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Les Chroniques

L’Initié, Thibault Biscarrat (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 13 Juin 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

L’Initié, Thibault Biscarrat, éditions Ars Poetica, 2022, 90 pages, 18 €

 

Mutité

Comme un mouvement immobile, c’est-à-dire un trajet dans le poème immobilisé, la voix poétique de Thibault Biscarrat détermine ici un sujet spirituel. Il s’agit pour le poète d’être présent, plutôt de rendre présent, de cheminer en contemplant, en méditant, pour être gagné par la force des paysages parcourus, par tout l’enseignement de l’habitation spirituelle qui en découle. Ainsi, Dieu est présent, surlignant les arcanes théologiques. On pourrait sans doute y voir le travail des jardiniers zen, qui dès le Japon médiéval, connaissaient le lien entre matière et esprit, l’importance du cheminement sur du gravier, des pierres plates ou des dalles. Est-ce une conception poétique propre à définir ? un Pantocrator agreste ? Pour moi, cela m’irait parfaitement.

Il faut donc suivre le poème comme on marche ; être sensible aux taches de lumière autorisées par les feuillages ; chercher la diffraction des éclats du soleil sur les eaux noires des torrents ; œuvrer sa propre vision mystique.

Les Wagons rouges, Stig Dagerman (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 09 Juin 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Pays nordiques, Roman

Les Wagons rouges, Stig Dagerman, Ed. Maurice Nadeau, Poche, mai 2022, trad. suédois Gustaf Bjurström, Lucie Albertini, 212 pages, 9,90 €

 

Les Editions Les Lettres Nouvelles (Maurice Nadeau) n’ont pas lésiné sur la qualité de finition des volumes de la Collection de Poche qu’ils viennent de lancer : couverture à l’esthétique attrayante qui constituera la « marque distinctive » de la collection, et papier élégant pour les pages intérieures, à savoir un Fabriano Palatina ivoire 80 gr.

Parmi les premières œuvres que Nadeau réédite dans cette collection prometteuse, figure ce recueil de neuf nouvelles du Suédois Stig Dagerman qui, précise Bjurström dans l’Avertissement, « ont été écrites à des dates différentes mais suffisamment rapprochées, cependant, pour qu’il n’ait pas semblé indispensable d’adapter un ordre strictement chronologique ».

 

1/ Les Wagons rouges

Manuel de Réisophie pratique, Laurent Albarracin (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mercredi, 08 Juin 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie, Arfuyen

Manuel de Réisophie pratique, Laurent Albarracin, éd. Arfuyen, 252 pages, mai 2022, 18 €

 

Un peu de courage et d’humour pour ne pas aussitôt fuir ce titre égarant et glacé, mais patience et attention récompensées, à loisir, par la lecture, en 224 brefs chapitres, d’un (étonnant, éclatant, complet) chef d’œuvre, comme on va voir, un des plus forts livres de poésie française récemment parus. C’est d’abord un manuel, non un traité : il s’agit de mettre sous la main (plutôt que directement devant les tempes) les notions essentielles d’un art. Quel art ? L’art, ni plus ni moins, de considérer véritablement les choses, ou, plus précisément – dit le néologisme réisophie (res : chose ; sophia : sagesse) – de saisir leur sagesse propre ; l’art de contempler le travail (inaperçu) fourni par les choses pour, chacune pour soi et entre elles, devenir, demeurer, et même disparaître, choses. Réisophie pratique, enfin, pour dire qu’en la matière, l’exercice vaudra seule observance, l’effort sur soi sera seule compréhension réussie de cet effort des choses sur elles-mêmes. Voilà, abstraitement, l’argument.

Ainsi parlait Saint-Pol-Roux, Choix et présentation Jacques Goorma (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 07 Juin 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie, Arfuyen

Ainsi parlait Saint-Pol-Roux, Choix et présentation Jacques Goorma, Arfuyen, mars 2022, 176 pages, 14 €

 

Se mirer : perpétuelle occupation de la Beauté.

Ses miroirs : les hommes.

Saint-Pol-Roux

Haute lignée spirituelle

Il y a un enseignement dans ce livre qui nous guide vers de grandes hauteurs, avec pour conducteur le poète, lequel marche au-dessus de lui-même dans sa spiritualité, comme si son cœur était maître spirituel de sa croyance d’homme. Car la divinité ici, dans ces maximes, trace, ouvre la pensée de l’auteur, lui confie une part étincelante dans son expérimentation poétique.

Sur Rimbaud à New York de David Wojnarowicz (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Jeudi, 02 Juin 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Arts

 

Considérez ceci comme dit par un personnage de roman :

Pourquoi l’œuvre de David Wojnarowicz me touche-t-elle tant ? Pourquoi, depuis sa découverte vers ma vingtième année grâce à un texte de Félix Guattari, a-t-elle tellement compté pour moi ? Pour être sincère, cette œuvre ne me touche que par la bande, non par son ensemble. Ou l’ensemble (ce qui me touche le moins, ce qui me reste plus lointain et dont je ne parlerai pas ici) reçoit sa lumière de la partie qui m’émeut.

La série photographique en noir et blanc Rimbaud à New York a été conçue et réalisée à la fin des années 70. Wojnarowicz avait vingt-quatre ans. La relation de Wojnarowicz à Rimbaud est forte, évidente pour moi, sans doute ancienne. Elle renvoie à un rapport particulier à l’art, à la littérature – à une marginalité essentielle. Un siècle et un océan les séparent. Sans doute, la marginalité de Rimbaud et celle de Wojnarowicz ne se recoupent pas.