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Recensions

JJ Cale, Bertrand Bouard (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 14 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Biographie, Le Mot et le Reste

JJ Cale, Bertrand Bouard, janvier 2022, 261 pages, 21 € Edition: Le Mot et le Reste

 

Shades, Grasshopper, Five, Troubadour, des titres d’albums qui rappellent le parcours d’un musicien nord-américain dont la carrière internationale démarre quand un autre guitariste de blues, Eric Clapton, enregistre un des titres de Cale, After Midnight. On se souvient aussi de Cocaïne, enregistré par le « guitar hero », succès mondial, écrit également par JJ Cale.

S’il naît à Oklahoma City le 5 décembre 1938, c’est à Tulsa que John Weldon Cale grandit, où ses parents déménagent en 1943. C’est dans cette ville, qui prospère grâce à la manne pétrolière, que John Weldon Cale aura ses premiers émois musicaux, en écoutant Bob Wills, Jimmy Reed, Hank Williams, et le gospel aura aussi influencé Cale. C’est aussi à Tulsa qu’il joue au sein des Rockets, adolescent qui refuse déjà les feux de la rampe, mais qui s’aperçoit du travail immense qu’il doit accomplir pour jouer véritablement de la guitare. « Ce mélange d’influences noires et blanches – country, jazz, rhythm’n’blues… – sera l’une des caractéristiques des créateurs de ce qui sera désigné des années plus tard sous l’appellation de Tulsa sound et dont JJ Cale sera l’une des figures les plus en vue ».

La péremption, Lionel Fondeville (par Philippe Thireau)

Ecrit par Philippe Thireau , le Vendredi, 11 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Tinbad

La péremption, Lionel Fondeville, avril 2021, 162 pages, 18 € Edition: Tinbad

Une fulgurante immersion dans la mer des mots désossés : le livre univers de Lionel Fondeville, La péremption, paru chez Tinbad, est bien dans la ligne de l’éditeur de littérature expérimentale. Il en est même le parangon, me semble-t-il. On nomme Tzara, Barthes dans la note de diffusion de l’éditeur pour exprimer ce que ces deux auteurs ont apporté à la littérature en la démembrant et pointer la filiation de Fondeville, pratiquant le segment, la découpe littéraire à l’étal, au couteau. Lionel Fondeville, en bon deleuzien, assigne à la littérature le postulat de « libérer la vie là où elle est prisonnière » – comme l’écrit Deleuze dans Questions de philosophie.

Le quotidien de l’auteur est renvoyé salement avant les origines ; rien n’exige que le réel n’entame la foi dans le non-roman. La vie n’est pas un roman, l’écriture ne peut donc l’être. L’écriture doit se résoudre à se défaire des plans établis en utilisant la pensée rhizomique ; dans le temps où elle se délite, elle devient de moins en moins roman et de plus en plus éclat philosophique. De la critique des situations réelles dans les interstices des mots, dans l’amalgame des mots, advient la liberté totale de penser « autre », c’est-à-dire soi-même hors conventions sociétales. Il s’agit pour Fondeville de « rejouer la scène sans l’avoir apprise par cœur, mais l’ayant apprise mieux que par cœur, par corps… ».

La Maison loin de la mer, France Burghelle Rey (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 09 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Editions Douro

La Maison loin de la mer, éditions Douro, juin 2021, 72 pages, 15 € . Ecrivain(s): France Burghelle Rey

 

Dans une collection qui vise à honorer l’atelier de « fabrique » de l’écrivain et à offrir au lecteur le noyau même de l’écriture, France Burghelle Rey tisse tout à la fois le récit de l’écriture présente et les méandres d’une mémoire qui ceint le tilleul, l’odeur du village natal et les personnages précieux du passé, parfois difficiles à cerner tel cet homme, telle cette Rose, grand-mère pourvoyeuse.

Le talent de l’auteure est de montrer l’anamnèse difficile des moments clés d’une vie enfouie, de les éclairer avec les œuvres en train d’être lues ou rappelées.

Ainsi défilent les poèmes de soi ou d’autres, les extraits d’Ancet, de Singer ou de l’amie Geneviève Hutin, hélas disparue.

France Burghelle Rey tâtonne, revient à la cause, s’acharne pour dépecer ce mystère de la « maison » d’écriture (comme le nomme Dorion).

Pourquoi écrire ? Pourquoi passer tant de temps à orner sa vie des mots qu’il faut requérir, avec joie, avec peine ?

Sève noire pour voix blanches, Jean-Louis Bernard (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Mercredi, 02 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Sève noire pour voix blanches, éditions Alcyone, octobre 2021, 59 pages, 17 € . Ecrivain(s): Jean-Louis Bernard

 

Dans ce recueil, Jean-Louis Bernard nous invite à appréhender le réel à travers un jaillissement poétique de noir et de blanc. Ensemble, noir et blanc tissent le monde en lui apportant respectivement le vide et la matière, le mystère et l’évidence. Ils ne sont pas dans l’opposition mais plutôt dans une forme d’union sacrée immanente et permanente. De la « blanche ténèbre » à « la nuit de craie », on perçoit, dans le souffle des mots, le crépuscule qui « émiette sa clarté ». On se laisse envahir par l’atmosphère envoûtante qui s’installe au fil des pages, « entre les orties noires / et la blancheur des heures ».

Bientôt, on en devient presque un simple éclat d’encre, une « blanche / paraphe » ou une goutte « noire / flambée d’un écho ». On avance dans la pleine lucidité, conscients d’être amenés tôt ou tard à rejoindre ces « yeux des dormants », et déjà on sent dans nos pupilles ce « noir / révulsé de lumière ».

Portrait du baron d’Handrax, Bernard Quiriny (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 01 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Rivages

Portrait du baron d’Handrax, Bernard Quiriny, janvier 2022, 170 pages, 17 € Edition: Rivages

 

Le baron Archibald d’Handrax, petit-neveu d’un peintre local oublié, Henri Mouquin d’Handrax (1896-1960), a-t-il existé ? La question se pose en ces termes, au passé, puisqu’au lendemain de sa mort, ses proches reçurent une carte postale qu’il avait écrite : « Je suis parti en voyage pour longtemps, vers un pays très lointain. Pour le moment, je suis en route ; il fait plutôt sombre, si bien que je n’ai pas tellement de paysages à vous décrire ». Cette interrogation est d’importance secondaire (Lichtenberg a bien donné, grâce au langage, une forme de réalité à un objet qui n’existe pas). Si Archibald d’Handrax avait été réel, comme il aurait eu le droit de l’être, et que Bernard Quiriny l’avait rencontré, il aurait gîté dans l’Allier, un département qu’on se contente en général de traverser sans vraiment s’y attarder et sans prendre le temps d’y admirer ce qui mérite de l’être. Peu de gens auraient par exemple l’idée de s’offrir un séjour à Montluçon, alors qu’il s’agit d’une belle cité, qu’on peut arpenter en toute quiétude, sans être incommodé par les hordes de touristes. À un étranger qui voudrait se faire une idée de la France, de sa nature séculaire, de ses rythmes profonds, on ne pourrait que conseiller de visiter l’Allier, qui vit en outre naître plusieurs écrivains, parmi lesquels Valery Larbaud, à qui le baron d’Handrax – qu’il ait ou non existé – emprunte plus d’un trait (petit clin d’œil, p.31).