord – d’admiration pour son maître spirituel, se présente un jour de septembre 1853 au domicile des Schumann. S’en suivra une relation passionnelle incandescente et – nous sommes en pleine époque romantique – destructrice. Maître/élève d’abord, avec les oscillations consubstantielles inscrites dans ce couple de forces : admiration, respect, amour « paternel » et « filial », jalousies, haine. Un déferlement ravageur, qui va emmener les deux hommes dans ses eaux tumultueuses. Et puis, bien sûr, l’amour foudroyant du jeune Johannes pour la belle, l’intelligente, la « royale » Clara Schumann. Elle est alors la pianiste la plus connue dans le monde, adulée, ovationnée, demandée partout et par tous.

Dénommé Gospodin, Philipp Löhle

Ecrit par Marie du Crest , le Mercredi, 11 Juillet 2012. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Langue allemande, Théâtre

Dénommé Gospodin, (traduction All. Ruth Orthman), bilingue Presses Universitaires du Mirail, 2010, 151 p. 13 € . Ecrivain(s): Philipp Löhle

Pièce présentée au festival d’Avignon en 2011 et reprise au théâtre des Ateliers à Lyon en avril 2013. Mise en scène de Benoît Lambert.

 

La pièce de Löhle, aux accents beckettiens, créée à Bochum en 2007 au théâtre unter Tage/ Schauspielhaus, est bel et bien un texte de théâtre. Au seuil du texte, Sie (elle) parle d’un homme à l’abandon du monde : Tja, seine… Welt stand Kopf / Ouais son… monde est sens dessus dessous. Succession de monologues à la manière du chœur antique, portés tantôt par une voix féminine, tantôt par une voix masculine ; dialogues-scènes au nombre de treize que les noirs séparent. Tout se construit autour du drôle de gars qu’est Gospodin (Monsieur en russe) et à qui Greenpeace (« une organisation merdique ») a enlevé son cher lama. Il croise tour à tour des amis, des gens de sa famille qui ne le comprennent pas, et qui eux, s’inscrivent dans la logique sociale de notre époque : Anette, sa petite amie, Andi, le pilote, Norbert l’artiste, Sylvia la bobo… Aux yeux de Gospodin, ils incarnent ce qu’il appelle les petits-bourgeois « die Spiesser ». Ils cherchent à persuader Gospodin à rentrer dans le rang, parfois avec des arrière-pensées cupides mais en vain. Gospodin alors se réfugie dans le sommeil ou le silence.