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Poésie

Seule, aux confins, Choix de poèmes, Pascale Goëta (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 21 Mai 2021. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Seule, aux confins, Choix de poèmes, Pascale Goëta, Editions du Levant, janvier 2021, 96 pages, 16 €

 

Chanter en temps d’emmurement, est-ce bien raisonnable ?

« Si tu parles aux murs, fais attention, je te préviens fais attention. Les murs sont comme ces plantes bizarres qui semblent fermées et quiètes. Mais ce n’est pas vrai. Un moment, ou l’autre, elles s’ouvrent subrepticement – c’est toujours au contact d’une proie ingénue – et elles se referment vous ayant happé irrémédiablement, et assimilé. Et vous êtes encore là à les regarder comme si rien ne s’était passé… » (jour 50, Guy Levis Mano).

Ce « Journal de Confinement » (du 17 mars au 11 mai 2020), qui est plutôt comme le dit son sous-titre « Journal poétique en temps de confinement », a une triple originalité : d’abord son auteur (Pascale Goëta) l’a fait écrire, exclusivement, par d’autres – des poètes qu’elle connaît et qu’elle aime, dont elle choisit chaque jour quelque chose ; ensuite elle poste chaque soir sur YouTube sa lecture directe du poème ; enfin elle ajoute une image, un discret accompagnement musical, et ne montre d’elle que sa voix.

Clarté naissante, Francis Gonnet (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Mercredi, 12 Mai 2021. , dans Poésie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Editions du Cygne

Clarté naissante, Francis Gonnet, mars 2020, 54 pages, 10 € Edition: Editions du Cygne

 

« Clarté naissante »… Voilà un titre qui interpelle immédiatement le lecteur et l’on comprend que ce recueil va s’inscrire dans une réflexion existentielle. En effet, ces deux mots font écho à notre arrivée au monde, et naître à la clarté, c’est surgir des ténèbres. Chaque jour de notre vie peut être une renaissance. La question qui en découle est la suivante : après la mort, rejoint-on les ténèbres ou renaît-on à la clarté ? La poésie de Francis Gonnet répondra en partie à ces questionnements. D’ailleurs, la fin ne rejoint-elle pas le commencement, comme le suggère cet extrait de l’Apocalypse, cité par l’auteur en introduction, qui symbolise l’éternité ?

« Je suis l’alpha et l’oméga / le commencement et la fin » (Apocalypse 21.6)

Le recueil est scindé en trois parties : « Celui qui était », « Celui qui est », « Celui qui vient ».

Et puis prendre l’air, Etienne Faure (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Vendredi, 07 Mai 2021. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Et puis prendre l’air, Etienne Faure, décembre 2020, poèmes en prose, 136 pages, 14,50 €

 

Ambiance mais aussi expressions anciennes font office de guide touristique littéraire d’un monde dilué dans les mémoires où le temps joue les compte-gouttes ou au sablier entre les monuments et autres lieux-dits aux appellations immuables. De « la perte de vue à la perte tout court » il n’y a qu’un pas si l’oubli l’emporte sur le reste. Il y a tout de l’attente dans ce rêve écrit où « le banc à mi-chemin devient point de rencontre entre la solution cherchée et celle qui doit venir, à pied par l’allée centrale – ou jamais ».

Le Piéton de Paris de Léon-Paul Fargue trouve là une contemporaine continuité toute en rappelant des nostalgies évanescentes qui doucement entrent en dissidence pour faire apparaître un Paris neuf distribué en images accélérées dans le temps : « vivre et survivre, vitesse incertaine des vies » pour poursuivre la route.

La vie de tous les jours passe par des rencontres sur les bancs publics qui deviennent des sortes de partition à se rencontrer, à observer : « Se poser, comme on parle de s’assagir, en siégeant là, sans rien faire, du moins d’apparent. C’est à ça qu’on rêve subitement ».

Nuit celte, Land mer, Carmen Pennarun (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Jeudi, 06 Mai 2021. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Nuit celte, Land mer, Carmen Pennarun, éditions Stellamaris, poésie, 2016, 76 pages, 14 €

 

Dessine-moi un arbre…

Si ce recueil devait prendre vie, il aurait des racines et de majestueux branchages, comme le suggère la magnifique illustration de couverture (dessin de Charles L’Heureux).

Les mots de l’auteure, comme autant de gouttes de rosée, nous offrent une immersion vivifiante et méditative en plein cœur de l’Argoat, Bretagne intérieure boisée. Son approche contemplative de la nature, qui fait écho à la méditation taoïste avec son « tao de l’arbre », permet à l’âme humaine d’accéder à la spiritualité dans un rapport mystique au grand Tout et en particulier au monde végétal : « l’arbre offre ses ramures en prière ». Cette communion avec les éléments, cette osmose fraîche et parfumée gorgée d’embruns qui s’écoule comme la sève et l’eau des sources, est salutaire pour qui veut échapper aux ténèbres, car « nous empruntons des chemins de brume comme tremplins vers la lumière ».

Nuit de foi et de vertu, Louise Glück (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Mardi, 04 Mai 2021. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Gallimard

Nuit de foi et de vertu, Louise Glück, mars 2021, trad. anglais (USA) Romain Benini, 160 pages, 17 €

 

Au sein de cette Nuit de foi et de vertu, la plupart des poèmes s’ouvrent comme d’apparents récits, ont l’air de se dévoiler avec une narration traditionnelle. Mais la forme du vers, bien souvent, prédomine ; et même quand cette forme n’y est pas, un rythme s’impose tel qu’il nous fait entrer dans le courant d’une pensée, ou de plusieurs pensées, comme autant de temporalités, d’images, de tableaux, qui s’entrecroisent, malgré soi, qui se brouillent dans un même flux, cherchant à nous faire atteindre – peut-être – un sens à nos émotions. Cela voudrait-il dire que Louise Glück (ou l’énonciateur du poème) tend à un but ? Probablement moins qu’on ne le croie. Il semble plutôt que la poétesse tienne à exposer : on part d’un fait somme toute banal, qui, au fur et à mesure du déroulement continu du poème, prend des dimensions de plus en plus larges sur l’existence confrontée au temps, sur les questionnements et événements qui ont bouleversé une vie. Et tout ceci sans l’once d’une grandiloquence, mais plutôt en ayant l’air de passer, telle une ombre glissant devant une fenêtre ensoleillée, et en étant toujours relié au quotidien.