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La Une Livres

Réveiller les lions, Ayelet Gundar-Goshen

Ecrit par Anne Morin , le Mercredi, 29 Novembre 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Presses de la Cité, Israël

Réveiller les lions, septembre 2017, trad. hébreu Laurence Sendrowicz, 413 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): Ayelet Gundar-Goshen Edition: Presses de la Cité

 

Lui, Ethan, est médecin, elle, Liath, est policière. Sirkitt est Erythréenne et n’aurait jamais dû entrer dans leur vie. Il suffit de ce que l’on appelle – très vite, pour ne plus y penser – un concours de circonstances, pour que le chemin de ces trois personnages dévie de son cours, prenne un autre sens.

Ethan, muté depuis peu à l’hôpital de Beer Sheva pour n’avoir pas voulu fermer les yeux sur la corruption de son maître et professeur de médecine, décide après une journée éreintante de lancer son 4X4 sur une piste en plein désert et en pleine nuit, une nuit de pleine lune. Et il percute quelque chose qui se révèle être un homme Noir. Après examen de l’accidenté, décidant qu’il ne peut plus rien pour lui, il laisse l’homme agonisant et prend la fuite.

Le lendemain, une Erythréenne sonne à sa porte, lui rapportant le portefeuille qu’il a laissé tomber près du mourant. S’ensuit une sorte de chantage : elle se taira, mais chaque nuit il devra soigner, dans un hôpital de fortune installé dans un hangar désaffecté en plein désert, les nombreux sans papiers arrivés par des canaux plus ou moins douteux et qui manquent du minimum de soins.

Le charme des sirènes, Gianni Biondillo

Ecrit par Zoe Tisset , le Mercredi, 29 Novembre 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Polars, Roman, Métailié, Italie

Le charme des sirènes, octobre 2017, trad. de l'italien par Serge Quadruppani, 341 pages, 21 € . Ecrivain(s): Gianni Biondillo Edition: Métailié

 

Nous sommes à Milan, l’intrigue tourne autour du meurtre d’un top-modèle à un grand défilé de mode. L’inspecteur Ferraro chargé de l’enquête est lui plutôt issu du milieu populaire et a gardé des amis « peu recommandables » comme Mimmo. « Du calme mon cul, gronda Mimmo à l’adresse du costaud. Déjà, qu’il fait une putain de chaleur et vous avec tout c’te bordel, vous m’avez réveillé ! Même les gamins dans la cour de l’immeuble savaient qu’à certaines heures, il valait mieux éviter de réveiller l’Animal ». Leur relation repose sur un mutuel respect et sur beaucoup de faux-semblants. « Depuis des années, Ferraro faisait semblant de ne pas savoir comment Mimmo gagnait sa vie, lequel Mimmo de son côté, faisait semblant d’être un informateur de Ferraro. Ils étaient clou et L’Animal ».

En  même temps, dans le sud de l’Italie nous assistons à une rencontre improbable entre Moustache, un clochard, et Aïcha, une enfant immigrée esseulée, à la recherche d’un frère disparu soudainement. Aïcha qui découvre le monde moderne, technique et opulent de l’occident : « Si elle n’avait pas été inquiète pour son frère, il lui aurait semblé se trouver dans une fable où se passent des choses très curieuses : sèche-main d’air, vieux sages immortels, escaliers qui bougent, trains dans le ventre de la terre ».

La Légende de Bruno et Adèle, Amir Gutfreund

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 28 Novembre 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Gallimard, Israël

La Légende de Bruno et Adèle, novembre 2017, trad. hébreu Katherine Werchowski, 286 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): Amir Gutfreund Edition: Gallimard

 

Lorsque l’on recense des livres, il vaut mieux réfléchir avant de laisser sa plume écrire le mot chef-d’œuvre, tant il est galvaudé : à en croire la réclame, en effet, les maisons d’édition ne publient rien d’autre, surtout l’automne venu. En l’occurrence, cependant, le terme chef-d’œuvre est justifié. Même si La Légende de Bruno et Adèle ne ressemble pas à un titre de roman policier, c’en est un, extraordinaire et d’un niveau de tension comparable, par exemple, au Silence des agneaux.

Amir Gutfreund est mort à l’âge de cinquante-deux ans, le 27 novembre 2015, en corrigeant les épreuves de son ultime roman. Formé aux mathématiques, il travaillait pour l’armée de l’air. La télévision avait fait appel à lui, comme co-scénariste de la remarquable série Otages (Bnei Aruva), aux côtes du scénariste principal, Gal Zaid (par ailleurs acteur dans une autre grande série, Hatufim – noter que ces deux séries israéliennes firent l’objet de médiocres adaptations américaines). C’est dire que nous sommes en présence d’un écrivain qui connaît son métier et qui sait construire une intrigue.

L’œil de tous les yeux, Bérénice Constans

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 28 Novembre 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Arts, Fata Morgana

L’œil de tous les yeux, novembre 2017, 96 pages, 16 € . Ecrivain(s): Bérénice Constans Edition: Fata Morgana

 

Histoires de l’œil

 

Poétesse et peintre, Bérénice Constans apprend à voir, renverse les règles de la peinture (mais pas seulement) afin d’apprendre au lecteur ce qu’il y a dedans. Il faut parfois des stratégies et, avant d’entrer en ce qu’on nomme art, passer par d’autres surfaces. Mais non sans de multiples précautions que souligne la « narratrice » de L’œil : « Se servant de l’entrelacs de branches tombantes pour mieux se dissimuler, elle observait la tache sur le mur, en se mordant nerveusement la lèvre. Plusieurs fois de suite, elle ouvrit et ferma les yeux, en essayant de s’arracher à̀ sa vision. Mais, il y eut en elle comme une cassure. Elle n’osait plus bouger, de peur de découvrir de nouvelles taches », et ce avant un ébranlement : « L’obscurité́ allait s’abattre sur elle en une pluie de cendres noires ». Mais les taches demeurent, comme la peinture (du moins celle de Bérénice Constans), entre réalité et onirisme.

Un petit héros, Fédor Dostoïevski

Ecrit par Nathalie de Courson , le Lundi, 27 Novembre 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Russie, Nouvelles, Folio (Gallimard)

Un petit héros, septembre 2017, traduit du russe par Gustave Aucouturier, 79 pages . Ecrivain(s): Fédor Dostoïevski Edition: Folio (Gallimard)

 

La Collection Folio 2 € présente l’avantage de mettre à portée de la main, dans toutes les librairies de quartier, certaines œuvres de grands écrivains que l’on n’a pas toujours remarquées et qui contiennent en germe certains de leurs thèmes les plus importants. C’est le cas de Un petit héros publié en septembre dernier dans la traduction classique de Gustave Aucouturier (et dont celle, plus récente, d’André Markowicz pour Actes Sud, ne diffère pas considérablement). Cette nouvelle de 70 pages mérite d’être isolée car elle est très particulière dans la production de Dostoïevski, d’abord par les circonstances de sa composition : l’auteur, arrêté pour complot politique en 1849, attendant la sentence qui le condamnera à mort, s’empresse de l’écrire aussitôt qu’il peut disposer d’une bougie, d’une plume et d’un papier. Mais bien loin de raconter le dernier jour d’un condamné, ce récit a pour narrateur un garçon de onze ans que l’on envoie passer l’été dans une maison pleine de gaieté, et où de multiples invités virevoltent en une fête permanente et artificielle, comme en témoignent d’étourdissantes énumérations :