Identification

La Une Livres

En toute franchise, Richard Ford

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 05 Novembre 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Roman, L'Olivier (Seuil)

En toute franchise (Let me be frank with you), août 2015. 232 p. 21,50 € . Ecrivain(s): Richard Ford Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Frank Bascombe est de retour. C’est évidemment une belle nouvelle pour les lecteurs de Richard Ford qui ont – forcément – adoré « Un week-end dans le Michigan » « Indépendance » ou « Etat des lieux ». Frank, qui vieillit avec son auteur, mais qui garde bon pied, bon œil encore. Bascombe, avec son empathie, sa patience, son ironie bonhomme.

L’ouragan Sandy a dévasté le New Jersey, laissant derrière lui destruction, malheur, dévastation des choses et des gens. Frank, qui a quitté la côte depuis quelques années, décide de revenir, en visite, en particulier pour y rencontrer un ami sinistré. Devant le tableau effroyable de la côte, c’est au tour de Frank d’être dévasté, dans son âme.

« Et puis tout à coup je ne supporte plus d’être là. Toutes les défenses dont je m’étais bardé dans l’intérieur des terres se sont délitées ; me voici devenu… une cible. Celle de la perte. De la tristesse. C’est ce que je tenais à éviter et la raison même pour laquelle je me suis abstenu de me risquer ici, ces dernières semaines. J’ai eu tort de venir. »

La vie prodigieuse de Garnet Ferrari, Marie Manilla

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Jeudi, 05 Novembre 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Roman, Autrement

La vie prodigieuse de Garnet Ferrari, Traduit de l’américain par Sabine Porte mars 2015, 585 pages, 24 € . Ecrivain(s): Marie Manilla Edition: Autrement

 

Ce premier roman traduit en français de Marie Manilla est une histoire enchanteresse et pleine de poésie qui sublime la différence. Garnet Ferrari, dotée d’une chevelure rousse peu commune et de taches de vin qui recouvrent tout son corps façon mappemonde, n’est pas du tout le joli bébé joufflu tant attendu. Alors que ses parents s’astreignent à faire le deuil de leur fille idéalisée, sa grand mère Nonna y décide d’y voir la réincarnation de Sainte Garnet, une guérisseuse légendaire sicilienne. Ces taches de vin ne peuvent pas être le fruit du hasard. Nonna est terriblement superstitieuse : le moindre grain de sable et elle y voit le signe d’un mauvais sort. Elle ne peut imaginer la vie sans amulettes. Sa petite-fille a le pouvoir d’accomplir des miracles, notamment soigner toutes les maladies de peau (eczéma, poireaux, verrues, rien ne lui résiste…) et elle le fait savoir. Son vilain petit canard a le pouvoir de réenchanter le monde ! Entre les superstitions siciliennes à l’accent chantant, l’envie de sauver les apparences à l’américaine et l’humour « volcanocynique », ce livre nous amuse.

Revue Décapage n°53

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Jeudi, 05 Novembre 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Revues

Revue Décapage n°53, Numéro spécial Rentrée littéraire, Collectif, Flammarion, septembre 2015, 172 pages, 15 €

 

Ce numéro de Décapage est un numéro Spécial Rentrée littéraire qui présente une nouvelle formule, « nouvelle couverture, nouveau format, pagination augmentée, tirage rehaussé, deux numéros annuels », des Editions Flammarion, sous la direction de Jean-Baptiste Gendarme, auteur Gallimard.

Original, agréable à lire, il comporte des articles de fond, des nouvelles, un dossier complet sur un auteur et pour ce numéro Maylis de Kerangal « par elle-même » inaugure la nouvelle formule.

On y lira aussi le journal littéraire de Alice Zeniter, une interview imaginaire de Céline avec de vraies réponses, celles de Céline extraites des Cahiers de la NRF et un dossier rassemblant avec beaucoup d’humour (ton décalé déjà donné dans l’éditorial et la présentation générale) les réponses de plusieurs auteurs sur au moins une question que se posent de nombreux primo-écrivants et dont le titre rend compte du suspense qui attend le lecteur, « le jour où mon manuscrit a été accepté », mais dont la banalité des réactions rend grâce à ce que l’état d’esprit de chacun de ces auteurs pris dans l’attente d’une réponse de préférence positive n’est pas si éloignée de celle de n’importe qui.

Les Saisons de la vie, Nadine Gordimer

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 04 Novembre 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Afrique, Nouvelles, Grasset

Les Saisons de la vie, novembre 2014, 1952-2007 traduit de l’anglais (Afrique du Sud) par P. Boyer, J. Damour, J. Guiloineau, G.Lory, 608 pages, 24 € . Ecrivain(s): Nadine Gordimer Edition: Grasset

 

Première chose à préciser concernant ce gros volume de nouvelles de la grande Dame sud-africaine : tous les textes publiés ici l’ont déjà été dans divers recueils. Pas d’inédits donc, mais une anthologie qui balaye un demi-siècle d’écriture et d’histoire. Un volume de poids, matériellement et à la lecture. Les nouvelles y sont éditées par ordre chronologique mais on peut regretter que les dates de publication ne soient pas plus mises en évidence (il faut aller les rechercher dans les indications des sources en fin de volume). Avouons aussi qu’un petit rappel sur les évènements que traversait l’Afrique du Sud en parallèle aurait été tout aussi appréciable, tout le monde n’ayant pas en tête le dernier demi-siècle d’histoire de ce pays. Voilà pour les regrets concernant l’édition.

Un recueil que nous avons trouvé par ailleurs bien inégal, avec des nouvelles hélas parfois un peu trop longues et bavardes. Il y a, pour votre serviteur en lectures, quelques perles mais hélas aussi de la lourdeur qui fait que l’on peine à venir au bout de cet énorme recueil qui jette souvent un regard ironiquement et paradoxalement désespérant sur l’histoire qu’ont traversée ce pays et cette nation.

Les maîtres du printemps, Isabelle Stibbe

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 03 Novembre 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Livres décortiqués, Roman, Serge Safran éditeur

Les maîtres du printemps, août 2015, 181 pages, 17,90 € . Ecrivain(s): Isabelle Stibbe Edition: Serge Safran éditeur

 

« Ici vous entendrez parler acier, métallurgistes, syndicalistes, ici vous entendrez parler usines, nationalisation, chômage. Si pour vous ces mots sont synonymes de nuisances et de laideur, s’ils vous font l’effet de répulsifs, si vous prétendez qu’ils doivent être réservés aux colonnes des journaux, section économie ou société, refermez aussitôt ce livre ou, pour les plus modernes d’entre vous, éteignez votre liseuse, en tout cas passez votre chemin, ce texte n’est pas pour vous, autant vous prévenir tout de suite. Entre le ciel et la boue, préférez le ciel, c’est moins salissant ».

Voilà, le ton est donné, ce livre qui a autant de corps que d’âme, une écriture travaillée à la hauteur du sujet, est dédié avant tout « aux combattants sincères de Florange », puis dédié plus largement à tous les travailleurs de ces hauts-fourneaux de Lorraine qui ont fermé, les uns après les autres, et dédié encore plus largement à la mémoire ouvrière, sans misérabilisme, sans naïveté. Fouillé, il vise avec justesse son but, mettre en lumière la dignité de cette classe considérée comme une sous-classe, classe qui après avoir été exploitée pendant plus d’un siècle, se voit maintenant mise à la rue, comme un encombrant obsolète.