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Langue portugaise

Lisbonne mélodies, João Tordo

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 10 Juin 2015. , dans Langue portugaise, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Lisbonne mélodies (O Ano Sabático), mai 2015, traduit du portugais par Dominique Nédellec, 240 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): João Tordo Edition: Actes Sud

 

Malgré son titre français, ce n’est pas de la ville de Lisbonne que nous parle ce roman, mais de musique et de création, et encore plus d’identité. Cela commence avec le retour au pays d’un musicien de jazz qui s’est découvert sur le tard une passion pour la contrebasse. Ses armes de jazzman, il les a faites à Québec où il a aussi appris la dépendance à l’alcool. Après quelques années où il s’est perdu lui-même, laissant derrière lui musique et amours rêvés, Hugo revient à Lisbonne, accompagné de son encombrante contrebasse dont il a juré qu’il n’en jouerait plus. Mais revenir là où on ne l’attend pas, où il n’a plus vraiment de place, c’est prendre des risques impossibles à imaginer. Comme celui de rencontrer son double, qui, lui, semble avoir « réussi » : le pianiste de jazz Luis Stockman, qui au cours d’un concert va le trahir, alors qu’ils ne se connaissent pas, en donnant à entendre la mélodie, le thème secret qui est comme l’âme du contrebassiste. Un thème qui le hante et qu’il n’a jamais pu achever et que l’autre lui a « volé ». Un autre qui pourrait être le frère jumeau qu’il aurait pu avoir mais qui n’a jamais vécu… Un frère par les yeux duquel il va apprendre ou réapprendre à voir le monde. La vie. Sa vie.

Berlin, Bucarest-Budapest Budapest-Bucarest, Gonçalo M. Tavares

Ecrit par Marc Ossorguine , le Vendredi, 22 Mai 2015. , dans Langue portugaise, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La Contre Allée

Berlin, Bucarest-Budapest Budapest-Bucarest (Berlim, Bucareste-Budapeste Budapeste-Bucareste) mars 2015, traduit du portugais par Dominique Nédellec, 96 pages, 8,50 € . Ecrivain(s): Gonçalo M. Tavares Edition: La Contre Allée

 

Gonçalo M. Tavares restera toujours un écrivain surprenant, à la fois exigeant envers le texte et envers ses lecteurs et toujours joueur et ironique, avec cette pointe « d’understatement » dont on pense, à tort, qu’elle est une spécialité purement britannique.

Dans cette nouvelle collection à vocation européenne, et donc voyageuse, ce nouvel opus de l’homme du « barrio » (cette série de petits livres délicieux, délicieusement graves et fantaisistes, Monsieur Valéry, Monsieur Kraus, Monsieur Swedenborg, Monsieur Calvino…) nous fait voyager, comme son titre l’affiche clairement et d’étrange façon, entre Berlin, Budapest et Bucarest.

Berlin en compagnie d’une jeune femme radicale et perdue, à la fois sans illusion et à la poursuite de ses rêves – ou de ses cauchemars, peut-être. Pourfendeuse des simulacres culturels, elle cherche dans la ville elle-même ou ce qui lui permettra de grandir sans se perdre plus qu’elle ne l’est au fil de ce bref road movie urbain.

Corps étranger, Adriana Lunardi

Ecrit par Anne Morin , le Jeudi, 21 Mai 2015. , dans Langue portugaise, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Roman, Joelle Losfeld

Corps étranger, mars 2015, trad. du portugais (Brésil) par Maryvonne Lapouge-Pettorelli, traduction révisée par Briec Philippon, 272 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): Adriana Lunardi Edition: Joelle Losfeld

 

Le corps étranger c’est, pour chacun des personnages du roman, ce composé chimique à quoi se réduisent ses sensations, ses absences à être, à la vie, son détournement, sa maladie ou son addiction. Aucun d’entre eux n’est bien dans sa peau, chacun développe des terminaisons nerveuses ou des projections, qui lui reviennent en boomerang, ou des greffons qui prennent plus ou moins bien. Chaque concentré de personnage semble agir comme un électron libre dont la seule finalité est de se décharger dans la rencontre, à l’instar de ces plantes : Cela faisait déjà un moment que certaines espèces de fleurs natives souffraient de véritables reconfigurations (…) N’expérimente-t-elle pas elle-même la disparition furtive et sans protestations des références qui lui ont enseigné à être qui elle est ? Des livres qui furent de véritables bibles pour sa génération et que personne aujourd’hui ne connaît ? (p.16-17).

Mariana, peintre de renom d’un certain âge a relégué sa vie, troqué la vie mondaine et l’abstraction contre une vie de solitude en montagne, à la recherche de la représentation d’une espèce rare de plante, qui ne fleurit qu’une fois. Ce choix (?) de vie est intervenu après la mort accidentelle de son frère, José, bien des années auparavant.

Laissez parler les pierres, David Machado

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mardi, 16 Décembre 2014. , dans Langue portugaise, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Laissez parler les pierres (Deixem falar as pedras, 2011), Ed. de l’Aube, août 2014, traduit du portugais par Vincent Gorce, 320 pages, 19,90 € . Ecrivain(s): David Machado

 

Valdemar écrit. Il écrit les souvenirs de son grand-père. Valdemar est un adolescent qui supporte mal le lycée et qui est plein de désir envers sa seule amie, Alice, une jeune fille anorexique qui le trouve si cool. Entre un père vaguement présent, plus soucieux d’histoire et de sa collection de pièces, et une mère journaliste dont la carrière justifie bien des absences, l’adolescent va être pris par les souvenirs terribles que son grand-père lui livre entre deux « tele-novelas ».

Aujourd’hui, le grand-père, Nicolau Manuel, se sent bien peu chez lui, occupant le bureau de son fils, ne pouvant plus se déplacer sans fauteuil et devenu sourd il y a des années. Jadis, Nicolau était le chasseur le plus réputé de son village, promis à un mariage avec la délicieuse Graça… mais aux sombres années de la dictature son destin a basculé, accusé de complots, de crimes, d’agitation politique, il va connaître des années durant l’emprisonnement, la torture et l’arbitraire le plus absurde… c’est en tout cas ce qu’il raconte, ce que Valdemar écrit page après page.

L’Apocalypse des travailleurs, Valter Hugo Mãe

Ecrit par Marc Ossorguine , le Lundi, 03 Novembre 2014. , dans Langue portugaise, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Métailié

L’Apocalypse des travailleurs (O apocalipse dos trabalhadores), traduit du portugais par Danielle Schramm, 208 pages, 18 € . Ecrivain(s): Valter Hugo Mãe Edition: Métailié

 

 

Au delà des images pour les touristes, la vie n’est ni pittoresque ni facile au Portugal. Surtout lorsque l’on vit dans une petite ville comme Bragança, au nord du pays, tout près de la frontière espagnole et à 250 km de Porto. Surtout quand, comme Maria da Graça et son ami Quitéria, on survit en faisant des ménages, en jouant les pleureuses lors des obsèques, voire en ayant de temps en temps recours à la prostitution. Ce n’est guère mieux, même si l’on est jeune est beau, quand l’on vient d’Ukraine et qu’on ne parle pas la langue, comme Andriy, qui a laissé au pays ses parents Ekaterina et Sasha. La seule consolation, parfois, c’est d’être si bas qu’on ne peut tomber plus. Ce qui permet par-dessus tout de survivre, ce sont les rêves que chacun tente d’entretenir. Rêves de mariage, de modeste réussite qui permettraient, ne serait-ce qu’une fois, de prendre des « vacances ».