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Les Livres

Demain une oasis, Ayerdhal

Ecrit par Marc Ossorguine , le Lundi, 04 Juin 2018. , dans Les Livres, Critiques, Science-fiction, La Une Livres, Au Diable Vauvert

Demain une oasis, 256 pages, 15 € . Ecrivain(s): Ayerdhal Edition: Au Diable Vauvert

 

Plongée dans le futur, un futur relativement proche, dans l’est de l’Afrique.

Le réchauffement climatique et l’inertie politique on fait leur œuvre et il n’y a plus « là-bas » qu’un espace abandonné ou tentes de quelques populations auxquelles personne, dans le monde « développé », riche, ne se préoccupe. En cette époque les grands projets sont devenu spatiaux. L’espace est en effet devenu lieu de vie, multipliant les stations orbitales gigantesques qui sont devenues des extensions des nations riches. L’on parle même de transformer les planètes Mars et Vénus pour les rendre habitables par des communautés humaines. Ces grands projets reposent sur une collaboration internationale qui a développé ses propres institutions, sur l’héritage des Nations unies avec des organisations et une administration mondialisée qui ont tiré un trait sur ceux qui ne pouvaient pas suivre, soit une très large partie du continent africain. Cependant, quelques-uns bataillent encore pour faire de l’humanitaire dans ces régions abandonnées de tous, pour sauver quelques vies dans cette partie du monde que le changement climatique a rendu encore plus invivable. Les périodes de famine y sont de plus en plus longues et le nombre de victimes n’affole plus aucun compteur car il y a longtemps que personne ne les compte plus.

Les 100 mots de la poésie, Jean-Michel Maulpoix

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 04 Juin 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, PUF

Les 100 mots de la poésie, coll. Que sais-je, mars 2018, 128 pages, 9 € . Ecrivain(s): Jean-Michel Maulpoix Edition: PUF

 

En expert de la poésie, du lyrisme contemporain, professeur de ces matières en Sorbonne, Jean-Michel Maulpoix (1952), poète reconnu (Une histoire de bleuL’hirondelle rouge, dernier livre de poèmes doublement primé), se fend avec brio d’une étude sur la poésie, en cent mots choisis pour l’explorer de fond en comble, subjectivement, il va de soi, défendant ses poètes (Rimbaud, Mallarmé, Rilke, Michaux, Bonnefoy, Deguy…), s’en inspirant par des citations pour fouailler dans le corps vaste des poésies. À la vision longtemps univoque et classieuse de la poésie, comme si c’était un langage unique, une fois pour toutes bardé de symboles, de formes fixes et de médailles, il répond d’une investigation éclairant formes, tons, modes, écoles, modalités, langages, figures de style, ainsi que la réception – selon les époques et les mentalités – de ce travail « poiétique » « qui déborde de la page » tout en la cadrant d’une manière originale.

Soleil se mire dans l’eau, Philippe Thireau (Haïkus), Florence Daudé (Photographies)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Lundi, 04 Juin 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Arts, Z4 éditions

Soleil se mire dans l’eau, Philippe Thireau (Haïkus), Florence Daudé (Photographies), 2017, 141 pages, 36 € Edition: Z4 éditions

 

 

Poisson sautillant du cœur dans les herbes folles. Que les herbes folles du poème, « prisonnières » délivrées par le Langage, captent dans les « joyeux tourbillons » des saisons. Courts poèmes en capture, comme l’œil photographique en prise sur la « fraîcheur de l’instant ».

Le mouvement saisit d’emblée le réseau des photographies et se tisse dans les mailles des mots pour en faire surgir, comme des ronds dans l’eau, des reflets aux remuements calmes ou plus vifs accordés aux battements du cœur. Cœur qui bat, cœur qui s’ébroue, cœur-soleil ou de nénuphar qui pulse, cœur enfoui sous les eaux et qui saigne, cœur « battant chamade », cœur qui prend l’eau, et qui « surgît »

Anaconda, Horacio Quiroga

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 01 Juin 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Roman, Métailié

Anaconda, mai 2018, trad. espagnol (Uruguay) Frédéric Chambert, 210 pages, 10 € . Ecrivain(s): Horacio Quiroga Edition: Métailié

Au commencement était le serpent libre dans un jardin nocturne. « L’Homme, mauvais »  saccagea « les entrailles mêmes de la forêt » jusqu’à y mettre le feu. Dès les premières pages de cette première nouvelle, Horacio Quiroga plonge le lecteur au sein d’un monde zoomorphique dans lequel le temps serpentin accomplit son périple en rampant. Un monde chtonien. Le conseil d’animaux à sang froid se tient à l’orée d’une caverne sous « le ciel de charbon »au milieu « des spartes blancs », comme jadis celui de Kalîla wa Dimna. À contre-courant des comparaisons négatives pesant sur les reptiles (notamment religieuses), présentés comme créatures infernales, il s’agit plutôt d’un réquisitoire contre « la présence funeste de l’Homme ». Parole d’animal, royaume des yararas, ode à la sagesse du serpent carnivore, ophiophage ou arboricole. Les assemblées souvent féminines révèlent les caractères disparates des individus.

« Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes » (Racine, Andromaque Acte V, scène 5) devient ici l’adage d’êtres courroucés qui doivent lutter et punir le pire des prédateurs, l’exploitant agricole. Méduse triomphe un court instant dans ce conte exemplaire et libère un « écheveau de serpents ». L’on voyage à travers un vaste continent où la nature endosse des teintes ténébreuses avec le « fleuve Mortl’Achéron lugubre », une« dépression profonde »et un panorama sous « une horrible lumière crue », une« horrible chaleur » et « le gris opaque des eaux ».

L’Urgence et la patience, Jean-Philippe Toussaint

Ecrit par Carole Darricarrère , le Vendredi, 01 Juin 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Les éditions de Minuit

L’Urgence et la patience, 107 pages, 11 € . Ecrivain(s): Jean-Philippe Toussaint Edition: Les éditions de Minuit

Lu dans un trou de la vue entre minuit et minuit cinq à quelques bâillements de serrures et années de distance du temps fortuit de son achat, cet essai, ces confessions, ce fourre-tout éclectique, ce petit livre blanc light comme un jour de jeûne – petit c’est parfois dense – dans lequel il n’est question cette fois ni de fuir ni de faire l’amour mais bel et bien de regarder non son nombril mais les articulations de la langue de face dans sa propre altérité, dans ses zones de cohabitation comme d’exclusion – car c’est la langue dans ses rythmes qui agit l’écrivant et non le contraire – ; de se poser, en appariteur du monologue, le temps de trier-classer-compter-compiler un nombre épars de papiers anciens, rassemblés de droite et de gauche au centre, sous couvert de la question de l’urgence et (de) la patience entendues comme deux piliers de l’écriture, non sans une certaine inclination complaisamment contemporaine de chef-cuisinier cosmopolite habile dans l’interprétation qu’un filet de sauce à lui seul a le pouvoir de conférer à un mets, auquel une réputation sans faute s’attache, lui intimant une légitime tentation de s’asseoir sur le laurier, ce petit snack, entre deux plats de consistance ce sorbet, un Perrier-citron se prêtant à ce selfie sans craindre le snobisme, ce très léger sentiment d’ivresse que procurent les apnées entre deux inspirations, cet opus d’une minceur absolue ayant longuement glissé de pile en pile hors de ma vue, cette plume postmoderne dans le vent des pages enfin stabilisée entre mes deux mains voici ce qu’il en reste : un sentiment de faim extrêmement dense.