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Critiques

La légende du Vendée Globe, Philippe Joubin

Ecrit par Jean Durry , le Mercredi, 14 Décembre 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Albin Michel, Histoire, Voyages

La légende du Vendée Globe, octobre 2016, préface de Michel Desjoyeaux, 288 pages, 29 € . Ecrivain(s): Philippe Joubin Edition: Albin Michel

 

Les événements sportifs majeurs, et particulièrement ceux dont la périodicité est pluri-annuelle, engendrent systématiquement une floraison de publications ; car les éditeurs sont alors incités à penser que l’opportunité s’avèrera rentable. Le premier exemple en fut donné en France au moment des Jeux Olympiques de 1924, à Paris ; ce fut un support pour Genevoix, Montherlant, Obey, Braga, Géo Charles, Jean Prévost.

Dans la flopée des parutions suscitées par le coup d’envoi le 9 novembre 2016 du quadriennal Vendée Globe – course du Tour du monde à la voile en solitaire et sans escale –, ce beau volume mérite d’être distingué. Le journaliste Philippe Joubin a choisi la formule d’un Abécédaire, avec 101 entrées qui couvrent les péripéties, les haut-lieux, les navigateurs, ce et ceux qui entourent leur sidérant périple, de plus en plus rapide, bref tous les aspects d’une épreuve poussant les marins à exiger toujours plus d’eux-mêmes et de leur matériel en constant devenir.

Judas, Amos Oz

Ecrit par Marc Michiels (Le Mot et la Chose) , le Mardi, 13 Décembre 2016. , dans Critiques, Les Livres, Livres décortiqués, La Une Livres, Roman, Gallimard, Israël

Judas, août 2016, trad. hébreu Sylvie Cohen, 352 pages, 21 € . Ecrivain(s): Amos Oz Edition: Gallimard

« Les rêves ne mentent pas…

Le monde est vide.

Les dernières lueurs du soir caressent le sommet des collines.

Cette lumière n’est rien différente de celle que nous avons vue hier et avant-hier.

De même que la brise venue de la mer est exactement semblable à celle qui soufflait la veille au soir.

Le monde entier est vide…

Et il faut toujours laisser les morts ensevelir leurs morts »

 

Le Judas d’Amos Oz est comme rempli d’une nostalgie profonde, entre la frontière des soirs, liberté trempée jusqu’à l’os par la pluie et des no man’s land, reflets du couchant, envoûtant comme un parfum au sommet des collines arides.

Inévitables bifurcations, Lambert Schlechter

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 13 Décembre 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Inévitables bifurcations (Le murmure du monde, tome 4), éd. Les doigts dans la prose, mai 2016, 161 pages, 20 € . Ecrivain(s): Lambert Schlechter

 

La horde sauvage

Lambert Schlechter ose les fantaisies sexuelles tout en se maintenant proche de son « dada », à savoir Dieu. Néanmoins, c’est plus la femme qui fait jouir le texte par la petite mort qu’elle accorde, face à la grande que l’auteur prend soin de retarder. Car si Dieu existe, sa rencontre est à retarder d’autant que l’auteur n’est pas forcément attendu au paradis.

Ce nouveau texte est donc le quatrième temps de l’histoire de ses folies en fragments poétiques. Il y chercha à travers sa culture une énergie par ses remises en scènes et ses réinterprétations en vue de défendre et illustrer ses obsessions. Il fait jouer le présent et le passé, le réel et le virtuel, dans une thématique de la présence la plus proche comme celle à distance au moment où la poésie devient un instrument d’extraction. Toute une appréhension se constitue dans les circuits reliant l’action et l’écriture (qui en est une autre forme) dans un dédoublement spéculaire.

Bottins proustiens, Michel Erman

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 12 Décembre 2016. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, La Table Ronde - La Petite Vermillon

Bottins proustiens, septembre 2016, 240 pages, 7,10 € . Ecrivain(s): Michel Erman Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

Deux dictionnaires – celui des personnages, celui des lieux – composent cet essai, écrit par un spécialiste proustien, de l’Université de Bourgogne. Comme le rappelle avec sagacité Erman, la Recherche, selon Georges Poulet, « s’affirme comme une recherche, non seulement du temps, mais de l’espace perdu » (p.132).

Le catalogue des personnages proustiens tient, il est vrai, du bottin. Aux principaux s’ajoutent tous les seconds couteaux d’un univers aristocratique et bourgeois. Albertine, la mère, Charlus, la Verdurin, Swann, Saint-Loup, Morel, Gilberte, la duchesse de Guermantes, Françoise, occupent avec la tante Léonie et Odette de Crécy le premier plan d’une œuvre de trois mille pages, qui fourmille de personnages, parfois très secondaires. C’est la richesse de la Recherche que d’offrir un tel tableau d’époque. Proust réussit par le dialogue à individualiser chaque être et le langage révèle caste et appartenance. Les comtes, les marquis abondent, puisque le Côté de Guermantes – celui du Faubourg Saint-Germain – est le fief des anciennes aristocraties, qui logent encore dans des hôtels particuliers (aussi peut-on lire Rohan ou Noailles ou Grammont sous les patronymes proustiens inventés, quoique Guermantes soit une municipalité bien réelle d’Ile de France).

Mémoires sans visages, suivi par De quel cri traversée et par Une petite anthologie, Colette Gibelin

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Lundi, 12 Décembre 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Mémoires sans visages, suivi par De quel cri traversée et par Une petite anthologie, éd. du Petit Véhicule, coll. La Galerie de l’or du temps, 2016, textes illustrés par Françoise Rohmer, 123 pages, 20 € . Ecrivain(s): Colette Gibelin

 

À la lecture de la poésie de Colette Gibelin nous sommes saisis par la profonde densité maîtrisée du texte. « Cela touche à l’infini de la mesure de la démesure », a écrit l’éditeur Luc Vidal dans Regain, regard-source et mémoires dans l’œuvre poétique de Colette Gibelin (en l’Après-Lire des Mémoires sans visages & autres textes, éditions du Petit Véhicule, 2016). Si l’effort du travail reste imperceptible pour le lecteur, ce dernier en reçoit sensiblement les chants fertiles dans l’écriture parce que « La poète ne triche pas. C’est si personnel, si singulier que cela touche le cœur de chacun » (Ibid). Colette Gibelin exprime elle-même cet aspect de son travail dans l’Avant-Lyre du même recueil :

« Relisant (…) les textes en vue de cet ouvrage, il m’a semblé que cet ensemble témoignait d’une évolution assez marquée dans mon parcours poétique (…) l’écriture me semble avoir considérablement évolué.