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Les Livres

L'Or, l’Empire et le Sang, Martin Bossenbroek (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Lundi, 17 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Seuil, Histoire

L'Or, l’Empire et le Sang, mai 2018, trad. du néerlandais Bertrand Abraham, 558 pages, 25 € . Ecrivain(s): Martin Bossenbroek Edition: Seuil

 

Quelles furent les origines et les causes profondes de la guerre anglo-boer ? Ses fondements idéologiques ? Martin Bossenbroek, historien néerlandais, tente de répondre à ces questions dans son ouvrage L’or, l’Empire et le sang.

Dans son introduction, il situe d’emblée ce conflit : c’est tout d’abord une « expression paroxystique atypique de l’impérialisme britannique ». C’est la seule épreuve de force de grande envergure entre blancs. Ce conflit a conduit l’Empire britannique à la recherche d’alliances et à sortir du « splendide isolement ». Autre caractéristique, qui prend un relief tout particulier pour des lecteurs contemporains, la place donnée aux médias : 200 correspondants de guerre furent mobilisés, un réseau étendu de communications télégraphiques, des transports intensifiés vers cette partie du continent africain, donnèrent un grand écho à ce conflit. Enfin, et c’est le sujet le plus attendu, les conséquences de cette guerre sur les populations civiles : 230.000 blancs et non-blancs furent internés, 46.000 d’entre eux périrent par suite de malnutrition et de leurs conditions de détention.

Ce long sillage du cœur, Philippe Leuckx (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Lundi, 17 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Ce long sillage du cœur, éd. La Tête à l’envers, avril 2018, 90 pages, 15 € . Ecrivain(s): Philippe Leuckx

 

Avec un certain décalage horaire du cœur (« Vous alliez à l’ombre Quand je désirais la lumière ») et son sens de l’observation codant les idées sous-jacentes (« Je m’égarais alors A lire entre les fils De clôture Les taches De vaches pie »), inversant l’idée de manière à donner du tonus à une image pouvant suggérer une forme d’écriture – je songe à celle de Dotremont –, Philippe Leuckx laisse surgir des mots une sorte d’animalité sauvage imprévisible et naturelle semblant inverser les rôles dans le temps, à rebours d’enfance car « chaque poème rend pèlerin de soi ».

Avec ses Murs de pierres grises comme semées par le Petit Poucet de son devenir, Philippe arpente son « long sillage du cœur » avec une tendresse menant le lecteur attentif à la « langue douce de l’errance ».

Les textes plus longs alternent parfois avec une seule idée reprise à la page suivante donnant au livre cette impression de dénivelé suggérant la progressivité de la démarche accentuant encore la rumeur d’écrire.

Oiseau-moi, Edith Azam (par France Burghelle Rey)

Ecrit par France Burghelle Rey , le Lundi, 17 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Editions Lanskine

Oiseau-moi, avril 2018, 36 pages, 12 € . Ecrivain(s): Edith Azam Edition: Editions Lanskine

 

Le nouvel opus d’Edith Azam s’ouvre sur un vers performatif qui, en même temps que la parole, fait naître, dans son identité, celle ici d’un oiseau, celle qui semble bien le double de la narratrice, comme l’indique le titre formé de chaque côté du trait d’union des deux termes équivalents. Il convient également de rapprocher deux noms, celui d’Hannah, premier mot de l’incipit, et le patronyme Azam. Tous les deux sont d’origine hébraïque puisque l’un est issu de l’hébreu et signifie « grâce », mère du prophète Samuel ou de la Vierge Marie selon les testaments, et le second est une variante régionale du nomde baptême Adam.

Dans son recueil précédent publié en 2015 chez POL, Edith Azam a déjà donné à une autre un nom, éponyme du titre, Caméra, qui comme il l’indique scrute lucidement la vie et, du même coup, le néant. Trouvera-t-elle dans ce nouvel opus une raison à espérer ? Car, avant encore, elle a écrit à propos de l’autre : « Il contamine notre espace, veut nous réduire à petit feu ».

Dès les premiers poèmes, apparaissent des affirmations de solutions possibles : l’eau, l’air, les éléments qui peuvent sauver et, au milieu d’eux, le corps, évident, avec ses souffrances, qui entre en résonance avec les mots malgré leur chute.

Je suis un zèbre, Le témoignage bouleversant d’une ado surdouée, Tiana (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 17 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Petite bibliothèque Payot

Je suis un zèbre, Le témoignage bouleversant d’une ado surdouée, août 2018, 188 pages, 7,50 € . Ecrivain(s): Tiana Edition: Petite bibliothèque Payot

Un témoignage à la fois très personnel, mais très important aussi sur un sujet que l’on connaît peu ou surtout très mal. En effet, si le terme zèbre reste encore peu connu, tout le monde a une idée plus ou moins claire et surtout très préconçue de ce que peut et doit être un surdoué. Alors pourquoi zèbre ?

Parce que de ces enfants, ados, adultes dits surdoués, pas deux ne se ressemblent, par contre une bonne partie d’entre eux non seulement peuvent être en échec dans leur vie ou leur scolarité, mais plus encore, peuvent être enfermés dans des problématiques graves qui leur interdit toute vie normale et pouvant les conduire jusqu’au suicide. Nous sommes donc loin de cette image d’Épinal du brillant génie qui ne peut que tout réussir, plus et mieux que tout le monde et être la fierté de ses parents et professeurs.

C’est pour cela qu’un témoignage tel que celui de cette toute jeune Tiana est capital.

« C’est quoi un surdoué ? C’est quelqu’un dont le cerveau pense différemment » – ce qui commence à être prouvé maintenant scientifiquement : il s’agit, effectivement et véritablement, d’un fonctionnement cognitif différent. « Pas plus intelligent. Pas plus doué. Différent. Très sensible. Trop, même ».

Les derniers jours d’Henri-Frédéric Amiel, Roland Jaccard (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 14 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, Serge Safran éditeur

Les derniers jours d’Henri-Frédéric Amiel, septembre 2018, 15,90 € . Ecrivain(s): Roland Jaccard Edition: Serge Safran éditeur

 

« J’ai compris trop jeune que je serais incapable de réaliser mes idéaux, que le bonheur est une chimère, le progrès une illusion, le perfectionnement un leurre et que, même si toutes mes ambitions étaient assouvies, je ne trouverais encore là que vide, satiété, rancœur. La désillusion complète m’a conduit à l’immobilité absolue. N’étant dupe de rien, je suis mort de fait ».

Entre 1839 et 1881, Henri-Frédéric Amiel tient son Journal intime, soit 16.847 pages ; plus modeste Roland Jaccard écrit le journal intime du Genevois, prend sa voix et sa plume le temps d’un petit roman. Il se glisse dans la peau du professeur en désespoir, du collectionneur de conquêtes qu’il s’empresse d’abandonner, de l’écrivain qui choisit le cimetière de Clarens, au-dessus de Montreux comme dernier domicile connu, face au lac Léman, sans savoir que Vladimir Nabokov y repose également : Je ne me doutais pas qu’un jour lointain… nous irions comme deux fantômes au lever du jour à la chasse aux papillons. Roland Jaccard qui s’y connaît en trahisons, trouve là un allié, un vieux complice, comme le sont aussi Schopenhauer, Schnitzler et Cioran.