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Les Livres

Kinderzimmer, Valentine Goby

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 23 Août 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Actes Sud, La rentrée littéraire

Kinderzimmer, 21 août 2013, 218 pages, 20 € . Ecrivain(s): Valentine Goby Edition: Actes Sud

 

Comment écrire sur la déportation, cet épisode tragique de l’histoire de la seconde guerre mondiale, sujet de maints ouvrages d’historiens et d’anciens déportés regroupés sous le nom de littérature concentrationnaire ? En dévoilant, par la fiction romanesque, un aspect peu connu de la vie des camps : la naissance de bébés dans les camps de concentration nazis.

En 1944, Ravensbrück est majoritairement un camp de femmes ; il compte plus de quarante mille détenues. Mila, femme travaillant dans une librairie d’édition musicale, est détenue à Ravensbrück, elle a été dénoncée par un mouchard et déportée.

La première partie du roman décrit, avec une précision digne d’une historienne, la vie dans le camp, la cruauté des Schwester, des Aufseherin (gardiennes et surveillantes) vis-à-vis des déportées. Valentine Goby décrit le supplice lors de l’Appel, qui peut durer plusieurs heures sous un froid insupportable, dans des tenues les plus légères : « C’est le moment où tes pupilles roulent comme des yeux de mouches. Voir. Mesurer l’espace. Bouger les pupilles d’un coin à l’autre de l’œil et de haut en bas sans remuer la tête, sans rien activer du reste du corps qui doit être immobile, ont dit les Françaises : faire la stèle ».

Le bonheur pauvre rengaine, Sylvain Pattieu

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 22 Août 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, La Brune (Le Rouergue)

Le bonheur pauvre rengaine, 21 août 2013, 290 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): Sylvain Pattieu Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

Un historien c’est déjà un sacré client pour nous raconter quelque chose. Un écrivain (sachant écrire, évidemment) c’est une autre entrée dans une histoire ; alors, si l’écrivain – qui sait écrire, c’est sûr – utilise aussi sa casquette d’historien de belle valeur, ça donne ce livre-là : on s’y croirait, on s’y plaît, et – comme on dit d’un beau produit – c’est du solide, monsieur ! du vrai bois dont on sent le fil de page en page – pas de la camelote de bazar…

On plonge avec notre imaginaire mais aussi notre appétit d’une « vraie histoire » dans un Marseille plus réaliste que la meilleure collection de cartes postales anciennes, juste sépia – ce qu’il faut ; on s’embarque et cela, jusqu’à la dernière page à regret avalée…

Rien que le titre chante comme une de ces chansons réalistes de l’entre-deux guerres : une « Goualante du pauvre Jean » – ici, de toutes ces Yvonne, Yves, l’égaré de Bretagne et ce Cyprien, « nègre du Dahomey » passé souteneur de petites femmes, comme d’autres deviennent maçons… « Le bonheur, pauvre rengaine » dans une France sortie tout fraîchement de la boue des tranchées, cul par-dessus tête – on dirait de nos jours, avec une mimique de psy, « pantelante du trauma de la Grande Guerre ».

Né sous les coups, Martyn Waites

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 21 Août 2013. , dans Les Livres, Recensions, Polars, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, La rentrée littéraire, Rivages/Thriller

Né sous les coups (born under punches) 21 août 2013. trad de l’anglais Alexis Nolent. 459 p 22€ . Ecrivain(s): Martyn Waites Edition: Rivages/Thriller

 

Si vous n’avez pas une grande sympathie pour « la dame de fer », Margaret Thatcher, la lecture de ce livre vous la fera détester à jamais. L’action de ce roman se situe alternativement dans deux époques : « maintenant » et « avant ». « Avant » c’est 1984 avec en fond d’écran permanent et souvent même au cœur de l’action, la dernière grande grève ouvrière en Angleterre, la grève des mineurs du printemps 84, écrasée par la répression du gouvernement Thatcher. 1984, l’Angleterre bascule dans une nouvelle ère, sinistre. Comment ne pas évoquer, au passage, le 1984 de George Orwell ?

« Les temps modernes, tels que nous les connaissons, ont débuté le lundi 28 mai 1984. (…) C’est ce jour-là que notre pays a changé pour toujours, que la bombe à retardement a été enclenchée et le compte à rebours lancé. Et où ce singulier événement a-t-il eu lieu ? A Orgreave, près de Rotherham, dans le South Yorkshire. »

Ce jour-là, et Martyn Waites nous le fera vivre au plus près, la police aux ordres du gouvernement Thatcher écrase la dernière manifestation des mineurs dans le sang. C’est une certaine idée de l’Angleterre qui meurt, celle des trade unions, des confréries, des camarades, des solidarités dans les quartiers. « Maintenant », c’est autre chose :

La trilogie babylonienne, Sébastien Doubinsky (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 20 Août 2013. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Joelle Losfeld

La trilogie babylonienne, Traduit de l’anglais par Sébastien Doubinsky. 209 p. 20 € . Ecrivain(s): Sébastien Doubinsky Edition: Joelle Losfeld

 

Que ce soit dit d’entrée – et ici écrit – Sébastien Doubinsky est un architecte et un styliste. Sa maîtrise de l’art romanesque en est époustouflante.

Architecte. Tout dans ce livre est bâti en passerelles, en arc-boutants, en galeries de ronde, en abymes, en correspondances. Un « narrateur », passablement déjanté, caché derrière des masques de couleurs, nous l’annonce d’ailleurs dans le premier volet du triptyque. Comme un guide qui nous indiquerait grosso modo le chemin dans les méandres, seuils et répliques de la narration. Dans une amusante adresse au lecteur :

« Ah vous êtes là… Déjà ?... On aurait dû me prévenir… Enfin, ne vous inquiétez pas, je vous en prie… Cette histoire finira par prendre tout son sens – Du moins, je l’espère. On n’est plus sûr de rien de nos jours. »

Manuel El Negro, David Fauquemberg

Ecrit par Yann Suty , le Mardi, 20 Août 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Fayard, La rentrée littéraire

Manuel El Negro, 21 août 2013, 366 pages, 20 € . Ecrivain(s): David Fauquemberg Edition: Fayard

 

« En vous racontant Manuel, je vous parlerai de moi ».

En s’attelant à l’histoire du chanteur de flamenco Manuel El Negro, Melchior de la Peña avertit qu’il sera aussi question de lui. Ce portrait d’un homme sera le portrait de deux hommes. Il prévient aussi que cette histoire risque de n’être tout à fait réelle. La vie de Manuel, telle qu’il la conçoit en effet, est comme un songe.

Sa vie, Melchior l’a passée derrière sa guitare, le front courbé au-dessus de ses cordes. Il dira même qu’il est devenu esclave de son instrument. Il est un homme de l’ombre, toujours en retrait sur la scène, un homme qui a « appris à se taire ».

« Les mots, voyez, disaient si peu, ils ne servent souvent qu’à créer des malentendus. La musique est sans équivoque, elle ne vous cache rien des sentiments de l’autre ».