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Roman

La Condition humaine et autres récits, André Malraux en La Pléiade

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 02 Novembre 2016. , dans Roman, Les Livres, La Une Livres, Récits, La Pléiade Gallimard

Malraux, La Condition humaine et autres récits, Préface Henri Godard, septembre 2016, 1184 pages, 55 € (prix de lancement) . Ecrivain(s): André Malraux Edition: La Pléiade Gallimard

 

« Tchen regarda l’heure. Dans ce magasin d’horloger, trente pendules au moins, remontées ou arrêtées, indiquaient des heures différentes. Des salves précipitées se rejoignirent en avalanche. Tchen hésita à regarder au-dehors ; il ne pouvait détacher ses yeux de cet univers de mouvements d’horlogerie impassibles à la révolution » (La Condition humaine).

Malraux, forcément : écrivain (1) ! Qui pourrait en douter ? Et si le doute s’insinue, l’escapade dans cet opus que lui consacre La Pléiade permet de lever toute hésitation. Ecrivain aventurier, sensible aux frissons du temps et de son temps, aux révoltes, aux révolutions, à sa place dans l’histoire, à l’histoire qui s’écrit et qu’il est aussi en train d’écrire.

La ligne de fuite, Robert Stone

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 02 Novembre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, L'Olivier (Seuil)

La ligne de fuite, juin 2016, trad. américain Philippe Garnier, 375 p. 22,50 € . Ecrivain(s): Robert Stone Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Livre paru dans les années 90, La Ligne de fuite est dans la longue série des livres écrits sur la guerre du Vietnam et ses suites aux USA. Ce roman fut intitulé d’abord Les guerriers de l’Enfer, titre repris au cinéma par Karel Reisz pour un film intéressant, dans lequel le « gueule » de Nick Nolte fait merveille. Les éditions de L’Olivier reprennent ce livre qui n’eut guère de succès à sa première édition, dans une traduction nouvelle sous la plume de Philippe Garnier. Et l’on peut espérer que cette fois le succès sera au rendez-vous, car le livre, tel quel, le mérite. Philippe Garnier, dans son élément, produit une traduction dynamique et « d’époque ». A mille lieues des approximations stylistiques de celle – erratique – de 1994, parue aux éditions Série Noire, Garnier nous donne une version impeccable, soyeuse et élégante.

On plonge donc avec délice dans un univers très années 60 – Guerre du Vietnam et puis babas cool, fumette, LSD, pop music et rock psychédélique. S’y retrouvaient des ombres célèbres de l’époque, rock stars, artistes ou Hell Angels.

Le fils de mille hommes, Valter Hugo Māe

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 31 Octobre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue portugaise, Métailié, La rentrée littéraire

Le fils de mille hommes, septembre 2016, trad. portugais Danielle Schramm, 192 p. 18 € . Ecrivain(s): Valter Hugo Mãe Edition: Métailié

Déjà remarqué pour L’Apocalypse des travailleurs, son premier roman pour lequel il avait reçu le prix Saramago, Valter Hugo Māe revient ici avec un roman prenant, qui nous plonge sans ménagement dans les noirceurs de l’âme humaine ; mais pas les spectaculaires, non, plutôt les noirceurs banales, quotidiennes, les petites et grandes lâchetés, la bêtise commune, qui peuvent provoquer tout autant de malheur et de désespoir autour d’elles. Ce qui surprend, c’est que s’il nous conduit là où meurt tout espoir, c’est pour nous hisser jusqu’à la lumière, nous montrant ce que l’humain peut aussi avoir de plus beau et qui est d’une telle simplicité qu’on se demande vraiment pourquoi cela reste tellement hors de notre portée.

C’est vraiment un grand écart qui est réalisé ici, et Le fils de mille hommes devient une sorte de roman-médecine. Après avoir posé les bases, Valter Hugo Māe nous raconte plusieurs histoires où on découvre les origines, le vécu douloureux, difficile et même sordide des différents protagonistes, puis un fil va venir ensuite coudre ensemble toutes ces histoires. Ce fil passe par Crisóstomo, un petit pêcheur de 40 ans, un homme bon mais désespérément seul. Or, c’est cet immense désir de l’autre, soutenu par la générosité qu’il a en lui, qui va permettre de réunir en une grande famille hétéroclite une bonne partie des personnages malmenés et estropiés de ce roman. Il serait dommage de trop en dire, mais l’essentiel tient en un mot : l’amour. L’amour qui surpasse tout, transforme tout, panse les plaies, rend beau ce qui était laid, dissout les préjugés.

Le Bonheur, Emmanuel Darley

Ecrit par Marie du Crest , le Lundi, 31 Octobre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Actes Sud

Le Bonheur, 135 pages, 18 € . Ecrivain(s): Emmanuel Darley Edition: Actes Sud

 

 

« Un jour je partirai, un jour, j’irai là-bas »

Le Bonheur est l’ultime roman d’Emmanuel Darley. Est-ce d’ailleurs un roman ? E. Darley a toujours affirmé que ses textes se situaient à la marge des genres littéraires. Il n’y a pas de personnages définis ici, de géographies déterminées, de trajectoires de vie complètes : tout est fragmenté, comme ces vies en pièces que le lecteur croise. Il adopte d’ailleurs une écriture faite de ruptures, de blancs et de blocs. Les hommes et les femmes qui apparaissent et disparaissent ne sont que des « ombres » (p.98). Ils sont ceux qui suivent les chemins vers « le pays bonheur », qui un jour vont partir. Eux qui aujourd’hui sont dans nos journaux, sur nos écrans, « les migrants, les réfugiés », les clandestins et les naufragés, eux dont parle Maylis de Kerangal, sept ans après E. Darley, dans un court texte : A ce stade de la nuit.

Le printemps des corbeaux, Maurice Gouiran

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Samedi, 29 Octobre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, La rentrée littéraire, Jigal

Le printemps des corbeaux, septembre 2016, 248 p. 18,50 € . Ecrivain(s): Maurice Gouiran Edition: Jigal

 

 

Pour son vingt-sixième roman publié par Jigal, à 70 ans et des brouettes, Maurice Gouiran offre à ses lecteurs un condensé de son savoir-faire de conteur d’histoires dans l’Histoire, de professionnel de la littérature noire.

Dans Le printemps des corbeaux, il nous transporte une nouvelle fois à Marseille, en mai 1981, au moment de l’élection de François Mitterrand à la présidence. Louka, alias Luc Rio, jeune étudiant en informatique et ancien gamin de la DDASS, développe une asocialité matinée d’esprit revanchard : « J’étais simplement d’un détachement amoral envers mon prochain, sans doute parce que je crois bien n’avoir jamais aimé personne. En fait, c’est encore plus grave que ça : je n’aime rien » (p.9).