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Essais

Un éblouissement sans fin. La poésie dans le soufisme, Eric Geoffroy

Ecrit par Marc Michiels (Le Mot et la Chose) , le Samedi, 18 Octobre 2014. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Seuil

Un éblouissement sans fin. La poésie dans le soufisme, préface du Cheikh Khaled Bentounes, septembre 2014, 368 p. 21 € . Ecrivain(s): Eric Geoffroy Edition: Seuil

 

« Tu es à jamais voyageur, de même que tu ne peux t’établir nulle part », Ibn ‘Arabî

 

Eric Geoffroy est un islamologue arabisant à l’Université de Strasbourg. Il enseigne également à l’Université Ouverte de Catalogne, et à l’Université Catholique de Louvain. Spécialiste du soufisme et de la sainteté en Islam, il travaille aussi sur la mystique comparée, et les enjeux de la spiritualité dans le monde contemporain. Il a publié neuf ouvrages, plusieurs de ses ouvrages sont traduits en différentes langues.

Le dernier ouvrage d’Eric Geoffroy, Un éblouissement sans fin. La poésie dans le soufisme, publié dans la collection Les Dieux et les Hommes aux éditions du Seuil, est un livre évènement pour qui sait faire abstraction à une actualité anxiogène et guerrière. L’ouvrage dévoile les tissus du corps noir de l’ignorance ; il apporte ainsi lumière, connaissance, esprit et poésie du langage et du patrimoine spirituel du monde musulman.

La science expliquée à mes petits-enfants, Jean-Marc Lévy-Leblond

Ecrit par Christophe Gueppe , le Samedi, 11 Octobre 2014. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Seuil

La science expliquée à mes petits-enfants, septembre 2014, 102 p. 8 € . Ecrivain(s): Jean-Marc Lévy-Leblond Edition: Seuil

Qui ne rêverait d’avoir un grand-père comme Jean-Marc Lévy-Leblond, aussi sage et aussi savant, et qui ne souhaiterait avoir une petite fille aussi curieuse, instruite et intelligente que celle qui nous est présentée ?

Sur quoi porte leur discussion très enrichissante ? Sur la science, sur ce qu’elle est aussi bien que sur les processus par lesquels elle se fait. De ce point de vue, J.M. Lévy-Leblond se présente, dans cet ouvrage, à la fois comme un scientifique, tant au niveau théorique que pratique, comme un historien des sciences, un philosophe, un pédagogue, mais aussi un homme, pétri de sensibilité, de moralité et de sens civique.

Ce sur quoi il veut insister, en tout premier lieu, c’est sur la complexité du travail d’un scientifique. C’est cette complexité qui fait que, aujourd’hui, la science dans ses avancées demande une très grande spécialisation, mais aussi un travail de collaboration. Aucun scientifique actuel ne peut prétendre dominer l’ensemble de sa discipline, ou même simplement une branche de celle-ci. Ses connaissances très pointues vont donc de pair avec une profonde cécité, qui demande de sa part beaucoup d’humilité, comme il le dit à un moment : « Ce furent plusieurs mois de déprime avant qu’un chercheur renommé ne m’explique amicalement que c’était normal et que le travail de recherche consiste précisément à passer le plus clair de son temps à ne pas trouver, à ne même pas savoir exactement ce qu’on cherche, et pire encore, à se tromper ».

L’art de rendre les femmes fidèles, Aurélien Scholl

, le Lundi, 22 Septembre 2014. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Mille et une nuits

L’art de rendre les femmes fidèles, août 2014, 56 pages, 2,50 € . Ecrivain(s): Aurélien Scholl Edition: Mille et une nuits

 

Mission impossible !

Les éditions Mille et une nuits publient un court opus d’un auteur tellement oublié que je croyais que c’était un débutant. Or il est mort depuis 1902.

Aurélien Scholl appartient à cette catégorie des chroniqueurs étincelants qui apparurent avec l’essor de la presse à grand tirage au 19è siècle.

L’art de rendre les femmes fidèles se lit facilement et la misogynie (feinte ou réelle) de l’auteur amuse, même si certains propos datent un peu. Toutes les femmes lui semblent infidèles mais il n’y a rien à faire pour y remédier car « l’homme et tous les autres singes ne sont pas faits pour vivre seuls ».

Et la conclusion à laquelle il parvient mérite un détour. Seul un mari peut rendre sa femme fidèle : en étant jaloux, ombrageux, grossier et brutal. « A ces conditions, sa femme sera fidèle… à son amant ! »

La Grande Guerre des écrivains d’Apollinaire à Zweig, Antoine Compagnon

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 18 Septembre 2014. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard), Histoire

La Grande Guerre des écrivains d’Apollinaire à Zweig, mai 2014, 840 p. 10,60 € . Ecrivain(s): Antoine Compagnon Edition: Folio (Gallimard)

 

« Il vient une odeur de genièvre

Des forêts que ravage le feu

Les femmes gémissent sur leurs fils

On entend pleurer dans les villages les veuves »

Anna Akhmatova, Juillet 14, dans Troupe Blanche, 1917

Et tout le reste est Histoire, pourrait-on dire en sortant, sonné, admiratif, de cette somme-anthologie unique en son genre. Plus d’un an de rédaction a été nécessaire pour accoucher de ce livre, et combien d’heures pour sa gestation ? C’est à une montagne que s’est attaqué Antoine Compagnon, ici, en partant de lui-même ; ses deux grands-pères poilus, « ses » veuves et son histoire intime, pour traverser toute la guerre, d’écrivain en écrivain et nous fournir (un petit livre savant en soi) une fondamentale préface et un récit de sa méthode de travail. Cet Anapurna a été vaincu ;

La joie d’amour, pour une érotique du bonheur, Robert Misrahi

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Jeudi, 18 Septembre 2014. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Autrement

La joie d’amour, pour une érotique du bonheur, janvier 2014, 251 p. 15 € . Ecrivain(s): Robert Misrahi Edition: Autrement

 

La joie d’amour. Pour une érotique du bonheur aurait pu aussi s’intituler « L’anti métaphysique de l’amour » car à l’encontre de Schopenhauer qui assimilait l’amour à l’instinct sexuel afin de confirmer son pessimisme, influençant ainsi la littérature réaliste du XIX° siècle et suggérant à Freud la théorie de l’inconscient pour comprendre les névroses, Robert Misrahi veut montrer qu’il y a « un lien intrinsèque entre (sa) conception du bonheur et (sa) conception de l’amour ».

Après une introduction et un premier chapitre susceptibles de dérouter le lecteur peu familier du genre (définition des termes, problématisation, détour par l’analyse du devoir moral), la patience est récompensée par des pages de plus en plus captivantes au fur et à mesure que sont déroulés les fils de l’amour réel dans la vie quotidienne, puis dans la littérature et enfin dans la vie de ceux qui en font le sens de toute leur existence. Passée la deuxième moitié, le lecteur devient très curieux de connaître la solution que le philosophe va proposer à la question initiale : vivre durablement un amour heureux est-il possible ? Les références littéraires détaillées, la mise en scène des exemples à travers des personnages, l’appel à des termes du quotidien pour synonymes de termes spécifiques, concilient rigueur philosophique et souci d’être compris des non-spécialistes.