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Les Chroniques

Sous la plage, les pavés… Fred Vargas, par Mélanie Talcott

Ecrit par Mélanie Talcott , le Vendredi, 13 Octobre 2017. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

Il y a ceux qui aiment, qui idolâtrent Fred Vargas. Explosés d’admiration béate, ils attendent ses écrits avec la même ferveur qui en cloue d’autres des heures durant sur la place Saint-Pierre dans l’espoir que surgisse de la fenêtre pontificale, ce je ne sais quoi qui les transcenderait enfin. Les réseaux sociaux en frémissent tout vibrants d’amour. Vienne à paraître l’objet de leur désir et les voilà qui s’égaillent, se précipitent comme à l’ouverture des soldes ou comme le jour de la mise en place dans les gondoles du nouveau Nothomb, Musso, Levy, Gavalda ou Pancol. Ils s’en emparent avec appétit, le portent aux nues par anticipation, le croquent et le dévorent conquis, même si après, il leur arrive de le vouer aux gémonies comme c’est actuellement le cas pour son dernier ouvrage, L’Armée Furieuse.

Décevant, Vargas ne fait plus du Vargas, clapotent-ils sur leur clavier. Donnons-lui une chance, elle fera mieux au prochain, on l’attend au tournant.

A propos de La Tectonique des nuages, Armand Farrachi, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Jeudi, 12 Octobre 2017. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

La Tectonique des nuages, Armand Farrachi, Corti, Coll. Biophilia, mars 2017, Illust. couv. Ianna Andréadis, 255 pages, 21 €

 

« L’homme reste attaché à ses prérogatives comme l’observateur à ses sens. On a beau lui prouver que la Terre tourne, que Dreyfus est innocent ou le renard utile, il préfère, plutôt que d’abdiquer, menacer Galilée du bûcher, Dreyfus du bagne, et les avocats du renard, plus modestement, d’une contravention “de cinquième catégorie” ».

Armand Farrachi, chapitre Classés nuisibles

 

Le questionnement du monde présent

J’ai lu Nos Vies de Marie-Hélène Lafon, par Sana Guessous

Ecrit par Sana Guessous , le Mercredi, 11 Octobre 2017. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

Mon salon donne sur un vaste immeuble en briques rouges, criblé de fenêtres. Parfois, l’une d’elles s’ouvre, un homme à la bedaine nue et à l’œil fou en surgit. Un étage plus haut, un peu plus à droite, voilà l’homme aux cheveux longs et argentés qui s’accoude à sa fenêtre, les mains serrant sa bière du matin. Le plus souvent, c’est une vieille dame en peignoir qui sort sa tête blanche et promène un regard plissé, pointu sur la rue.

Elle me fait penser à la narratrice de Nos Vies de Marie-Hélène Lafon. Une dame âgée et pensive aussi, qui observe les gens et les choses avec une acuité presque inquiétante. Cela donne des descriptions amples, minutieuses, qui s’autorisent de drôles de digressions.

« Les seins de Gordana ne pardonnent pas, ils dépassent la mesure, franchissent les limites, ne nous épargnent pas, ne nous épargnent rien, ne ménagent personne, heurtent les sensibilités des spectateurs, sèment la zizanie, n’ont aucun respect ni aucune éducation. Ils ne souffrent ni dissidence ni résistance. Ils vous ôtent toute contenance ».

Trois livres expérimentaux, Editions Plaine page, par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 10 Octobre 2017. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

Editions Plaine page, coll. Connexions, 2017 : à propos de P.Articule, Julien d’Abrigeon (10 €), Esthétique de la noyade, Sébastien Lespinasse (10 €), A-vanzar, Nicolas Vargas (5 €)

 

Prendre contact avec une maison d’édition que je ne connaissais pas, revient à parcourir des paysages nouveaux et parfois intéressants. Ici, avec les livres de la collection Connexions de l’éditeur Plaine page que j’ai reçus il y a peu, c’est à une sorte de plongée en apnée dans l’univers mental de trois poètes que je me suis livré. D’autant que j’ai cherché comment ces trois auteurs pouvaient explorer la langue comme matière, ce qui est en soi un objectif à part entière, et cette collection constituée de livres blancs et presque carrés en est le témoin.

Langage-action à propos de trois livres, par Yasmina Mahdi

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 06 Octobre 2017. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

(1) Marchand de sang, Kadhem Khanjar, Plaine Page, coll. Calepins, juin 2017, trad. arabe (Irak) Antoine Jockey, 100 pages, 15 € (voir le site de Kadhem Khanjar : tapin2.org)

 

Le titre et la couverture de ce livre bilingue, arabe et français, annoncent un état du monde arabe contemporain, celui de l’Irak, brisé, déchiqueté. Le sang coule non pour irriguer la vie mais pour l’ôter. Selon le jeune auteur Kadhem Khanjar, né en 1990 à Babylone – la première mégalopole du monde antique, le berceau de nombreux mythes civilisateurs –, la peur côtoie la mort et fait place à un ennui morbide. L’amertume, la dévastation, l’humiliation et la terreur accompagnent le décompte macabre des assassinats. L’odeur du sang s’insinue sous la peau, dans le cerveau, dans les pleurs, dans la crainte d’une prochaine explosion.

Les larmes, serpes minuscules

Que l’on ne peut retenir, même avec nos yeux