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Les Livres

Seules les bêtes, Colin Niel

Ecrit par Philippe Chauché , le Samedi, 11 Février 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Le Rouergue

Seules les bêtes, janvier 2017, 224 pages, 19 € . Ecrivain(s): Colin Niel Edition: Le Rouergue

 

« La tourmente.

Oui, certains disaient qu’Evelyne Ducat avait été emportée par la tourmente, comme autrefois. La tourmente, c’est le nom qu’on donne à ce vent d’hiver qui se déchaîne parfois sur les sommets. Un vent qui draine avec lui des bourrasques de neige violentes, qui façonne les congères derrière chaque bloc de roche, et qui, disait-on dans le temps, peut tuer plus sûrement qu’une mauvaise gangrène ».

Seules les bêtes est ce roman de la tourmente. Le roman du vent glacial qui saisit les hommes et les femmes du plateau, qui vient griffer ce territoire oublié, perdu, saisi par le givre. La tourmente des corps et des âmes est au cœur de ce roman polaire. Une femme disparaît dans la tourmente, seule reste sa voiture abandonnée, et cette étrange disparition va révéler ces vies, ces rêves, ces fantasmes qui sommeillent entre les fermes sombres et isolées, dans les ornières des chemins boueux, et dans les bergeries où se blottissent les brebis.

Tocqueville, Brigitte Krulic

Ecrit par Vincent Robin , le Samedi, 11 Février 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, Folio (Gallimard), Histoire

Tocqueville, février 2016, 318 pages, 10 € . Ecrivain(s): Brigitte Krulic Edition: Folio (Gallimard)

 

Comprendre et définir la personnalité singulière, à la fois privée et publique, de celui qui se rendit célèbre à plusieurs titres durant la première moitié du XIXe siècle sous le nom authentique d’Alexis-Henri-Charles Clérel, comte de Tocqueville, requiert imparablement aujourd’hui un champ de vision élargi au cadre détaillé des évolutions sociales et politiques que connut la France pendant, mais aussi avant le cycle de son existence. Incontestablement nantie d’une connaissance sérieuse de toutes les secousses qui bousculèrent tour à tour les structures et le mode culturel de l’Etat, quelquefois même au-delà des strictes limites du pourtour national, également assurée d’une analyse objective des positions et agissements d’un seul à travers les contrecoups sismiques hérités du grand séisme révolutionnaire de 1789, Brigitte Krulic restitue de façon alerte et clairvoyante le cheminement vital du penseur et écrivain politique devenu après La Fayette sûrement le plus inconditionnel défenseur hexagonal de la démocratie à la mode étasunienne.

Ton cœur comme un poing, Sunil Yapa

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Vendredi, 10 Février 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, Rivages

Ton cœur comme un poing, janvier 2017, trad. anglais (USA) Cyrielle Ayakatsikas, 352 pages, 23,50 € . Ecrivain(s): Sunil Yapa Edition: Rivages

C’est un roman puissant, un roman américain dans ce qu’il donne de meilleur, écrit au présent de narration, comme si les événements se déroulaient devant nos yeux, immédiatement.

L’intrigue prend place lors d’une des premières manifestations altermondialistes, la fameuse marche de protestation qui a lieu à Seattle en novembre 1999. Deux camps se font face : les manifestants, pacifistes de tous bords, et les forces de police, prêtes à tout pour maintenir l’ordre.

Plusieurs personnages sont approchés en multifocale : Victor le junkie, John Henry l’ancien homme d’Eglise, l’agent de police Timothy Park au visage balafré, patrouillant sur son cheval, Julia, dite Ju, la fliquette armée pour tuer, le Major Bishop, à la tête des forces de l’ordre en charge de la sécurité, menant les troupes au combat, King, la spécialiste de la non-violence. Il y a aussi le Dr Charles Wickramsinghe, ministre adjoint des Finances et de la Planification du Sri Lanka, délégué pour participer à une rencontre avec Clinton afin d’obtenir la quarantième et dernière signature de son traité régulant le commerce extérieur de son pays, et malencontreusement pris dans le maëlstrom. Tous ces personnages, le lecteur les suit pas à pas, heure après heure, dans leurs déplacements, les scansions de leurs slogans, leurs pensées et leurs agissements.

Le silence pour toujours, Stuart Neville

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 09 Février 2017. , dans Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, Rivages

Le silence pour toujours (The Final Silence), janvier 2017, traduit de l’anglais par Fabienne Duvigneau, 316 p. 22,50 € . Ecrivain(s): Stuart Neville Edition: Rivages

 

Retrouver Stuart Neville et son flic préféré, Jack Lennon, c’est comme replonger au fond du gouffre le plus noir. On sait peut-être ce qui nous y attend, mais à chaque nouveau livre, il semble que l’obscurité se fait plus opaque, plus glaciale.

Jack Lennon va mal. Ce n’est pas nouveau pour ce personnage poissard, ambigu, violent. Mais son mal s’est encore aggravé. Il est en morceaux, au plan physique et plus encore au plan psychique. Il n’est peut-être pas (encore) fou, mais il flirte dangereusement avec les pathologies mentales les plus graves. Sa vie est un enfer qui tourne comme un cycle fatal : pour supporter la douleur (physique) il avale des antalgiques puissants – non prescrits par ordonnance – ce qui accroît sa douleur (mentale). Une descente en enfer vécue dans la solitude. Sa « compagne » du moment, Susan, ne veut plus de lui, n’en peut plus de lui. Elle a accueilli Lennon avec sa fille Ellen en espérant recomposer une famille (elle-même a une fille). Mais alcool, drogues, désespoir ont fait de Lennon une loque et elle n’en veut plus.

Complot à Paris, Christian Lestavel

Ecrit par Mélanie Talcott , le Jeudi, 09 Février 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits

Complot à Paris, Editions les indés, décembre 2016, 242 pages, 17,90 € . Ecrivain(s): Christian Lestavel

 

« Sommes-nous tout juste bons à reproduire incessamment les mêmes erreurs, comme le font à chaque saison ces milliards de bestioles ? (l’auteur évoque les milliers de fourmis volantes qui viennent s’immoler sur l’ampoule brûlante d’un réverbère) Ou sommes-nous la seule erreur de cette même nature qui finira par regretter de nous avoir engendrés ? Monstres ? Démons ? Ne sommes-nous pas nous-mêmes cette lumière, cette chaleur qui fait de chacun de nous un prédateur dénué de conscience ? A moins que nous ne soyons aussi nos propres proies ? » pose Christian Lestavel en préambule de son livre Complot à Paris, avant de nous précipiter magistralement dans la violence du massacre de septembre 2009, perpétré à Conakry par Dadis Camara et ses sbires.

Moussa Dadis Camara… La plupart d’entre nous ne sauraient mettre un visage sur ce nom. Un capitaine de l’armée guinéenne, président auto-proclamé et dictateur dézingué comme il y en a tant en Afrique et dans bien d’autres pays. Les uns, la grande majorité dite civilisée, déambulent tous frais payés, de leurs bureaux douillets en G7, 8 ou 20, et d’un trait de plume mettent sous paraphe le destin des peuples et des individus. Les autres, une minorité, s’encombrent moins de tergiversations diplomatiques et d’effets de manche. Shootés à leur propre folie, ils y vont carrément à la machette et à la mitraillette.