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Récits

Les cygnes sauvages, Kenneth White

Ecrit par Lionel Bedin , le Lundi, 19 Août 2013. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Iles britanniques, Le Mot et le Reste

Les cygnes sauvages, traduit par Marie-Claude White, juin 2013, 120 pages, 16 € . Ecrivain(s): Kenneth White Edition: Le Mot et le Reste

 

« Je suis parti dans le vent »


Un beau jour, à la fin des années 80, Kenneth White décide de faire « une virée » au Japon, en forme de « pèlerinage géopoétique », pour « rendre hommage aux choses précieuses et précaires » et pour faire un « voyage-haïku » dans le sillage de Bashô. Il espère bien en tirer un livre, qu’il voudrait « petit livre nippon extravagant, plein d’images et de pensées zigzagantes ». S’immerger dans un pays, dans une culture, dans des souvenirs littéraires, et « si possible, voir les cygnes sauvages venus de Sibérie s’abattre avec leurs cris d’outre-terre sur les lacs du Nord où ils viennent hiverner ». On ne peut pas avoir de buts plus clairs pour un voyage. Le résultat est ce récit, Les Cygnes sauvages, un livre à l’air inoffensif, pas très épais, et pourtant rempli à craquer d’histoires, de descriptions, de sons, de poésie, de philosophie, d’histoire littéraire, d’érudition – mais une érudition douce, qui ne fait pas mal à la tête, et même une érudition qui rend intelligent. Ou zen.

La fabrique des mots, Erik Orsenna

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mercredi, 03 Juillet 2013. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Stock

La fabrique des mots, mai 2013, 140 pages, 15 € . Ecrivain(s): Erik Orsenna Edition: Stock

 

Une ballade au royaume des mots


« Méfiez-vous ! Les mots ne sont pas ce qu’on croit : de petits animaux doux et dociles, auxquels il n’arrive jamais rien. Les mots aiment l’amour. Mais aussi la bataille. Ils se trouvent ainsi mêlés à toutes sortes d’aventures, sentimentales et dangereuses ».

Ainsi s’ouvre le récit sur la vie des mots, ces petits génies sympathiques mais pouvant semer la zizanie et faire taire pour de bon les puissants ! En effet, la narratrice, Jeanne, devenue adulte, s’est souvenue d’une aventure fort singulière dont elle a participé avec l’ensemble de sa classe : la résistance devant la disparition des mots. Nous sommes sur une île lointaine. Jeanne grandit doucement et va à l’école. Elle côtoie ses amis : le timide Philippe, l’intrépide Rachida et l’intelligente Apolline. Cependant, une terrible nouvelle arrive à l’oreille des enfants, le dictateur, Nécrole, en colère décide de supprimer tous les mots inutiles :

Hannah Arendt et Martin Heidegger, histoire d'un amour, Antonia Grunenberg

Ecrit par Sophie Galabru , le Mardi, 02 Juillet 2013. , dans Récits, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Langue allemande, Payot Rivages

Hannah Arendt et Martin Heidegger, histoire d'un amour. trad de l'allemand par Cédric Cohen Skalli. 491 p. 28 € . Ecrivain(s): Antonia Grunenberg Edition: Payot Rivages

 

 

Précieux par la richesse de ses sources et la diversité des témoignages recueillis, le livre d'Antonia Grunenberg offre une appréciation juste et sans faux pas de cette relation si complexe qui débuta vers 1924 entre Hannah Arendt et Martin Heidegger. Il ne faudrait pas s'attendre à découvrir un roman historique ou une série de correspondances, c'est au contraire une étude précise qui tente de reconstituer les circonstances qui entourèrent la rencontre de deux éminents penseurs du XX siècle. Car comprendre une telle relation, c'est comprendre d'où ils viennent, d'où ils pensent, avec qui ils pensent, et contre qui. L'idée qui gouverne l'écriture de ce livre est en effet que l'amour de ces deux intellectuels ne peut s'édifier que sur fond de compréhension du monde intellectuel et historique dans lequel ils firent leur entrée; l'auteur fait donc le choix de présenter l'atmosphère culturelle et politique du début du XX siècle en Allemagne avant et après guerre, mais aussi celle des Etats-Unis ou émigre Hannah Arendt.

Fille de la campagne, Edna O'Brien

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 25 Juin 2013. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Iles britanniques, Biographie, Sabine Wespieser

Fille de la campagne - mémoires (Country Girl) Trad. Anglais (Irlande) Pierre-Emmanuel Dauzat mars 2013. 474 p. 25 € . Ecrivain(s): Edna O'Brien Edition: Sabine Wespieser

 

Le titre de ce livre révèle déjà l’une de ses dimensions fondatrices : l’ironie. C’est le sceau de ce merveilleux livre de mémoires. De fait le titre du livre (Fille de la campagne/Country Girl) est en lui-même doublement ironique : - d’une part parce qu’il reprend presque à la lettre le titre de la grande œuvre initiale d’Edna O’Brien (Les Filles de la Campagne/ Country Girls) alors que les deux livres sont aussi éloignés que possible et par leur forme et par leur style. - D’autre part parce que dans ce titre (déjà) Edna O’Brien s’amuse de nous ! Si on attend l’histoire d’une pastorale irlandaise, d’une femme un peu bouseuse, provinciale, rustique, pataude eh bien sachez que ce livre est en fait une véritable biographie d’une mondaine des lettres, avec une dimension « literary people » éberluante.

Rendez-vous compte : on va croiser, sur les pas de cette « Wild Goose »* qu’est Mrs O’Brien, rien moins que le gratin de la littérature et du cinéma du milieu du XXème siècle. Il serait très difficile de faire ici la liste des invités (invités dans tous les sens du terme, aussi bien de ce livre que dans la vie car tous dînaient chez Edna O’Brien dans son séjour de Putney ou l’invitaient à dîner avec eux).

La tristesse durera toujours, Yves Charnet

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Jeudi, 20 Juin 2013. , dans Récits, Les Livres, Livres décortiqués, La Une Livres, Poésie, La Table Ronde

La tristesse durera toujours, janvier 2013, 173 pages, 17 € . Ecrivain(s): Yves Charnet Edition: La Table Ronde

 

 

La beauté sera convulsive ou ne sera pas

La fin – magnifique – de Nadja de Breton trouve constamment un écho dans l’œuvre d’Yves Charnet, comme celui-ci le confesse lui-même dans La tristesse durera toujours, écrivant : « Je voudrais juste avoir favorisé la rencontre convulsive des jeunes gens avec la beauté ».

Si à chaque instant la phrase d’Yves Charnet est tendue vers la beauté convulsive, c’est d’abord du fait de sa brièveté.

Par celle-ci, l’auteur parvient à restituer les secousses, les fulgurances de ce qu’il évoque et qui toujours ont à voir avec la façon qu’a l’émotion de tordre des moments de vécu, dans le moment où ils sont vécus, pour qu’ils puissent être véritablement vécus avec le ventre, et avec l’esprit.