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Histoire

Disputes au sommet, Ismail Kadaré (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Lundi, 07 Mars 2022. , dans Histoire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays de l'Est, Récits, Fayard

Disputes au sommet, janvier 2022, trad. albanais, Tedi Papavrami, 216 pages, 19 € . Ecrivain(s): Ismail Kadaré Edition: Fayard

 

Le sous-titre Investigations définit précisément le contenu et le dessein de cet ouvrage de l’écrivain albanais pressenti à plusieurs reprises pour le Nobel de littérature, ce à quoi il est fait allusion de façon récurrente dans le fil de ce récit, cette potentialité, qui lui a valu quelques tracasseries de la part des autorités de son pays, ayant un rapport étroit avec « l’affaire ».

« L’affaire » en question, sujet passionnant, présenté comme unique préoccupation de cette œuvre singulière de Kadaré, n’est autre qu’un entretien téléphonique de trois minutes ayant eu lieu en juin 1934 entre Staline et Pasternak à propos de l’arrestation de Mandelstam.

L’auteur analyse l’une après l’autre pas moins de treize versions peu ou prou connues de cette conversation, chacune rapportée tantôt par des témoins directs ou présupposés, ou se prétendant tels, tantôt par des protagonistes évoluant dans la sphère politico-littéraire entourant Pasternak et Mandelstam.

« Des treize versions que je possédais, chacune tentait, solitaire et butée, de livrer la vérité ».

Les Communards, Michel Winock, Jean-Pierre Azéma (par Vincent Robin)

Ecrit par Vincent Robin , le Jeudi, 06 Janvier 2022. , dans Histoire, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Seuil

Les Communards, Michel Winock, Jean-Pierre Azéma, mars 2021, 224 pages, 8 €

Par tradition, le terme de « Communards » désigne ces citadins qui prirent part à l’insurrection parisienne de 1871. Ce fut ainsi, au lendemain de la sévère défaite napoléonienne de Sedan (le 1er sept. 1870), que cette population urbaine entendit s’opposer vigoureusement, d’abord à l’invasion prussienne, ensuite à l’Assemblée versaillaise conduite par Thiers et préconisant une collaboration avec l’envahisseur. Par recul historique faut-il considérer que ces citadins révoltés furent essentiellement des ouvriers et artisans soutenus par des membres de la petite bourgeoisie parisienne. Forte de la Garde nationale qui se rangea majoritairement à ses côtés, cette importante fraction insurgée, le plus souvent populaire, entendit alors répondre aux menaces qui se profilaient face à elle de deux côtés. Par une réaction armée, par une reconsidération des statuts sociaux courants et par l’affirmation de son autonomie. C’est ainsi, grâce à une charte élaborée par l’assemblée communale élue à la majorité que cette émanation populaire définissait bientôt ses principes d’immunité et de régulation sociale. Au bout de quelques mois cependant, ce mouvement collectif aux aspirations d’indépendance démocratique et de justice sociale allait succomber dans un affreux bain sanglant, généré par l’acharnement et la sévérité militaires de « Français-Versaillais », finalement bien plus compréhensifs et dociles à l’égard de l’occupant germanique.

The Civil War : A Narrative, Shelby Foote (par Alain Faurieux)

Ecrit par Alain Faurieux , le Mardi, 23 Novembre 2021. , dans Histoire, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, USA

 

Vol 1 : Fort Sumter to Perryville (1958)

Vol 2 : Fredericksburg to Meridian (1963)

 

La méthode Foote

Foote historien ou Foote écrivain ? Les deux sont indissociables. Mais Foote lui-même, débutant The civil War, se présente comme avant tout écrivain. Ses sources sont principalement les archives militaires – un corpus considérable de 128 volumes, la presse populaire, les archives familiales de grandes familles qu’il a pu contacter individuellement ; ainsi qu’une poignée d’ouvrages. Ce matériau est ensuite intégré au récit de Foote, désireux de ne voir aucune note ou bas de page rompre le flot.

La Liste de Varian Fry, Bernadette Costa-Prades (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 09 Novembre 2021. , dans Histoire, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Albin Michel

La Liste de Varian Fry (Août 1940 - Septembre 1941), Le sauvetage des artistes et intellectuels par le premier Juste américain, Bernadette Costa-Prades, janvier 2020, 220 pages, 19 € Edition: Albin Michel

Qu’eurent en commun André Breton, Franz Werfel, Marc Chagall, Hannah Arendt, Victor Serge, André Masson, Lion Feuchtwanger, Jacques Hadamard, et quelques centaines d’autres personnes dont l’Histoire n’a pas retenu le nom (on pourrait y ajouter Walter Benjamin, passé en Espagne, mais finalement refoulé – voir les pages 73-82) ? Ils doivent à un Américain oublié, Varian Fry (1907-1967), d’avoir pu quitter la France occupée pour des cieux plus cléments. Fry avait voyagé en Allemagne dès 1935 et compris ce qui allait se produire. Depuis Marseille, aidé notamment par le vice-consul américain Hiram Bingham (homonyme de son père, qui avait découvert en 1911 le site du Machu Picchu), soutenu d’abord et lâché ensuite par Eleanor Roosevelt, Fry organisa plusieurs filières d’évasion et de fabrication de faux papiers. Contraint de rentrer aux États-Unis, déçu et amer, il chercha en décembre 1942 à porter à la connaissance de l’opinion américaine le processus génocidaire qui se déroulait en Europe ; sans succès, la dénonciation de la Shoah passant alors pour de la propagande complotiste (même si l’épithète infamante n’avait pas encore été forgée). Fry abandonna le journalisme, devint professeur de latin et mourut dans l’oubli complet. En 1996, pourtant, il fut le premier citoyen américain honoré du titre de « Juste parmi les nations ».

Le Pays des Celtes, Mémoires de la Gaule, Laurent Olivier (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Vendredi, 29 Octobre 2021. , dans Histoire, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Le Pays des Celtes, Mémoires de la Gaule, Laurent Olivier, Seuil Points Histoire, avril 2021, 448 pages, 10,80 €

À qui désire un livre sur les Celtes, leur culture, leur histoire, etc., le livre de Laurent Olivier ne s’adresse pas, ou du moins pas tout à fait ; on recommande plutôt les ouvrages de Venceslas Kruta, soit Les Celtes, aux Puf pour les amateurs de petits formats, soit Les Celtes, Histoire et dictionnaire, chez Robert Laffont pour les très curieux. D’ailleurs, le premier de ces deux ouvrages est mentionné par Laurent Olivier dans la riche bibliographie à la fin du Pays des Celtes, ce qui n’empêche en rien la critique du point de vue « ethnique » sur les Celtes de Kruta, qui confond « l’extension des productions de la culture matérielle » avec des « phénomènes de migration de peuples, pour ne pas dire de mouvements de conquête ethnique » :

« Selon ce schéma, les Celtes, finalement, reviennent occuper la place laissée vacante par les Germains de la “préhistoire allemande”, qui, l’un et l’autre, avaient été défaits en 1945. Sur un fonds aussi poreux aux interprétations de l’archéologie raciale allemande, il n’est guère surprenant de voir se greffer des thèses visant explicitement à la réhabilitation des “Indo-Européens” ou plus exactement des “Indo-Germains”, tels que les avaient célébrés les anciens chercheurs du régime national-socialiste ».