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La rentrée littéraire

La part des nuages, Thomas Vinau

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 21 Août 2014. , dans La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Alma Editeur

La part des nuages, 21 août 2014, 16 € . Ecrivain(s): Thomas Vinau Edition: Alma Editeur

 

« La peur et la joie. Pile ou face. On vit toute une vie avec ça. La peur ou la joie. Etre une pièce. On tombe d’un côté ou de l’autre. On choisit, plus ou moins, de quel côté on tombe. La joie est le dos de la peur. Quand l’une s’éloigne, on distingue le sourire sur le visage de l’autre. On est les deux ».

Fantaisie de la littérature, apparition (ϕανταὓία) de l’art, ainsi naissent les romans et les poèmes de Thomas Vinau. Ecrivain du réel pris sous les éclats éblouissants de l’imaginaire, comme ces petites pièces que l’on fait tourner dans sa main, et qui une fois lancées à bonne hauteur, retombent et font jaillir en touchant le sol, des dizaines d’éclats romanesques, des aventures microscopiques. La part des nuages est l’apparition de Joseph et Noé, le père et le fils. Le détachement et la fuite dans les branches comme une fantaisie que le narrateur prend à la lettre : voici un cerisier, j’en fais ma cabane, une arche, comme Noé ses châteaux de sable. Fantaisie de la fiction, apparition d’une tortue vagabonde, d’une flutiste appliquée, d’un clochard qui chatouille de son rire les orteils du céleste, Altocumulus de tristesse, voyage au bout de la nuit nuageuse accompagné d’écrivains boussoles.

Le règne du vivant, Alice Ferney

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 20 Août 2014. , dans La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Le règne du vivant, 20 août 2014, 208 pages, 19 € . Ecrivain(s): Alice Ferney Edition: Actes Sud

 

Ce récit aurait pu commencer par « Appelez-moi Gérald », à l’image de l’ouverture du Moby Dick d’Herman Melville, « Appelez-moi Ismaël », tant le souvenir du capitaine Achab revient irrésistiblement au lecteur. Ce n’est pas seulement parce que le récit tourne autour des baleines et de leurs chasseurs, mais aussi par la puissance du personnage central du récit, le capitaine Magnus Wallace. Celui-ci est par contre un chasseur de chasseur qui navigue de par le monde pour harceler non les baleines, mais les industriels qui arment de gigantesques navires usines qui tuent les grands cétacés au mépris le plus total des accords internationaux, avec la plus totale passivité, quand ce n’est pas avec la complicité, des autorités nationales.

Gérald Asmussen est un journaliste norvégien qui fait le choix de suivre dans ses expéditions l’activiste écologiste radical qu’est le capitaine Wallace. Un capitaine militant qui dérange avec ses méthodes qui ressemblent beaucoup à celles adoptées par les activistes de Greenpeace : radicale mais fondamentalement non-violente, ou plutôt contraignant leurs adversaires à faire état de leur violence quotidienne.

Visible la nuit, Franck Maubert

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 18 Août 2014. , dans La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Fayard

Visible la nuit, 20 août 2014, 208 pages, 17 € . Ecrivain(s): Franck Maubert Edition: Fayard

 

Momo, dit Mao-Mao, a vingt ans et des poussières lorsque son chemin croise, en pleine canicule de 1976, celui de Robert Malaval, de vingt ans son aîné, « un long type avec une belle gueule, vêtu de jeans portés haut, d’une chemise imprimée de petits éclairs de couleur et coiffé d’un feutre malgré la chaleur ».

De cette rencontre naît une amitié réciproque qui liera les deux hommes jusqu’au suicide d’une balle dans la tête en août 1980 de l’un des représentants parmi les plus mythiques de la création picturale française des années 60 à 80. Dans Visible la nuit, Franck Maubert brosse le portrait en deux cents pages non seulement de l’artiste disparu et partiellement oublié, mais il reconstitue également l’ambiance de bouleversements et de changements majeurs dans les arts que connut une époque où le modèle de la société occidentale d’après-guerre fut particulièrement critiqué. L’Art-action, les happenings, les performances s’enchaînent et créent une forme d’espace démocratique où se rapprochaient l’art et la vie.

Une illusion passagère, Dermot Bolger

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 22 Octobre 2013. , dans La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, Joelle Losfeld

Une illusion passagère (The Fall of Ireland), traduit de l’anglais (Irlande) par Marie-Hélène Dumas, août 2013, 133 pages, 15,90 € . Ecrivain(s): Dermot Bolger Edition: Joelle Losfeld

Quand Martin, haut fonctionnaire irlandais, accompagnant en Chine pour la célébration de la fête de Saint-Patrick le sous-secrétaire d’état au cabinet de qui il est attaché, se retrouve seul dans son hôtel, à Pékin, où l’a laissé son patron pour un jour ou deux, il loue, après avoir longuement tergiversé, les services d’une masseuse.

L’aventure est banalement triviale.

Les hôtels chinois, constate le narrateur, intègrent très naturellement ces prestations, dûment tarifées, dans l’éventail des offices disponibles.

Tout naturellement, Martin s’attend, avec une sourde excitation, à ce que l’officiante lui propose le massage spécial. Et en effet la jeune femme qui le rejoint dans sa chambre lui soumet, après une onctueuse friction qui lui procure un délicieux moment de plaisir, l’offre espérée.

Le récit aurait pu consister en une suite de tableaux érotiques, voire pornographiques, de ce qui se passe ordinairement en ces moments-là.

Arizona Tom, Norman Ginzberg

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 14 Octobre 2013. , dans La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Héloïse D'Ormesson

Arizona Tom, août 2013, 224 p. 17 € . Ecrivain(s): Norman Ginzberg Edition: Héloïse D'Ormesson

« À Brewsterville, les distractions sont rares. /…/ Ce n’est pas moi qui m’en plaindrais. Moins il s’en passe mieux je me porte. Je suis le shérif de ce bled. Un shérif placide et discret, ni bégueule ni fiérot. Pas un de ces paltoquets qui bombent le torse devant les voleurs de poules, une main sur l’étoile, l’autre sur la crosse de leur colt. Je suis shérif comme d’autres sont putains ou croquemorts, parce qu’il en faut ».


Ocean Miller, alias Ocean Meier, fils de juifs immigrés venus chercher fortune en Amérique après avoir fui Hambourg où ils ne vivaient que dans la malédiction, la misère et le mépris, se livre au soir de son existence au jeu des confidences. Une vie sans grande étoffe, souvent marquée par la poisse, jusqu’à ce poste de shérif dans ce trou perdu d’Arizona aux limites du désert de Mojave. Entre deux rasades de bourbon, il se remémore… les petit boulots d’avant, les succès faciles auprès des femmes, l’engagement dans l’Union pendant la guerre de Sécession aux côtés du général Chamberlain, le poste d’adjoint d’un marshal dans le Kansas, la traque aux voleurs de bétail, les amitiés trahies et au bout de la route, ni épouse, ni enfants, ni même un toit, dans ce bled où il ne se passe rien ou presque. Sauf le mercredi 8 juin 1883, où le chemin du shérif croise dans le désert celui d’un gamin sourd-muet, Tom, tirant au bout d’une corde un homme-tronc.