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Recensions

Okoalu, Véronique Sales (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Jeudi, 14 Octobre 2021. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman

Okoalu, Véronique Sales, Éditions Vendémiaire, août 2021, 280 pages, 18 €

 

Il s’agit d’un roman en dehors de toute conception de lieu, de temps et d’action malgré des noms et une région citée pour situer une île qui, sans doute, n’existe pas. Révélée entre des routes maritimes contournées, elle est d’autant plus isolée, et c’est sur cette île que vont évoluer des enfants en dehors d’un contexte parental prétendument « normal » généralement.

Disons-le tout de go, le roman n’a rien à voir avec Robinson Crusoé. Le contexte, s’il peut parfois paraître comme étant « de survie » (et c’est forcé après un crash aérien laissant des enfants à leur propre sort), va au-delà de cette perception un peu immédiate. Rien non plus à voir avec un quelconque mythe du « bon sauvage ».

J’y verrais plutôt une maïeutique à construire l’être, à le modeler pour qu’il devienne lui-même en fonction des choix possibles : « Ce que l’île avait fait d’eux, c’était ce que disait brève, entêtante, la chanson de Mania – qu’ils étaient pourvus à présent, et il ne serait plus au pouvoir de personne de les en priver, d’une forme de vie nouvelle : primitive, insolente, éternelle ».

Dix portraits d’écrivaines françaises rebelles en leur temps, A l’usage des esprits curieux, Mireille Delaunay (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Jeudi, 14 Octobre 2021. , dans Recensions, Les Livres, Essais, La Une Livres

Dix portraits d’écrivaines françaises rebelles en leur temps, A l’usage des esprits curieux, Mireille Delaunay, Éditions Complicités, septembre 2020, 101 pages, 10 €

Dans cet essai joliment illustré par des portraits de Flora Gressard, Mireille Delaunay rend hommage aux écrivaines françaises qui ont contribué par leurs œuvres, leurs combats, leurs tempéraments souvent libres et audacieux, à faire évoluer la condition féminine et le droit pour les femmes d’accéder à l’instruction (droit réclamé notamment par Christine de Pizan dans La Cité des dames), de recevoir une éducation analogue à celle des garçons (revendication présente dans les textes de Madame de Lambert).

D’autres, comme Louise Labé, ont revendiqué également le droit à la création littéraire. Chacune a lutté à sa façon pour sa propre émancipation et celle de ses contemporaines, en vivant pour certaines de leur plume (comme Christine de Pizan ou George Sand), en se prononçant ouvertement contre le mariage forcé (Contes de Madame d’Aulnoy, roman Indiana de George Sand), en ouvrant des salons mondains ou littéraires. Ces attitudes, révolutionnaires pour leur époque dans des sociétés patriarcales, étaient souvent risquées et c’est ainsi que la « Déclaration des droits de la femme et du citoyen » a conduit Olympe de Gouges à l’échafaud.

Les Bourgeois de Calais, Michel Bernard (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 12 Octobre 2021. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, La Table Ronde

Les Bourgeois de Calais, août 2021, 192 pages, 20 € . Ecrivain(s): Michel Bernard Edition: La Table Ronde

 

En principe, la postérité aurait dû oublier aussi complètement que possible le nom d’Omer Dewavrin (1837-1904). Maire de Calais de 1882 à 1885, puis encore à partir de mai 1892, il ne se montra ni plus remarquable, ni plus incompétent ou corrompu que la majorité des édiles. Seule l’érudition locale – et encore – devrait se souvenir de lui. L’histoire de Calais, précisément, intéressait Omer Dewavrin. Il savait qu’au commencement de la Guerre de Cent Ans, sa ville fut assiégée pendant près d’un an par les Anglais. Contrainte de se rendre, elle n’échappa aux meurtres, aux viols et au pillage qui suivaient invariablement toute reddition d’une cité que grâce à un marchand, Eustache de Saint-Pierre, volontaire pour déposer les clefs de la ville aux pieds du roi d’Angleterre. Cinq autres notables l’accompagnèrent vers ce qui apparaissait comme une mort certaine. L’épisode, qui se termina mieux qu’escompté, est raconté par Froissart. Souhaitant que sa ville rendît hommage à Eustache de Saint-Pierre et à ses compagnons, et pas seulement en donnant leurs noms à des rues (ce qui présente le mérite de ne pas grever les finances), Dewavrin « monta » en 1884 à Paris afin de rencontrer un sculpteur dont on commençait à parler, bien qu’il ne fût plus tout jeune : Auguste Rodin.

Nina Simone, Frédéric Adrian (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 11 Octobre 2021. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Biographie, Le Mot et le Reste

Nina Simone, Frédéric Adrian, septembre 2021, 240 pages, 20 € Edition: Le Mot et le Reste

 

Eunice Kathleen Waymon est née le 21 février 1933, Nina Simone est née, elle, un après-midi de juin 1954, dans un petit club d’Atlantic City, le Midtown Bar. Entre ces deux dates, la vie de la future Nina Simone va osciller entre musique, très tôt, et prise de conscience du monde dans lequel elle est née.

Sa famille est une famille de musiciens, musiciens amateurs certes mais qui pratiquent différents instruments. On y joue du banjo, de la guitare, de l’harmonica, de la guimbarde, de l’orgue et du piano. « A peine âgée de deux ans et demi, elle sait déjà se hisser sur le tabouret de l’orgue de Saint-Luke et fait l’admiration des paroissiens. Kate (sa mère), prend l’habitude de l’emmener quand elle va prêcher dans une église d’un comté voisin, et Eunice, resplendissante dans ses plus beaux vêtements, joue quelques morceaux en ouverture des cérémonies dès ses quatre ans ». Musicalement la petite fille Eunice présente de sérieuses prédispositions pour la musique en général et le piano en particulier, prédispositions qui seront exploitées grâce à une certaine Miss Mazzy qui prendra Eunice sous son aile quant à son éducation musicale. Et c’est en avril 1951 qu’Eunice se rend au Curtis Institute pour son examen qui doit la consacrer en tant que pianiste classique. Mais elle ne sera pas retenue, attribuant cet échec au racisme…

Minuit à Atlanta, Thomas Mullen (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Lundi, 11 Octobre 2021. , dans Recensions, Les Livres, Polars, La Une Livres, USA, Rivages/noir

Minuit à Atlanta, Thomas Mullen, mai 2021, trad. anglais US, Pierre Bondil, 496 pages, 23 € Edition: Rivages/noir

Nous sommes en 1956 à Atlanta, au moment du début du mouvement des droits civiques, alors que Rosa Parks a organisé le boycott des bus à Montgomery. Tommy Smith, un ancien policier noir, coéquipier de Lucius Boggs, devenu reporter dans le seul journal noir d’Atlanta, le Daily Times, réveillé par un coup de feu alors qu’il s’était endormi sur sa table de travail, découvre le corps sans vie de son nouveau patron, Arthur Bishop, dans les locaux du quotidien alors que ce dernier travaillait tard le soir. Il fait appel à un de ses anciens collègues, Joe McInnis, pour tenter d’élucider cette mort violente. McInnis est un flic blanc à la tête d’une brigade d’agents noirs et comme tel aussi mal perçu par les blancs que les noirs.

Ce roman se déroule à une période bien particulière de l’histoire des États-Unis, les lois Jim Crow mises en place pour entraver l’exercice des droits constitutionnels des Afro-Américains au lendemain de la guerre de Sécession ont introduit la ségrégation dans les services publics, les lieux de rassemblement et l’interaction entre les gens de couleur – (séparés mais égaux). Cependant que l’arrêt Brown de 1954 déclarant la ségrégation raciale inconstitutionnelle dans les écoles publiques et l’action de Rosa Parks refusant de céder son siège à un Blanc dans un bus public ont commencé à ouvrir quelques brèches dans ce monde inégal.