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Ce que savent les baleines, Pino Cacucci

Ecrit par Lionel Bedin , le Vendredi, 22 Juin 2012. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Récits, Christian Bourgois, Aventures, Italie

Ce que savent les baleines, traduit de l’italien par Lise Chapuis, mars 2012, 15,00 € . Ecrivain(s): Pino Cacucci Edition: Christian Bourgois

 

D’événements graves (les Conquistadors, le massacre des baleines) à d’autres plus anecdotiques (la « véritable » histoire de l’Hôtel California), en passant par les moment de grâce, tels les spectacles de la nature qui laissent « muet, en extase » comme ces baleines grises « qui ponctuent de souffles vaporeux toute la ligne d’horizon (et) s’approchent du bord et remuent le fond sablonneux à quelques mètres du rivage », Pino Cacucci emmène ses lecteurs pour une promenade du sud au nord de la « Baja California », la Basse-Californie, de La Paz – la première tentative d’implantation espagnole, là où Hernán Cortés s’avança en 1535 – à la frontière, du côté de Tijuana. Son credo : la nature.

 

« On part. Et pour ce long voyage, on a une robuste Dodge Durango, plus spacieuse et confortable que la Bronco. En fond sonore : Bruce Springsteen ». La région semble belle, avec des bords de mer magnifiques, des baies des anges, des terres où poussent « le petit cactus tonneau jusqu’au robuste saguaro ou au cactus cierge haut de vingt mètres », des pics du diable et, « en somme, traverser la Baja en février est un plaisir sublime ».

La muraille de lave, Arnaldur Indridason

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 21 Juin 2012. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Polars, Pays nordiques, Roman, Métailié

La muraille de lave. Métailié noir. Mai 2012. 319 p. 19,50 € . Ecrivain(s): Arnaldur Indridason Edition: Métailié

La maîtrise d’Indridason dans ce genre qu’il a beaucoup contribué à élever au rang d’art absolu – le roman noir venu du Nord – est époustouflante. On le sait depuis des années. Le point d’orgue de cette virtuosité a sûrement été le « Betty » d’octobre 2011. Le maître islandais nous y prenait par la main, dans un blues familier qui nous berçait de certitudes, avant de nous piéger en plein milieu du gué dans un jeu de miroir où on ne trouvait plus soudain nos repères. (Recension de "Betty" par Léon-Marc Levy)

Dans ce nouvel opus, Indridason remet ça. Sur des registres très différents bien sûr.

Erlendur, son héros triste et débonnaire est parti. En « vacances » sur les lieux de son enfance, voyage entouré de mystère. En son absence, son collègue, Sigurdur Oli, se retrouve en charge d’une affaire explosive, mêlant le destin d’un homme brisé par les viols incestueux qu’il a subis dans son enfance, le meurtre de la femme d’un couple échangiste qui tentait de faire chanter une de leurs rencontres, la mort mystérieuse d’un homme d’affaires emporté par le rêve « mondialiste » et doré de l’Islande nouvelle. Et maître Indridason nous épate ! Les trois intrigues s’entrecroisent dans une construction parfaite, haletante, noire comme l’hiver. Comme ce jour sombre où un homme a disparu sur la « Svörtuloft », falaise de lave au pied de laquelle la mer s’écrase en des tourbillons effrayants. La muraille de lave.

Ici comme ailleurs, Lee Seung-U

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 18 Juin 2012. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Asie, Roman, Zulma

Ici comme ailleurs, 2012, trad. du coréen par Choi Mikyung et Jean-Noël Juttet, 220 p. 21 € . Ecrivain(s): Lee Seung-U Edition: Zulma

 

Kafkaïen est le premier qualificatif qui vient à l’esprit en lisant ce roman, pour l’univers dans lequel il se déroule et l’absurdité qui émane du parcours du personnage principal. Yu est muté par sa boite, le Gangsan Complex Resort, à Sori, une ville perdue entre un lac et des montagnes à l’Ouest du pays. « Lorsque, dans son guide, il a lu que “la petite ville de Sori, du fait de sa topologie particulière avait servi de lieu de bannissement”, son cœur s’est de nouveau mis à balancer ».

L’histoire démarre sur ses mots qui donnent d’emblée le ton :

« Le vent a des hurlements de bête féroce. Au moment de quitter sa voiture, Yu a l’impression qu’un molosse enragé se jette sur lui. Il a un mouvement de recul. Le long des rues, papiers sales et sacs plastique tourbillonnent sous la bourrasque. Quelques véhicules cahotent sur la chaussée éventrée en soulevant des nuages de poussière ocre. Les rares passants, silencieux, font la gueule ».

Ici comme ailleurs est un roman hybride, indéfinissable. Il tient du polar, du roman noir, psychologique, métaphysique, à la limite du fantastique, et on pense à des films de cet extrêmement riche cinéma sud-coréen, en particulier ceux de Kim Ki-Duk, qui de même échappent à toute définition.

Le ravin du chamelier, Ahmad Aboukhnegar

Ecrit par Patryck Froissart , le Lundi, 18 Juin 2012. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Pays arabes, Moyen Orient, Sindbad, Actes Sud

Le ravin du chamelier, Actes Sud, Sinbad, (2012), trad. de l’arabe (Egypte) par Khaled Osman, 207 p. . Ecrivain(s): Ahmad Aboukhnegar Edition: Sindbad, Actes Sud

Il arrive qu’une caravane s’égare, et dresse le camp à proximité d’une oasis.

Il arrive que, le temps d’une veillée, les nomades et les sédentaires, refoulant leur antagonisme atavique, partagent le méchoui, dans un lieu neutre, à l’écart du douar, à l’écart de la piste.

Il arrive que les chameliers reprennent ensuite l’itinéraire ancestral en abandonnant un des leurs, pour le punir d’avoir, par étourderie, mis la troupe en péril.

Il arrive qu’un chamelon partage tout avec son jeune maître qui le consulte et tient compte de ses avis, et qu’ils fument ensemble la gôza.

« Dans quelques jours et encore moins de nuits, mon père rentrera, alors je me réveillerai de ce cauchemar ». Le chamelon hocha la tête…

Il arrive que, tout en espérant qu’un jour la caravane repasse et que lui soit rendu son rang dans la file, le chamelier adolescent, son chamelon empli de sagesse et une chamelle blessée s’installent dans un ravin sauvage où les villageois ne doivent, par tabou, jamais poser le bout du pied, et où règne, sur un monde de djinns et d’animaux des ténèbres, un couple de gigantesques seigneurs serpents.

Le Talisman, Vaikom Muhammad Basheer

Ecrit par Patryck Froissart , le Samedi, 16 Juin 2012. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Asie, Nouvelles, Zulma

Le Talisman, trad. du malayalam par Dominique Vitalyos, 2012, 210 p. . Ecrivain(s): Vaikom Muhammad Basheer Edition: Zulma

Douze nouvelles, les unes drôles, les autres sombres, d'autres sombres et drôles à la fois, sont rassemblées dans ce précieux petit  recueil de VM Basheer.

Douze nouvelles, et autant de plongées au coeur de l'Inde fourmillante, grouillante, foisonnante.

 

Douze histoires tirées de la vie quotidienne d'une société, toujours extraordinaire pour l'occidental cartésien,  où se mêlent religions, croyances, de légendes, superstitions, traditions, interdits, où ce qui pour nous est irrationnel trouve son explication et passe pour normal, réel, faisant partie de l'ordre raisonnable du monde.

Ainsi, une "banale" histoire d'amour entre un chien musulman et une chienne hindoue peut avoir des conséquences sur un crucial problème de calvitie, et cela n'étonne personne.

Ainsi le narrateur lui-même se retrouve mêlé à des évènements auxquels il participe pleinement tout en glissant dans son texte, sans grande conviction : "Disons que c'est une histoire de fantôme". Métalangage ironique amusant...