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Les Chroniques

Azucena ou Les fourmis zinzines, Pinar Selek (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 06 Mai 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Azucena ou Les fourmis zinzines, Pinar Selek, éditions Des femmes-Antoinette Fouque, avril 2022, 224 pages, 14 €

 

La revanche des galvaudeuses

Pinar Selek est née en 1971 à Istanbul. Sociologue, militante antimilitariste et féministe, elle a entrepris une enquête faite de témoignages, d’histoire orale de la diaspora politique kurde au Kurdistan, en Allemagne et en France. Elle a refusé de livrer à la police l’identité de militants kurdes sur lesquels elle conduisait ses travaux, ce qui lui a valu d’être incarcérée. Exilée en France, elle enseigne depuis 2016 les sciences politiques à l’université Nice-Sophia-Antipolis.

Le roman de l’autrice turque porte un drôle de titre : Azucena ou Les fourmis zinzines. L’intrigue commence par le voyage d’une journaliste dans « Le Train bleu [en] direction de la Côte d’Azur ». Elle est assise près d’une belle brune inconnue qui lui confie que « Nice est le refuge des exilés et des artistes (…) Quand on approche de Nice, l’atmosphère absorbe les poussières de Paris. Le gris, le blanc, le noir (…) ».

Je t’écris de Bordeaux, Blessures et refleurissements, Giuseppe Conte (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mercredi, 04 Mai 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Arfuyen

Je t’écris de Bordeaux, Blessures et refleurissements, Giuseppe Conte, Arfuyen, Coll. Neige, avril 2022, trad. italien, Christian Travaux, édition bilingue, 240 pages, 18,50 €

Quand l’auteur, depuis Bordeaux, Gênes, Dublin ou Nice, écrit ces textes, il a, à l’entrée de ce siècle, 55 à 57 ans : son corps, purement et simplement, « décline » – et quoi de plus logique, mais aussi de plus absurde, qu’un fleuriste qui se fane ?

 

« Mon corps toi qui déclines comme décline

l’Europe

toi qui perds de la valeur peu à peu

comme la production

d’acier et de charbon

par rapport à l’électronique

Accessions et chutes, Thomas Vercruysse (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 02 Mai 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Accessions et chutes, Thomas Vercruysse, éditions La Rumeur libre, 2017, 112 pages, 16 €

 

Un éclairage sur la maison d’éditions La Rumeur libre

 

Communiquer

Il est essentiel pour partager la voix d’un livre, et je le dirais de la première conduite du poème, de communiquer avec soi dans un temps préalable, puis vers le lecteur. Au cœur de la liaison que propose le livre, il y a un acte de communication, fût-il un simple souffle. La principale notion pour définir le poème est bien celle du bord, ligne qui ferme et engendre la forme. Écrire, c’est transmettre, donc fréquenter les arcanes de la signification, même si une certaine rhétorique est nécessaire ; ce qui persiste, c’est la sensualité des mots, son aspect fougueux, sa nouveauté et son accent intérieur. Toujours est-il que le lecteur est d’abord un herméneute.

Sur L’insouciance de Philippe Mezescaze (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Vendredi, 22 Avril 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Du Corps océan (Vermont, 1977) à Deux garçons (Mercure de France, 2014), de L’impureté d’Irène (Arléa, 1987) aux Jours voyous (Mercure de France, 2021), Philippe Mezescaze, né en 1952, a construit une œuvre attachante et précise. Comme chez Modiano, on y entend, de livre en livre, une voix, une « petite musique », et si cette musique ne surprend pas toujours, si elle répète parfois les mêmes motifs, reparcourt les mêmes chemins, elle finit, au bout de quelques pages, par séduire à nouveau.

Il y a une sorte de fidélité proustienne chez Mezescaze : c’est lui-même (sa jeunesse, ses rencontres amicales et amoureuses, etc.) qui constitue la matière de ses récits, le plus souvent. Par l’écriture, par le travail têtu de la mémoire, dans une anamnèse poétique, ce passé revit, se réassemble, et une période de l’histoire, une façon d’exister, une relation courtoise aux choses et aux êtres se redessinent. Sans doute est-ce là tout ce qu’il nous reste face à la succession des désastres, à l’obscurcissement de l’horizon : nous souvenir de ce que nous fûmes – de nos désirs et des désirs que nous avons suscités. En garder la trace ; en fixer, en rééprouver par les mots le trouble – et l’on pensera ici à Constantin Cavafy, à Sandro Penna dont Mezescaze, par plusieurs aspects, est proche : « Forse la giovinezza è solo questo / perenne amare i sensi e non pentirsi » (1).

Le reste c’est la suite, Sarah Kéryna (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 21 Avril 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Le reste c’est la suite, Sarah Kéryna, éditions Les Presses du réel, octobre 2020, 88 pages, 10 €


La temporalité équivoque du titre colle à la réalité aléatoire et parfois traumatisante du réel contemporain. « Le reste c’est la suite »… comme une façon de dire que tout change et passe et que l’important qui ne l’est pas est sans cesse différé, temporisé ou, si l’on se place du point de vue des tragiques attentats terroristes qui ont frappé la société ces dernières années, une façon de rappeler que ce qui compte, du moins « le reste » est dans « la suite » des événements traumatiques (période post-traumatique). Le flux et le tempo des textes instantanés qui composent ce recueil s’affirment et nous emportent dans le même élan frénétique ou nerveux de ce qui court (nous dépasse/nous prend de court, accélère le palpitant de nos vies courantes).