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La Une Livres

L’abeille, Hideki Noda

Ecrit par Marie du Crest , le Mercredi, 22 Mars 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Théâtre, Japon, Espaces 34

L’abeille, 2016, trad. japonais Corinne Atlan, 64 pages, 13 € . Ecrivain(s): Hideki Noda Edition: Espaces 34

 

La vengeance de monsieur Ido

En France, nous ignorons tout ou presque du théâtre japonais contemporain : nous en restons, par goût sans doute de l’exotisme, à l’héritage du Nô et du Kabuki alors même que nous nous passionnons pour les mangas ou le cinéma nippon actuels. Sans doute serait-il nécessaire de traduire à plus large échelle des pièces récentes que des compagnies monteraient pour qu’enfin le théâtre japonais contemporain rencontre un public nombreux. Hideki Noda est un des très rares auteurs à être présent sur nos plateaux mais encore de façon modeste au regard de la vingtaine de textes qu’il a écrits.

L’abeille est inspirée d’une nouvelle de Yasutaka Tsutsui, romancier de SF, acteur connu dans son pays. La pièce date de 2006 et a été traduite en 2013.

L’éclipse de lune de Davenport et autres poèmes, Jim Harrison

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 21 Mars 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Poésie, La Table Ronde - La Petite Vermillon

L’éclipse de lune de Davenport et autres poèmes, janvier 2017, trad. américain Jean-Luc Piningre, édition bilingue, 192 pages, 7,10 € . Ecrivain(s): Jim Harrison Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

Sans être en rien lyrique ni romantique, le poète-romancier Harrison en pur réaliste réussit à nous convaincre, le temps de la lecture de ses poèmes, de faire un bout de trajet américain avec lui. En Amérique profonde, cela va sans dire, tant les poèmes regorgent d’allusions à ces terres de solitude, pleines d’animaux (pumas, coyotes, corbeaux), à l’heure où Jim se donne un rien de vitalité en humant l’air de lune, la tombée du soir, en décrivant les alentours de son chez soi.

J’ai lu que dans

l’immensité sauvage

le vieux Nieh dressa un tigre des montagnes

à porter son bois pour le feu.

Le poète recueille le menu, l’infime, les vibrations, les altérations de l’air, les violences communes, et distille une mélancolie de fin du monde, où il se sent devenu trop vieux pour vivre les changements.

L’associé, Joseph Conrad

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Lundi, 20 Mars 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Iles britanniques, Nouvelles, Folio (Gallimard)

L’associé, janvier 2017, trad. anglais G. Jean-Aubry, 86 pages, 2 € . Ecrivain(s): Joseph Conrad Edition: Folio (Gallimard)

 

Le parti pris de cette nouvelle extraite du recueil En marge des marées est en apparence convenu. Un auteur de fictions pour revues traîne son ennui dans le fumoir d’un petit hôtel en bord de mer où un vieil arrimeur a ses habitudes. Peu aimable, celui-ci vitupère contre la naïveté des touristes et la complaisance des mariniers à exploiter « cette histoire à dormir debout » concernant un naufrage passé. Et l’homme habituellement taciturne de livrer sa version des faits.

Toute l’affaire, avant de se terminer sur les rochers de la côte, a démarré dans un bureau à Londres où Georges Dunbar, frère du capitaine et propriétaire du bateau le Sagamore s’est associé à Cloete, un américain véreux. Un brave homme influençable, un exécuteur des basses besognes, une épouse frivole et une autre modèle : aucune de ces figures typiques ne manque à l’appel. La physionomie de chacune comme sa psychologie animent des décors un peu miteux de cette Angleterre où on rêve d’autant plus d’argent et d’exotisme que les affaires sont rudes et le ciel plombé.

En réalité, la nouvelle interroge sur l’inspiration et l’écriture. D’ailleurs, l’ancien arrimeur ne daigne prêter attention à l’étranger qu’à partir du moment où il sait qu’il exerce le métier d’écrivain.

Entre, Philippe Jaffeux

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 20 Mars 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Editions Lanskine

Entre, 2017, 12 € . Ecrivain(s): Philippe Jaffeux Edition: Editions Lanskine

 

Philippe Jaffeux ou la poésie fracturée

Comme il reste difficile d’englober l’expression entière du dernier recueil de Philippe Jaffeux, on pourrait accéder cependant à cette œuvre poétique grâce à deux moyens : une étude horizontale et une étude verticale, car les deux lignes de lecture sont souhaitables. Et tout d’abord, au niveau horizontal, où l’on voit à l’œuvre une fracture du poème, des écrits discontinus par des dispositifs graphiques divers – qu’il s’agisse de triangles/mastabas, ou de carrés/formes suprématistes, ou encore de cercles/trous – on devine là une éruption formelle, un jaillissement graphique. De fait, nous sommes confrontés au hasard, à un certain hasard – comme un coup de dés – mais surtout confrontés à une rigueur méthodique qui a dû requérir une attention soutenue au travail éditorial du livre.

Horizontale encore, cette qualité de la prose qui s’organise comme autant de vers mis bout à bout, sans ponctuation, mais avec des espaces à la fin des phrases et des majuscules à la nouvelle phrase – un retour à la ligne comme pour un nouveau vers. On respire ainsi au souffle même de l’auteur qui, lui, scande sa langue sur un rythme personnel et avec suffisamment de méthode pour, à la fois, interroger la rhétorique et ne pas se livrer entièrement à l’application d’un système.

L’heure heureuse, Zakane

Ecrit par Germain Tramier , le Lundi, 20 Mars 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais

L’heure heureuse, QaZaQ, 2015, 44 pages 2,49 € . Ecrivain(s): Zakane

 

Synthétiser le monde

Expérimenter le monde contemporain dans une synthèse des sens ; fuir la banalité, éprouver la désespérance ou l’extase. Une invitation à la poésie, au plein chant, au cri.

 

Zakane c’est un « farouche, vivant », un « clown triste […] artisan de parole », et ça se confirme au travers de son blog : des mots et des espaces (dont nous parlerons prochainement), un espace, une photographie, prolongé par ses textes, convié l’année dernière par Jan Doets à rejoindre sa maison d’édition numérique QAZAQ, L’heure heureuse est son premier recueil, un titre qui, à lui seul, introduit dans sa poétique : cette tentative d’engendrer des instants de lumière ou d’obscurité, au plus près des existences. Le poète est ici perçu comme un être à l’affût du présent, et la poésie comme la possibilité d’expérimenter le monde avec plus d’intensité.